Selon une étude récente, les femmes sont deux fois plus concernées par les risques de burn out que les hommes, et la crise sanitaire a exacerbé les situations de mal être notamment avec le télétravail. Une Bordelaise, Anne-Sophie Vives, a créé une association pour aider les victimes.
Epuisement total au travail et à la maison ? Selon une étude récente de Ipsos et du Boston Consulting Group auprès de 2000 salariés, plus d'une femme sur trois (34% contre 28% pour les hommes) se dit "être sur le point de craquer" depuis le début de la crise sanitaire en mars 2020. Anne-Sophie Vives a connu le mal être du burn out qui s'insinue peu à peu, jour après jour, dans votre vie du quotidien jusqu'au jour où c'est l'effondrement.
"Tomber dans un puits sans fond"
Anne-Sophie Vives, jeune mère de famille, travaillait dans une étude notariale comme notaire quand elle a fait un burn out. Un trop plein au travail, un trop plein à la maison aussi. Le corps ne répond plus. Le cerveau se débranche."En parlant de ma situation autour de moi j'ai découvert que de nombreuses femmes vivaient la même chose et j'ai créé une communauté sur les réseaux sociaux, les BURN'ettes, pour échanger sur nos parcours et nos difficultés. Je me suis aperçue qu'il y avait une méconnaissance autour du burn out et pas vraiment de prise en charge et surtout qu'il touchait surtout les femmes qui doivent conjuguer vie professionnelle et vie familiale en même temps".
Mère attentionnée, working girl performante, épouse aimante, femme qui tient son intérieur, sportive avant l’été, etc. Les injonctions faites à la femme dite “moderne” se heurtent parfois à nos propres limites physiques jusqu’au burn out !
Pauline Guillerm, 33 ans, a traversé elle aussi un burn out. Cette jeune mère de famille, cadre dans la grande distribution en région parisienne, a complètement craqué en mai 2019. Un matin, elle n'a pas réussi à se lever pour aller au travail.
J'avais cette sensation d'effondrement, de tomber dans un puits sans fond, et s'ajoutait une grande culpabilité et une mésestime de soi pour moi-même. Je me suis pris un mur.
Un épuisement total précédé de nombreux symptômes, mais que la jeune femme n’a pas voulu voir. Son médecin non plus. "Maux de tête à répétition, insomnies, problèmes pour gérer ses émotions, j'ai même fait une infection qui m'a valu une opération", raconte Pauline Guillerm.
Mal diagnostiqué et mal pris en charge
Difficile d'expliquer son mal être à son entourage. Les médecins pensent souvent à une déprime passagère ou alors à une dépression. Mais ce ne sont que des conséquences du burn out qui est très profond et peut durer dans le temps. Anne-Sophie Vives raconte qu'avant de craquer, elle avait des migraines quotidiennes, des douleurs articulaires dans tout le corps, et une immense fatigue.
Je travaillais 50 heures par semaine, j'avais des enfants en bas-âge, je ne voyais plus comment sortir de cette situation qui me faisait souffrir.
La fondatrice de L'BURN a aussi constaté que "bien souvent les médecins traitent les problèmes indépendamment des uns des autres, mais tout est lié et une seule solution il faut s'arrêter, et se faire aider. Seule on ne peut pas lutter".
Pauline a quitté Paris pour s'installer à Bordeaux. En arrivant dans cette nouvelle ville, elle pris contact avec l'association d’entraide de femmes victimes de burn out créée par Anne Sophie Vives. "J'ai repris pieds grâce à l'association qui a su m'accompagner pour rebondir.", témoigne la jeune femme au visage souriant. "La famille et les amis ne sont pas formés pour nous aider et ils ne comprennent pas toujours ce que l'on ressent. Souvent aussi, on leur cache la vérité car on a honte".
34 % des femmes sur le point de "craquer"
L’association L’Burn tient une permanence au Point info femme au deuxième étage du centre commercial de Bordeaux Mériadeck en attendant d'investir de nouveaux locaux au Bouscat.
Avec le burn out, le problème c'est l'isolement des victimes.
A l'association, les bénévoles ont remarqué qu' "avec les confinements, les troubles psychiques ont augmenté, il y a beaucoup d'anxiété chez les femmes qui sont particulièrement touchées". Ici, les femmes sont anonymes et "peuvent parler sans être juger". "Certaines n'ont plus la force de sortir de chez elle tellement elles sont mal", raconte Pauline Guillerm qui elle aussi a eu du mal à pouvoir à nouveau croiser le regard des autres.
Dans l'association L'BURN, les victimes sont prises en charge en fonction de leur état physique et psychique, il y a même une assistance juridique, le burn out n’est pas reconnu comme maladie et c’est parfois source de conflit avec l’employeur. "Il y a des questions qui concernent les conditions de travail, la durée des arrêts maladie, les ruptures de contrat avec l'employeur. Il faut vraiment se renseigner sur ses droits avant de démissionner", alerte Carole Lecocq Peltier, avocate spécialisée dans le droit du travail qui conseille individuellement les victimes de burn out et de manière anonyme pour l'association. "On intervient à tous les stades du burn out : de l'effondrement avec risques suicidaires au retour à l'emploi. On aide aussi les personnes qui sont dans le déni de ce qui leur arrive, c'est fréquent et elles refusent l'arrêt de travail. C'est pour cela que l'on travaille avec une psychologues du travail, une assistante sociale, une avocate, pour une prise en charge multidisciplinaire" pousuit Anne-Sophie Vives.
Une communauté Facebook les BURN'ettes
Ce groupe créé sur les réseaux sociaux par Anne-Sophie Vives s'appelle les BURN'ettes en écho aux femmes touchées par le burn out. "Nous apportons un soutien et un accompagnement aux femmes victimes de BURNout en vue de leur réinsertion sociale et professionnelle". Toutes les infos de l'association y sont relayées comme les groupes de parole, les ateliers de coaching individualisés, les aides juridiques, les sorties, etc...
Dans ces groupes, d'anciennes victimes touchées par ce syndrome partagent leur expérience. C'est le principe de cette association où les "anciennes" aident "les nouvelles venues" dans un esprit de solidarité comme Pauline qui est devenue bénévole. "C'est grâce à l'association que je suis sortie du tunnel. Cela m'a vraiment aidé, je ne me sentais plus seule dans mon mal être, et surtout je me suis sentie comprise. Aujourd'hui, je vais bien, j'ai déménagé et changé de vie, je suis même en cours de reconversion professionnelle, et je veux donner du temps aux autres et aider à mon tour".
Aujourd'hui je vais bien. Je m'en suis sortie. Le burn out n'a pas été un échec dans ma vie, mais une étape.
►Quels sont les symptômes du burn out ? Réponse dans cette interview d'Anne-Sophie Vives, fondatrice de l'association L'BURN au micro de América Lopez et Quentin Trigodet :
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