Près de 80 théâtres privés français ont répondu à l'appel de Xavier Viton, propriétaire de trois théâtres du centre-ville de Bordeaux, vite rejoint par d'autres de ses confrères liés par "une espèce de fraternité dans la galère". Ils ont été assurés qu'un fond de soutien allait être mis en place.
Pour Xavier Viton, c'est une première:
Nous n'avons jamais demandé d'aides...
On n'a pas l'habitude de faire ce type de démarche!
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cette nouvelle association créée en 15 jours, ralliant peu à peu les théâtres en régions, a été efficace en faisant connaître leurs difficultés dans un communiqué.
D' abord en fédérant ces théâtres, par définition indépendants, qui devraient être bientôt une centaine, selon Xavier Viton; et ensuite en obtenant deux visioconférences avec le ministère.
- La première rencontre (virtuelle via une visio) a pu avoir lieu entre une soixantaine de responsables de théâtres et le conseiller "spectacle vivant", Stephan Kutniak, en charge de la création artistique et du soutien aux artistes auprès du ministre de la culture, Franck Riester. L'occasion de porter cette voix de ces acteurs locaux de la culture en régions, parfois mal connue du ministère.
- La deuxième a permis de rassembler face au conseiller sept personnes de l'association pour orienter le travail sur ce que pourrait être l'aide nationale et valider les conditions.
5 millions d'euros
Il y a eu une vraie écoute, sincère.
Pour l'instant, et pour faire face à dix semaines de confinement, dans un contexte difficile de ces théâtres qui, même rouverts, mettront du temps à retrouver leur public, un fond de soutien de cinq millions devrait être débloqué, financés par plusieurs organismes, et permettant le paiement de 80% des charges fixes.
Un vrai soulagement pour des directeurs de théâtre, comme X.Viton, (le trésorier de cette nouvelle association) qui est à l'initiative de ce mouvement. Une association qui a aujourd'hui d'autres voix, noamment celles de Loïc Bonnet,(le président) du Théâtre-à-l'Ouest de Rouen et de Christophe Graffeuil (secrétaire) de la Royal Factory à Versailles.
TPR et communiqué
Le directeur des théâtres Le Victoire, le Trianon et du Molière raconte que le début du confinement leur posait de nombreuses interrogations sur le devenir de leur activité, des salariés et comédiens.Les dix premiers jours du confinement n'ont été consacrés qu'à ça: mettre nos salariés à l'abri...
On avait une cinquantaine de contrats de tout type (comédiens, personnels, administratif, extras, ouvreuses)... Pour des jeunes, des étudiants, on est souvent leur seule source de revenus...
Mais il s'est rendu compte que tout le monde n'était pas logé à la même enseigne! Quand, au détour d'un article, il apprend que les théâtres privés parisiens bénéficient, eux, dans ce contexte atypique, d'une solidarité particulière via l'ASTP Association pour le Soutien du Théâtre Privé, rassemblant une quarantaine de petits théâtres...On a aussi eu la chance du chômage partiel, pour certains salariés...
Il a alors contacté quelques théâtres qui en ont rallié d'autres etc...et diffusé un communiqué (extrait):
Les Théâtres Privés en Régions : les grands oubliés de la crise du COVID19 !
L’association des Théâtres Privés en Régions (TPR) tire aujourd’hui la sonnette d’alarme afin d’attirer l’attention du gouvernement sur la situation catastrophique d’une centaine d’établissements privés sur tout le territoire !
Nos théâtres, qui ne reçoivent aucune subvention, sont aujourd’hui fermés sans perspective d’avenir et sans aide directe de l’Etat !
L'association TPR y décrit que cette centaine de théâtres, leurs 25 000 levées de rideau par an pour 1300 spectacles, par 15 000 artistes et près de 3 millions de spectateurs. :
- ce sont des lieux de culture accueillant entre 80 et 400 places
- 50 millions d’euros de chiffre d’affaire annuel au total
- générant quelques 500 emplois directs (CDI)
- des milliers d’emplois indirects (auteurs, comédiens, intermittents, saisonniers…)
- mais aussi des professeurs
C'est pourquoi l'association demandait dans ce communiqué:A la sortie de cette période compliquée et angoissante, nos lieux auront un rôle extrêmement important à jouer en termes de cohésion sociale.
Le public aura besoin de rire, de se changer les idées ! Sans aide immédiate et massive, nous allons disparaître !
- Une aide directe pour les gérants et leurs lieux
- Une annulation de la totalité des charges sur l’année 2020.
- Une aide de la part de l’ASTP et un remboursement immédiat de nos versements à cette association qui est censée nous soutenir et qui dans les faits ne nous donne rien !
Sûr de sa démarche et au-delà du réconfort pour chaque gestionnaire de ne plus se sentir isolé, il a été ravi aussi de découvrir "une vraie énergie collective".
Sur le site internet de cette toute nouvelle Association des Théâtres Privés en Régions, on décrit cette démarche:
- fédérer et d’unir les employeurs du secteur privé des théâtres et café-théâtres
- défendre nos intérêts communs et mutualiser nos actions vis à vis des pouvoirs publics
- avec l’objectif d’une visibilité et d’une reconnaissance vis-à-vis des institutions culturelles, socio-culturelles et politiques.
Et après ?
L'association veut souligner le fait qu'elle est apolitique et n'appartient à aucun syndicat:Avec cette mobilisation intense et rapide, qui a su fédérer les volontés professionnelles, institutionnelles, beaucoup de choses se sont passées en peu de temps.Une association corporatiste mais où chacun est libre!
Et au-delà de débloquer éventuellement les situations financières, cette connexion avec les instances publiques nationales, cette mise en contact "forcée" a permis de créer de nouvelles synergies créatives:
Par exemple, on va collaborer pour permettre avec l'association de permettre un tarif jeune. La différence (entre tarif jeune et plein) pourra être prise en charge par l'association.
En Nouvelle-Aquitaine, essentiellement en Gironde, une douzaine de théâtres font partie de l'association des Théâtres Privés en Régions:
- Le Contrepoint à Agen (50 places)
- Le petit bijouBiarritz (133 places)
- Théâtre des Beaux-arts (90 places) à Bordeaux
- La BD Comédie (159 places) à Angoulême (16)
- Comédie La Rochelle (160 places) (17)
- Café-théâtre des Chartrons (130 places) à Bordeaux
- Théâtre Molière (160 places) à Bordeaux
- Théâtre Trianon (264 places) à Bordeaux
- Théâtre Victoire (154 places) à Bordeaux
- Café-Théâtre de Carcans (146 places) en Gironde
- ATN (74 places) à Bègles (33)
- L'Improvidence (50 places) à Bordeaux