Braquages et cambriolages : que se passe-t-il dans la métropole bordelaise ?

Un nouveau vol à main armée a eu lieu à Saint-André-de-Cubzac dans la nuit de dimanche à lundi. On décompte autant de braquages de commerces depuis la fin décembre, que sur une année entière. Parallèlement, les cambriolages ont augmenté de 24 % en 2019. 

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Les deux phénomènes sont distincts. L’un (les braquages) est un « épiphénomène », l’autre (les cambriolages de logements), une tendance à la hausse ces dernières années. Pour autant, les deux relèvent d’une augmentation de la délinquance observée sur l’agglomération bordelaise
La sécurité sera à coup sûr un thème de campagne sur lequel surferont certains candidats aux municipales. Un sujet sur lequel il est bien pourtant difficile d’interroger les institutions policières et judiciaires. Ni le parquet, ni la Direction Départementale de la Sécurité Publique, ni la préfecture, n’ont souhaité répondre à nos questions. « Trop tôt », nous répond la Préfecture qui attend la présentation des données annuelles par Christophe Castaner fin janvier. 
La procureure de la République, a en revanche, autorisé la police judiciaire, en la personne de Patrick Léonard, à s’exprimer. Décryptage.

Le décompte 

1 -  28 décembre 2019 : Leclerc de Pessac
2 -  31 décembre 2019 : Auchan de Talence
3 -  4 janvier 2020 : Carrefour City de Talence
4 -  5 janvier 2020 : boulangerie 48 du Haillan
5 -  10 janvier : Petit Casino du quartier jardin public de Bordeaux
6 -  13 janvier 2020 : station Total du cours du Médoc à Bordeaux
7 -  27 janvier 2020 : aire de repos l’Estalot sur l’A10 (St-André-de-Cubzac)
   

Braquages : " le fait de solitaires qui agissent par série " 

« Depuis la dernière quinzaine de décembre, on a une recrudescence des vols à main armée. C’est un phénomène un peu atypique puisque les vols à main armée sont statistiquement en chute libre depuis quelques années », explique Patrick Léonard, directeur interrégional adjoint de la police judiciaire à Bordeaux. « Mais qui n’est pas exceptionnel. Et par le passé, on a pu avoir des petites flambées de faits comme ça de manière sporadique sur des endroits du territoire et là en l’occurrence, c’est sur l’agglomération bordelaise ». 

« Donc effectivement on a recensé six faits dont on a été saisis depuis la dernière semaine de décembre, ce qui représente au total à peu près l’équivalent des faits identiques de l’année précédente », décomptait-t-il mercredi dernier alors que le braquage d’un commerce sur une aire de repos à Saint-André-de-Cubzac n’avait pas encore eu lieu. « Donc c’est notable statistiquement. On ne peut pas parler pour autant d’activité criminelle organisée puisqu'on peut le dire, c’est le fait donc de solitaires qui agissent par série et dont les séries vont s’achever soit par eux-mêmes, soit par l’interpellation de leurs auteurs ». 

Le profil des braqueurs 

« Il n’y a pas de profil type, mais on pourrait quand même en formaliser un : de jeunes délinquants qui franchissent une étape dans la gravité des faits qu’ils commettent », explique le directeur interrégional adjoint de la police judiciaire. « Généralement, ils ont tous eu affaire à la justice pour des faits de délinquance, et pour se sortir de situations quelques fois difficiles, ils choisissent la mauvaise option de passer à des faits qui sont plus graves. Je rappelle qu’un vol à main armée, ce n’est pas anodin, les victimes sont généralement traumatisées par ce qui leur est arrivé et ce sont des faits criminels, donc passibles de cour d’assises et d’une peine de réclusion pouvant aller jusqu’à 20 ans. Donc c’est vraiment une mauvaise option qui serait levée par ces délinquants dans leur passage à l’acte ».

 

 

Un épiphénomène 

« C’est un épiphénomène, les vols à main armée statistiquement sont bien moindres que par les années passées », relève Patrick Léonard. « Chaque année, le nombre se réduit. Mais ce n’est pas non plus exceptionnel, si on prend par exemple l’année 2015, à la même période, novembre-décembre, on avait eu une douzaine ou une quinzaine de vols à main armée auprès des commerces bordelais commis par le même individu. Donc on voit que ce phénomène peut se reproduire, mais de manière très sporadique et c’est généralement le fait de solitaires qui passent à l’acte ».
 


Des délinquants agissent-t-ils avec plus ou moins d’amateurisme ?

« Amateur oui et non », tempère le directeur adjoint de la PJ. "Si on prend l’exemple des derniers faits qui se sont commis sur l’agglomération bordelaise avec les deux premiers, commis au préjudice de supermarchés de l’agglomération, dans le mode opératoire il y a quand même une certaine sophistication. L’individu agit d’abord avec sang-froid, menace tour à tour chaque hôtesse d’accueil pour se faire remettre les recettes et s’enfuit avec un véhicule volé qu’il abandonne à quelques centaines de mètres. Donc, là, on est dans un type de délinquance un petit peu plus évolué que dans les derniers faits dont on a été saisi, où là ce sont des agissements de solitaires qui arrivent soit à l’ouverture soit à la fermeture et braquent les personnes présentes pour obtenir le fond de caisse. Ils laissent des traces ».

