C'est un magasin comme on n'en voit plus. Du pot de peinture au magret de canard en passant par le sifflet anti-gibier, Bruno Merlaud vend de tout dans son magasin de Verteillac, en Dordogne. Depuis 120 ans, l'affaire familiale comble les moindres désirs de ses clients. Une institution locale.
"Comme d'habitude, de l'alimentaire, et puis là, je viens d'acheter une télé." Cet habitant de Verteillac, qui vient aussi d'acheter des clés, est en train de faire ses emplettes chez Merlaud, une épicerie-droguerie-électro-ménager-alimentation-magasin de bricolage, où "on trouve tout". Littéralement.
Cette autre cliente repart avec des sifflets anti-gibier et du magret de canard qu'elle destine à la Belgique. D'autres viennent acheter un lit, des chaussons, des fruits, des vis, du vin, un poêle à bois, du jambon, une boîte aux lettres, des conserves, des planches, des outils ou des casseroles...
Commerçants de pères en fils
Sur 1 000 mètres carrés, le commerce de Bruno Merlaud est atypique. Ici, on trouve évidemment de tout, mais surtout ce qu'on ne trouve nulle part ailleurs."On essaye d'avoir tout un tas de choses introuvables", résume sobrement son propriétaire. C'est un des atouts de cette supérette rurale. "C'est sûr que ce n'est pas rentable. Mais le client repart avec le sourire, et ça, c'est le principal. Je ne serai jamais riche, mais ça, ce n'est pas grave."
J'aime bien rendre service aux clients, chercher, passer du temps pour trouver quelque chose qu'il n'a pas réussi à trouver ailleurs. J'ai baigné là-dedans depuis mon enfance, donc cet esprit, je l'ai.
Bruno Merlaud,Propriétaire des établissements Merlaud
Le moins que l'on puisse dire, c'est que la philosophie commerciale de Bruno Merlaud n'est pas tout à fait dans les standards actuels. Pourtant, son affaire tourne bien, et depuis longtemps. Depuis plus de 120 ans exactement.
Avant 1900, son aïeul s'est lancé dans le commerce. Un magasin s'est installé ensuite dans ces locaux du bourg de Verteillac au milieu des années 30. "C'est une très vieille maison. Mon arrière-grand-père, c'est le fondateur. Je suis la quatrième génération à faire perdurer les magasins Merlaud, commente fièrement Bruno. Ça fait chaud au cœur de savoir que l'entreprise a été montée par quelqu'un de la famille et que ça fait plus de 100 ans que ça perdure". Même s'il avoue que cela lui met la pression pour "être digne de ses prédécesseurs".
Les "galeries Lafayette" de Verteillac
À son allure atypique, les habitants du secteur reconnaissent surtout à ce magasin sa fonction quasi vitale. "Les habitants viennent me dire : "sans les établissements Merlaud, on ne vit pas". Et sans les verteillacois, les établissements Merlaud ne vivent pas", sourit Anne-Marie Marchand, la gestionnaire du commerce depuis avril 2024.
Pour elle, c'est d'ailleurs la "notoriété, par rapport la clientèle, à la gentillesse" qui est le secret de commerce. Elle, a actuellement la lourde tâche de dématérialiser et d'informatiser une gestion plus que centenaire. "L'entreprise se porte très bien. Merlaud, c'est un nom. C'est, comme on dit, les "Galeries Lafayettes de Verteillac."
Vous allez dans des grands commerces, il n'y a pas cette convivialité, il n'y a pas ce service, il n'y a pas ce sourire. Ici, c'est vraiment familial. On a vraiment le plaisir de venir travailler.
Anne-Marie Marchand, gestionnaire
Les meilleurs pour en attester restent les clients. "Il n'y aurait pas eu Merlaud, je ne serais pas venue m'installer ici, conclut Babette, fidèle cliente depuis son arrivée dans le village, il y a 14 ans.Il y a tout ici. Moi, je n'ai pas de voiture. J'ai 84 ans, j'habite dans le bas du village. À mon âge, pas besoin de voiture, pas besoin d'aller à Ribérac. Tu as besoin de quelque chose, tu le demandes, ils te le livrent ! Vraiment, c'est formidable ici." Un peu comme Amazon, l'humain en plus.