Commémoration de l'abolition de l'esclavage : une statue de Modeste Testas érigée sur les quais de Bordeaux

Une statue de Modeste Testas, une adolescente originaire d'Afrique de l'Est et mise en esclavage par deux frères bordelais au 18e siècle, a été érigée sur les quais de Bordeaux ce vendredi.
 

C'est un nouveau visage sur les quais de Bordeaux. Devant la Bourse maritime, face à la Garonne, se trouve désormais la statue de Modeste Testas.

Le monument est inauguré ce vendredi 10 mai, en cette Journée nationale des mémoires de la traite, de l'esclavage et de son abolition, par le maire de Bordeaux Nicolas Florian.


La statue dévoilée pour la première dans ce reportage de Guillaume Decaix et Philippe Turpaud  ►
 

 

Capturée et déportée  

Modeste Testas, de son nom original Al Pouessi, est une jeune fille originaire de la corne de l'Afrique. Capturée à l'adolescence, puis achetée par les frères bordelais Pierre et François Testas à la fin du 18e siècle, elle est ensuite déportée à Saint Domingue, (ancienne Haïti) pour servir dans la plantation de ses maîtres. François Testas en fait également sa "compagne", sou plutôt son esclave sexuelle. Plusieurs enfants naîtront de ces viols. 


Six générations plus tard, son histoire a été exhumée par sa descendante, Lorraine Manuel Steed. Après en avoir entendu parler par sa grand-mère, cette Haïtienne a entrepris des recherches, puis esquissé un croquis de son aïeule. Un dessin qui sera ensuite repris par le sculpteur Caymitte Woodly, dit Filipo, également haïtien, qui s'en servira comme base de travail.

Le jeune homme, qui vient de terminer un stage à la fonderie des Cyclopes de Mérignac, a sculpté le portrait grandeur nature (1,70m), enrobé de bronze, représentant l'esclave.

 

 

Bordeaux, port négrier


Près de 500 expéditions négrières ont été recensées entre la fin du 17e siècle et le début du 19e siècle au départ de Bordeaux. Environ 150 000 Africains, hommes, femmes et enfants, ont été déportés pour être mis en esclavage dans les anciennes colonies d'Amérique. De même, les ventes de café, de sucre ou de rhum, grâce auxquelles la ville s'est enrichie, étaient produits par les esclaves.
 

Un passé longtemps tabou


Longtemps, la ville de Bordeaux a été accusée de nier, ou du moins de camoufler son passé esclavagiste. Lorsque Hugues Martin, maire de la ville en 2006, inaugure un monument commémorant cette histoire quai des Chartrons, il s'agit d'une minuscule plaque, fixée au ras du sol et invisible pour l'œil non aguerri de nombreux touristes et habitants.

Depuis, un square Toussaint Louverture,  qui s'opposa au rétablissement de l'esclavage par Napoléon a été inauguré rive droite. Et en 2018, une commission créée par Alain Juppé annonçait 10 propositions pour commémorer l'esclavage, dont la mise en place d'une œuvre mémorielle, qui a pris forme avec la statue de Modeste Testas. 
 

Des noms de rue en suspens

Mais pour certaines associations, comme Mémoires et Partages qui milite activement depuis des années sur ces questions et organise un mois entier de commémoration, le travail n'est pas fini. La question des noms de rues de Bordeaux, dont plusieurs portent encore les noms d'armateurs esclavagistes, reste notamment en suspens.

Parmi les dix propositions de la commission, il était prévu d'apposer six plaques explicatives sous les noms de rue. Mais un an après l'annonce, la déclaration n'a pas toujours été suivie d'effets. 


Ecoutez Karfa Diallo, président de l'associaiton Mémoires et Partages exposer la problématique en septembre 2017

 





 
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