Une rentrée progressive à partir du 11 mai pour les plus petits, 15 élèves par classe, retour sur la base du volontariat des familles. Edouard Philippe a posé le cadre très général du déconfinement scolaire mardi 28 avril. Mais pour les enseignants et les parents, c'est encore trop flou.
Samantha Fitte, du syndicat du primaire SNUipp Gironde, est consternée :
Nous sommes atterrés par le niveau d’information. C'est le plus grand flou. Est-ce que les hypothèses de Jean-Michel Blanquer énoncées devant l’Assemblée Nationales sont toujours valables ?
Nous n'avons pas de protocole sanitaire. On avait demandé une semaine pour se préparer, le Premier ministre n’en parle pas. On ne sait rien pour les personnes vulnérables chez les enseignants, rien sur la garde de nos enfants. Le volontariat laissé aux familles est incohérent par rapport à l’objectif affiché de renouer le contact pédagogique. On le sait, il sera très difficile de faire revenir les "décrocheurs".
Le syndicat National Unitaire des Instituteurs, Professeurs des Écoles et PEGC n'était pas favorable à une reprise des écoles maternelles où les gestes barrière sont très compliqués à faire respecter et Samantha Fitte s'interroge sur l'objectif non avoué du gouvernement.
Quant à la prise en charge des élèves qui feront le choix de venir en classe et ceux qui resteront à la maison, la réponse est ferme : " Il est hors de question de demander une double journée aux enseignants. Le suivi des élèves à distance suppose des heures et des heures de préparation. Alors, on peut faire semblant, envoyer des fiches de travail sans les adapter à chaque enfant, sans les personnaliser. Mais ce n'est pas un enseignement pédagogique" insiste Samantha Fitte.On s’oriente vers une garderie des plus jeunes sans le dire. Qu’on nous demande de participer à la reprise de l'économie en gardant les enfants de ceux qui doivent aller travailler comme on l'a fait pour les personnels soignants, il n'y a pas de problème, mais qu'on le dise.
Sur France Info, Francette Popineau, porte-parole du SNUipp-FSU, s'inquiétait hier d'une rentrée ni prudente ni progressive en primaire :
Sur l'école primaire, on est peu prudent et pas du tout progressif puisqu'effectivement, il est dit que dès le 11 voire le 12, en tout cas, on serait prêt à repartir... s'inquiète Francette Popineau. #11maihttps://t.co/Bo8HzssEpa via @franceinfo
— SNUipp-FSU (@SNUipp_FSU) April 28, 2020
Insatisfaction également pour le Syndicat National des Enseignements de Second degré, le Snes/FSU :
Les grands principes sont donnés. Mais l’application reste très floue. Nous, ce qui nous préoccupe, ce n'est pas le calendrier mais d’abord le protocole sanitaire. Nous attendons de nos autorités des règles nationales. La souplesse qu'a souhaitée Edouard Philippe au niveau local doit permettre d'être mieux-disants.
Jean-Pascal Meral, le secrétaire académique de Bordeaux, relève également une contradiction dans le discours d'Edouard Philippe :
Pas de rassemblements de plus de 10 personnes y compris dans le privé et nous serions dérogatoires et monterions à 15 élèves ? Il y a des salles qui ne pourront pas accueillir autant d'élèves. Il va falloir organiser le flux. Décaler les horaires semble un casse-tête dans le second degré sauf à dire telle matinée est consacrée aux maths, telle matinée à l'histoire-géo...
Sur le port du masque, obligatoire pour les adultes, collégiens et lycéens, Jean-Pascal Meral s'interroge :
Le SNES/Fsu attend le protocole sanitaire qui donnera des "garanties précises" pour se prononcer.On va conseiller aux coiffeurs de porter des visières. Est-ce que pour les enseignants, notamment en maternelle, où les distances de sécurité sont très compliquées, il faut envisager la même protection ? Il ne faut pas non plus que ce soit trop anxiogène pour les enfants.
