La réalisatrice marseillaise Sabrina Nouchi ne décolère pas au lendemain de l'avant-première de son film, "ça arrive", ce jeudi 21 novembre. Un film 100% marseillais et pourtant programmé dans aucun cinéma de la ville. Un film d'actualité qui traite des violences sexuelles dans un commissariat de Marseille. Sortie prévue le 27 novembre prochain.
C'est avec des acteurs marseillais, dans des décors marseillais, tourné à Marseille, que Sabrina Nouchi a fait ce film "ça arrive". À la sortie de la projection en avant-première, ce mercredi 20 novembre, au cinéma l'Artplexe, les critiques sont unanimes, le film ne laisse pas indifférent, en témoigne le débat passionnant qui a suivi. Pourtant, malgré sa tonalité d'actualité, et sa fibre 100% marseillaise, le film est boudé par les cinémas de la ville. C'est le coup de gueule de Sabrina Nouchi, la réalisatrice.
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"Une honte"
Réalisatrice, actrice, productrice et à la tête de deux écoles d'acteurs, une à paris et une à Marseille,"la fabrique des acteurs" Sabrina Nouchi la Marseillaise est sans voix, ou plutôt en donne pour dénoncer la fébrilité des cinémas et de Marseille qui, selon elle, ne jouent pas le jeu.
"Le film est 100 % marseillais, il a été tourné à Marseille. Je suis de Marseille, mes acteurs aussi, même s'il y a quelques parisiens de l'école de la fabrique de l'acteur de Paris. Il y a beaucoup de Marseillais qu'on a mis en lumière. Marseille se plaint tout le temps qu'on ne fait pas tourner les jeunes marseillais, je l'ai fait. Marseille se plaint tout le temps que les Parisiens arrivent et que tout est pour eux, c'est exactement ce que le système marseillais fait, la ville ne nous donne aucune visibilité !"
Et ce n'est pas d'argent dont parle Sabrina Nouchi , "je ne leur demande pas d'argent. Je ne leur ai pas demandé d'argent pour le faire. Je ne leur ai pas demandé d'argent pour m'aider. Je leur demande juste une visibilité, quelque chose, des affiches par exemple. Je ne sais pas, on n'a pas de salle à Marseille. On n'en a pas une seule, c'est la honte", lance agacée la réalisatrice en pointant le manque de courage des cinémas :"Ils préfèrent vendre du pop-corn que de soutenir une cause pareille, c'est la ville de la honte pour moi aujourd'hui, Marseille".
Les violences sexuelles du quotidien
Et la cause dont parle la réalisatrice, ce sont les violences sexuelles, envers les enfants, les adultes, hommes ou femmes. En plein procès des viols de Mazan, où Gisèle Pelicot symbolise toutes les violences sexuelles faites aux femmes, et donc en plein dans l'actualité, aucun cinéma de Marseille n'a osé programmer ce film. Un film qui propose de plonger au cœur d'un commissariat de Marseille, où trois enquêteurs de la brigade des mœurs recueillent les plaintes des victimes de viols et d'agressions sexuelles. Un film puissant, cru et sans artifice, qui montre la détresse des victimes, le déni ou le mépris des agresseurs. Le film, tourné en sept jours, apporte une dynamique et une énergie documentaire tout en brossant les contours les plus noirs de la société. "Je voulais parler de ça pour ajouter de la nuance parce que quand une cause est défendue par des gens trop extrémistes, elle s'annule pour moi. Et c'est important de rajouter de la nuance et de rajouter aussi une notion qui est très importante, c'est que les violences sexuelles n'ont pas de genre, ça arrive à tout le monde, ça arrive aux enfants, ça arrive aux hommes adultes ou femmes adultes, ça arrive", détaille Sabrina Nouchi.
La vérité d'une victime est-elle la vérité des faits ? Le besoin de reconnaissance et de réparation est-il toujours comblé à juste niveau par la réponse judiciaire ? Autant de questions posées lors du débat qui a suivi la projection ce mercredi 20 novembre. Une projection qui a laissé sans voix certains spectateurs, d'autres, sont ressortis bouleversés, "film percutant", " énorme claque", "sublime" pouvait-on entendre à la sortie du cinéma. Sur les réseaux sociaux, les critiques de ceux qui l'ont vu encensent le film et le scénario de Sabrina Nouchi et Catherine Sorolla.
Pour l'avocat marseillais, Eric Lanzarone, présent à la projection, " un film puissant, fait de confrontations, de mensonges, de répliques sordides… Une interprétation remarquable, des acteurs qui font du film, un reportage du quotidien du viol dans ce commissariat. Que dire de l'indifférence des élus de la région ? de la ville de Marseille ? une incongruité certainement. Tous les lycées devraient programmer ce film qui vaut bien tous les discours politiques, au demeurant absents déjà au procès Pelicot", détaille-t-il sur les réseaux sociaux, parmi d'autres commentaires tous dithyrambiques sur le film.
Une stratégie transmédia pour la promotion du film
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Sur les réseaux sociaux (voir post Instagram ci-dessus), la production du film a realisé une série unitaire d'une dizaine de portraits, où l'on découvre certains personnages du film. Les acteurs, continuent de jouer leur rôle, mais en approfondissant la biographie du personnage. Ce qui, permet au spectateur de rentrer dans l'univers de chaque personnage du film, sans bande-annonce ni extraits. Cela fait partie du teasing du film. Avec cette série numérique transmedia ,on rentre plus intimement dans la vie des personnages.