Deux personnes interpellées

L’auteur présumé des vols à main armée commis fin décembre au Leclerc de Pessac et au Auchan de Talence a été interpellé, mis en examen le 10 janvier dernier pour effraction et vols avec arme et écroué à la maison d’arrêt de Gradignan.

Mardi 21 janvier, un autre homme a été interpellé. Il est suspecté d’avoir braqué la superette du quartier jardin public à Bordeaux et la station Total du cours du Médoc.  Il devait être jugé en comparution immédiate vendredi dernier. L’audience a finalement été reportée à la fin du mois de février. "Nous, on est soulagés, clairement", avoue Daniel Pineau propriétaire de la supérette, "d'abord parce qu'il ne pourra pas commettre d'autres méfaits chez nous et ailleurs". "Et par ailleurs, s'il s'avère que c'est la personne qui a commis cette agression chez nous, j'espère qu'il sera puni à hauteur de ce qu'il a fait. Parce qu'il y a quand même au-delà du préjudice financier qui est pas important il y a quand même un préjudice moral et psychologique pour le personnel". Rappelons que ce jour-là, l'homme qui ava fait irruption dans ce commerce portait un masque de clown. Il a fait usage de son arme à une reprise sans faire de blessé avant de menacer le caissier.

Il reste donc trois vols à main armée à élucidercelui du Carrefour City de Talence, de la boulangerie du Haillan, et de l’aire de repos de L’estalot à Saint-André-de-Cubzac. 

 


Les cambriolages en augmentation

En novembre dernier, des chiffres ont été rendus officiels. Entre janvier 2019 et octobre 2019, 1240 cambriolages de logements ont été recensés à Bordeaux et 17 communes de la Métropole, c'est-à-dire dans la « zone police ». Cela représente une augmentation de 24 % par rapport à 2018. 
« Pour ce qui concerne la police judiciaire nous ne sommes pas saisis de l’ensemble des cambriolages », précise Patrick Léonard. « Ils sont très importants. Nous n’avons qu’un certain aspect, ce qui sont commis par des équipes structurées et organisées et qui répondent aux critères de la criminalité organisée dont nous sommes généralement saisis. Ça peut être du simple cambriolage et la séquestration à domicile. Ce que l’on constate, c’est qu’effectivement, contrairement au vol à main armée classique, il y a une certaine augmentation. Je laisserai communiquer les autorités administratives et judiciaires sur les chiffres ».

Mélissa*, jeune maman vivant seul avec son bébé de 18 mois a été cambriolée à son domicile en octobre dernier alors qu’elle était partie au travail. A son retour elle trouve son appartement « sans dessus dessous ». Deux ordinateurs lui ont été volés, ainsi que des bijoux, la télévision, et deux enceintes. Elle a eu beau, depuis, faire poser deux verrous supplémentaires, l’angoisse est toujours présente. « J’ai peur, je ne me sens pas en sécurité et je me suis sentie vraiment violée dans mon intimité », explique la jeune maman. Comme elle, de nombreux commerces du quartier des Chartrons ont eux aussi été cambriolés ces derniers mois. Restaurants, boutiques… Les voleurs repartent à chaque fois avec un maigre butin. 

Les élus sont bien conscients du problème qui n’épargne aucune commune de la métropole bordelaise. Anne-Marie Cazalet, maire adjoint du quartier Chartrons – Grand Parc – Jardin public est très claire : « C’est un sujet récurrent à la fois dans la Ville et dans la Métropole. C’est un sujet qui n’est pas récent, mais qui récemment a pris quand même une forme d’ampleur, tout le monde le constate ». L’élue déplore l’absence d’une police de proximité. Un CLSPD (conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance) doit se tenir aujourd’hui à la mairie de Bordeaux. « C’est une instance co-présidée par madame la préfète, par le procureur de la République et par le maire de Bordeaux, donc on évoquera un certain nombre de secteurs, un certain nombre de quartiers », explique Anne-Marie Cazalet.

Les MNA sont-ils impliqués dans des réseaux organisés de cambriolages ?

« Sur la délinquance dont on s’occupe nous », explique Patrick Léonard de la police judiciaire de Bordeaux, « je répondrais par la négative ». « Généralement les équipes qui commettent des cambriolages ciblés avec repérage en fonction de l’intérêt que peut porter la cible qu’ils envisagent, les réseaux qui sont spécialisés dans les séquestrations à domicile etc, ne sont pas le fait des MNA ( Mineurs non accopagnés ). Après les MNA c’est une délinquance surtout de droit commun, de masse, qui se traduit sur la voie publique. Mais là aussi, ce n’est pas le type de délinquance dont on est chargé, ça peut arriver de manière ponctuelle sur des faits très graves qui les impliquent, du style homicide ou infraction de ce type-là, mais généralement, ce n’est pas mon service qui s’occupe de ce type de délinquance ».
 

Une cellule psychologique au CHU de Bordeaux

Sachez qu'il existe une cellule psychologique au CHU de Bordeaux depuis plusieurs années. Elle est destinée aux victimes de braquages ou cambriolages que ce soit à leur domicile ou leur commerce. N'hésitez pas à rentrer en contact avec cette cellule.

*le prénom a été changé

Voyez notre reportage :
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information