#11mai #deconfinement @SVenetitay sur @franceinfo Gel, règles de circulation dans les établissements scolaires : Aujourd’hui il n’y a pas de garanties précises. Si nous n’avons pas de garanties sanitaires, nous ne pouvons pas envisager la rentrée. Il ne faut pas de #Deuxièmevague pic.twitter.com/wKn7t9ZIUZ
— SNES-FSU (@SNESFSU) April 29, 2020
Impossible et inacceptable
Dans son communiqué de presse mis en ligne hier, le SE-Unsa ( autre syndicat enseignant ) des Pyrénées-Atlantiques juge la reprise le 11 mai dans les écoles "impossible et inacceptable".
"Le report de la reprise des lycées à début juin en fonction de l’évolution de l’épidémie et une reprise conditionnelle des collèges le 18 mai pour les classes de 6e et 5e" est "une bonne nouvelle" pour le second dégré mais "jette une lumière particulièrement crue sur le sort fait au premier degré" contraint de reprendre pour des motifs économiques.
Le syndicat d'enseignants constate qu'"aucune garantie n’est apportée après les préconisations dictées par les autorités de santé. Le ministre répète qu’il y aura un protocole strict mais celui-ci n’est pas connu".
Pour le SE-Unsa, "il est hors de question que les enseignants des écoles fassent double journée" et s'occupent de "groupes d’élèves en présentiel et d’autres qui poursuivront à distance". Le syndicat estime tout aussi inacceptable "que l’exécutif mette ainsi la pression sur les acteurs locaux, dans l’urgence, et se défausse de sa responsabilité sur les directeurs, les enseignants et les municipalités".
Chez les chefs d'établissements, Philippe Vincent se félicite que le Snpden ait été entendu sur "une rentrée moins précoce, moins rapide et moins globale".
Une reprise moins précoce, moins rapide et moins globale : le message d'alerte du @snpden a été visiblement bien entendu. Le préalable d'un protocole sanitaire sécurisant mais réaliste demeure cependant !
— Philippe.Vincent_SNPDEN (@SGsnpden) April 28, 2020
Mais comme les syndicats d'enseignement, le Syndicat National des Personnels de Direction de l'Education Nationale "attend un protocole sanitaire sécurisant et réaliste.
Dialoguer avec les parents d'élèves
La FCPE Gironde a publié, dès hier mardi, un communiqué de presse. La première fédération de parents d'élèves veut être associée au processus de concertation afin de pouvoir "échanger et dialoguer en matière de modalités d'application de la sécurité sanitaire et de la gestion de la distanciation sociale. "Communiqué de presse FCPE Gironde
Car, pour l'instant, Stéphanie Anfray, présidente de la FCPE Gironde, n'a pas les réponses qu'elle attendait :On a acté une chose, une seule : il fallait que les enfants retournent à l'école parce que les parents reprenaient le travail. On le voit bien dans le calendrier posé : il ne concerne que les plus jeunes. Seules les dates du 11 mai pour les maternelles et primaires et du 18 mai pour les collèges sont enterinées. Mais on n'a rien pour les 3e et les 4e, ni pour les lycéens. On n'a pas acté la suppression de l’oral de Français pour les premières. On maintient l'épreuve au milieu de nulle part. Et puis, en tant que parents, on peut s’interroger : comment va se faire l’orientation des troisièmes, des secondes ? Il va falloir travailler à distance ?
Pas davantage de réponses non plus sur les règles sanitaires
On demandait un cadre sanitaire clair, on n'en a pas. On renvoie les responsabilités sur les collectivités territoriales et sur les parents.
Il y a encore "beaucoup trop d'inconnues", résume Stéphanie Anfray qui invite à réfléchir dès maintenant à la rentrée de septembre.
Comment se dessine cette reprise de l'école ? Franceinfo détaille les mesures dans son articleDéconfinement : limite de 15 élèves par classe, calendrier progressif... Comment vont fonctionner les écoles et les crèches à partir du 11 mai.