Au lendemain de l'allocuation d'Emmanuel Macron, le ministre de l'Education nationale annonce que le retour à l'école ne sera "pas obligatoire le 11 mai". Une manière de rassurer les enseignants et les parents. Un retour jugé prématuré pour beaucoup.
Emmanuel Macron a surpris tout le monde. Les crèches, les écoles, les collèges et les lycées vont rouvrir petit à petit. Dans l'enseignement supérieur, les cours ne reprendront "physiquement pas avant l'été".
Contrairement à la rumeur qui circulait ces derniers jours, les élèves ne retourneront pas en classe en septembre mais à partir du 11 mai, date jusqu’à laquelle le confinement est prolongé.
Le président de la République a voulu mettre en avant les inégalités entre les enfants face à l'école à la maison.
"Trop d'enfants notamment dans les quartiers populaires, dans nos campagnes sont privés d'école sans avoir accès au numérique et ne peuvent être aidés de la même manière par les parents, c'est pourquoi nos enfants doivent pouvoir retrouver le chemin des classes", a expliqué le chef de l'État, alors que son ministre de l’Éducation avait évoqué fin mars 5 % à 8 % d’élèves «perdus» par les professeurs.
Un retour prématuré pour les enseignants
« C’est tout sauf sérieux de rouvrir les écoles le 11 mai », réagit le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire. Et sa représentante locale de préciser : "reprendre dans un mois, comme si de rien n'était, c'est incompréhensible et dangereux. Les enfants seront ensemble à l'école, qui est un haut lieu de contamination avec des gestes barrière et des distances impossibles à respecter."
Enseignant-es, à partir du 11 mai sacrifié-es sur l'autel de l'économie pic.twitter.com/HKvF74x275
— Marie Hélène Plard (@MarieHl33125033) April 14, 2020
Avant d'ajouter : "se pose aussi la question des temps collectifs comme la cantine, de la promiscuité également dans les salles de classe avec des bureaux côte à côte."
"Pourra-t-on fournir, chaque jour, des masques à 10 millions d’élèves et 1 million de personnels ? " se demande la communauté éducative. Et les collectivités seront-elles en mesure de procéder à la désinfection des locaux ?
Emmanuel Macron laisse à son gouvernement le soin de proposer, d’ici quinze jours, la déclinaison de cette réouverture des établissements scolaires. Il devra « ménager des règles particulières, organiser différemment le temps et l’espace, bien protéger nos enseignants et nos enfants avec le matériel nécessaire », a-t-il indiqué.
Pour certains, ce retour en classe des élèves est une façon de faciliter une relance plus rapide de l’économie en permettant aux parents de retourner au travail. C'est le sentiment de Samantha Fitte qui est Co-secrétaire du syndicat d'enseignants Snuipp FSU en Gironde.
Les professeurs et les élèves sont sacrifiés sur l'autel de l'économie : On rouvre les écoles mais pas les cinémas !
Samantha Fitte - Snuipp FSU Gironde -
Un retour : oui mais comment et dans quelles conditions ?
Du côté des associations de parents d'élèves, la FCPE, qui salue pourtant ce retour à la normale, manifeste aussi son inquiétude. Elle affirme que "sans plan d'urgence pour l'École, la reprise est impossible sans risque de nouvelle vague de contamination.
Comment cela va-t-il se passer ? Stéphanie Anfray s'interroge sur la sécurité sanitaire et le maintien des gestes barrière : y aura-t-il des gels hydroalcooliques, du savon, des sèche-mains ?
La distanciation sociale sera-t-elle respectée notamment dans les transports en commun ?
Nos enfants prennent des bus scolaires en zone rurale, c'est bondé ! ajoute la présidente de l'association en Gironde.
Permettre aux élèves de renouer avec leurs camarades et leur quotidien
Nathalie Blateau Gauzere est principal au collège Henri de Navarre à Coutras en Gironde. Elle aussi a des interrogations, mais elle accueille la nouvelle avec beaucoup d'espoir :
On est plutôt content d'avoir une date de retour, c 'est important pour nous, pour préparer la prochaine rentrée scolaire, pour nos élèves qui vont pouvoir se projeter.
Le chef d’établissement attend les directives et le protocole à suivre : " Moi je suis dans un établissement où il y a 900 élèves et 130 personnels. Cela fait plus de 1000 personnes au quotidien sur le site. On reçoit énormément de monde dans la journée. C’est plein de vie et c 'est tant mieux, mais là il va falloir penser à une autre organisation."
Un allègement des élèves au quotidien lui paraît être indispensable : "On ne peut imaginer recevoir 30 élèves dans les classes, avec en plus les déplacements dans les couloirs, la cohue au self, ce serait très compliqué d'accueillir tout le monde en même temps !"
Qu'ils soient favorables ou opposés, tous attendent des précisions et veulent savoir ce que signifie concrètement un retour progressif.
“L’école ne sera pas obligatoire le 11 mai, le retour sera progressif”
Ce mardi matin, moins de 24 heures après l'annonce présidentielle, Jean-Michel Blanquer le ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse a précisé les modalités sur France 2 et a annoncé que le retour à l'école ne sera "pas obligatoire le 11 mai"
La réouverture ne se fera « pas du jour au lendemain », et la priorité pourra être donnée « aux publics les plus fragiles », a déclaré mardi le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer.
Les élèves les plus en difficulté pourraient reprendre en premier. « Il faut sauver les élèves qui pourraient partir à la dérive du fait du confinement », a expliqué le ministre.
« On va élaborer toute une méthodologie » de reprise « qui passe forcément par de très grands aménagements. En mai juin, ce ne sera pas du tout comme avant, ce sera forcément différent», a-t-il prévenu.
La reprise progressive « implique forcément qu'on ne va pas avoir les mêmes âges qui rentrent au même moment », et " il ne pourra pas y avoir de grands groupes " dans les classes, a aussi affirmé M. Blanquer.
«Il est possible qu'il y ait une charge horaire moins importante» pour les élèves a- t-il ajouté.
Sur la question des masques mis à disposition de tous les élèves et professeurs, Jean-Michel Blanquer a assuré que c'est « fort possible mais ça fait partie des choses qu'on va décider au cours des deux prochaines semaines».
Le ministre de l'Éducation nationale doit rencontrer à partir de ce mardi les organisations syndicales.