Xavier Hubert, à la tête du restaurant Le Plaisance à Bourg-sur-Gironde, a vu le prix de son kilowattheure passer de 0,07 euro à 1 euro 56. Une augmentation de 2200 % impossible à absorber. Pour tenir, il a bouleversé l'organisation de sa cuisine et mis en route un groupe électrogène.
Il aurait dû être beaucoup plus méfiant. Xavier Hubert, le patron du restaurant Le Plaisance, à Bourg-sur-Gironde, dans le blayais, n'avait pas vu arriver la hausse faramineuse qu'allait lui imposer son fournisseur d'électricité TotalEnergies.
Un tarif multiplié par 21
Quand il a reçu son nouveau contrat en août dernier, il l'a lu, signé et renvoyé, sans vraiment réaliser ce qui était inscrit.
Je pensais que le tarif passait de 0,07 euro à 0,15 euro, donc qu'il était multiplié par deux
Xavier Hubert -restaurateurà France 3 Aquitaine
"Jamais je n'aurais pu penser qu'il s'agissait en fait d'un prix de 1,56 euro par kilowattheures, soit une augmentation de 2200% !", avoue le restaurateur, piégé.
C'est quand il a reçu sa facture, début décembre, qu'il a réellement réalisé l'ampleur des dégâts. Et immédiatement décidé d'agir.
Le groupe électrogène pour éviter le dépôt de bilan
Il a ressorti un groupe électrogène de son garage. "Je ne l'utilisais qu'en cas de coupure, extrêmement rarement. Je l'ai remis en route et il fonctionne désormais à chaque service. Le carburant me revient à 1,20 euro le litre et on consomme 60 à 70 litres par jour. L'économie est énorme".
Cette solution lui permet de limiter les frais. Et d'éviter des factures mensuelles qui pourraient facilement dépasser les 20 000 euros.
Toute l'organisation du restaurant chamboulée
Xavier Hubert nous emmène à l'étage. Il ouvre la chambre froide. "On a éteint cinq frigos en bas, dans la cuisine, et on a regroupé tous les produits ici" explique-t-il. "C'est vrai que ça oblige les cuisiniers à monter et descendre constamment. C'est une contrainte de plus pour eux".
Il dit aussi avoir éteint le four à pizza, très énergivore et demandé au Chef de réduire les moments de cuisson.
"Ça commence à être lourd" reconnaît Guillaume Antoine, le Chef, qui espère revenir à son organisation habituelle le plus rapidement possible. "Toute la mise en place est décalée, on fait tout sur un même créneau. Forcément, les services sont un peu plus sportifs".
Le restaurant a également dû réduire ses heures de service et d'ouverture. En janvier, il se pourrait qu'il ne fonctionne que le week-end.
"J'ai fait une demande de chômage partiel, j'espère qu'elle sera acceptée".
"On marche sur la tête"
Xavier Hubert n'arrive pas à comprendre ce qu'il lui arrive. "On marche vraiment sur la tête".
"Pourquoi nous faire payer ce prix-là ?", interroge-t-il alors que les larmes lui montent aux yeux. Est-ce que le fournisseur lui paie ce prix ? Non, ça ne lui coûte pas 1 euro 56.
Pourquoi faire payer ce tarif ? C'est du vol, de l'escroquerie
Xavier Hubert - restaurateurà France 3 Aquitaine
Son contrat est en vigueur jusqu'en août 2023. Il espère pouvoir le renégocier avec l'aide de Pierre Kherradji, un courtier en énergie qui l'a récemment contacté, révolté par sa situation.
Les fournisseurs envoient des courriers qu'on prend souvent pour des publicités
Pierre Kherradji - courtier en énergieà France 3 Aquitaine
"On ne les lit pas dans le détail, on ne voit pas toujours la virgule au bon endroit. On a vu des clients facturés jusqu'à 3 euros du kilowattheure simplement parce qu'ils n'ont pas lu leur contrat" assure le spécialiste.
Espoir d'une renégociation
Pierre Kherradji pense pouvoir convaincre TotalEnergies de faire un geste pour l'établissement de Bourg-sur-Gironde.
"Les prix recommencent à redescendre, il y aura peut-être possibilité de renégocier. C'est aussi leur intérêt". Il espère aussi obtenir des aides de l'Etat pour l'établissement de Xavier Hubert. Et surtout, il va lui donner de précieux conseils pour changer les habitudes de consommation. "On a vécu dans l'opulence en France, aujourd'hui on se rend compte qu'il faut faire attention à notre façon de consommer".
Xavier Hubert emploie neuf salariés et ne veut pas se retrouver dans l'obligation de s'en séparer. "J'ai une très bonne équipe et c'est difficile de recruter aujourd'hui. J'ai besoin d'eux".
Voir le reportage d'Eva Huin et Sylvie Tuscq-Mounet :