Jean Castex a expliqué que les conditions pour leur réouverture ne sont pas réunies. "Il faut éviter les concentrations de population et rester chez soi le plus possible" a t-il dit. L'objectif est d'éviter un troisième confinement. Un coup de massue pour les professionnels concernés.
"C'est la pire chose que je pouvais entendre" nous confie, effaré, Xavier Viton, comédien, metteur en scène et directeur de trois théâtres privés à Bordeaux.
Théâtres : le moral à zéro
Pour lui, comme pour tous les professionnels du monde du théâtre, l'annonce est violente.
Cela fait trois semaines que ses équipes ont repris les répétitions, que la billeterie a été remise en route. "On a préparé les salles, on est sur la ligne de départ et là, quatre jours avant, tout est de nouveau arrêté. Moralement, c'est très très dur".
Une réouverture au 7 janvier ? "Je ne sais pas, je suis tellement décontenancé" avoue t-il. Il faut d'abord rembourser les spectateurs qui avaient réservé pour l'un des 4 spectacles programmés dans ses théâtres. Puis les relancer pour janvier. Il n'y croit pas vraiment. "Il nous faut trois semaines pour nous préparer, ça voudrait dire qu'on doit commencer maintenant alors qu'on est complètement abattu ? Je suis pourtant de nature optimiste mais là c'est une décision incompréhensible, c'est la pire pour notre métier".
Des pertes de 50 à 70%
Xavier Viton est trésorier de l'association qui regroupe les théâtres privés en région. "J'ai fait le point avec ma comptable, nos pertes s'élèvent à 50% voire 60% pour cette année. Pour mes collègues, c'est pareil. Certains accusent même un recul de 70%, notamment les cafés-théâtres qui n'ont pas pu faire de restauration".
Les salles de spectacles n'avaient pas pu ouvrir immédiatement après le premier confinement. Elles ont dû attendre le mois de juillet. Beaucoup n'avaient alors aucune affiche à proposer. Elles ont préféré se tenir prêtes pour la rentrée. Est ensuite venu le couvre-feu pour celles situées en zone rouge. Un premier coup d'arrêt. En novembre, le reconfinement. Et maintenant sa prolongation.
Xavier Viton estime la situation d'autant plus injuste que, selon lui, "qu'on soit ouvert ou fermé ne change pas le nombre de contaminés ou d'hospitalisés. Rester assis face à une scène, masqué, distancié, les mains désinfectées, dans une salle régulièrement aérée, tout cela fait que nos salles sont des lieux sécurisés".
Lui avait prévu une jauge de 62% en moyenne pour laisser une place de libre entre chaque groupe de personnes. Ce sera finalement 0 spectacle et 0 spectateurs. Jusqu'à quand ?
Jean Castex a expliqué qu'il fallait éviter d'accroître les flux et les brassages du public pour éviter un rebond et un troisième confinement. "Je sais que le secteur culturel s'était préparé. Prendre cette décision a été douloureux. Malheureusement si nous nous laissons tenter par l'ouverture des salles la situation sanitaire pourrait être pire en janvier" a t-il déclaré, précisant que les dispositifs d'accompagnement économique étaient maintenus.
Un sentiment d'inéquité et une vraie réflexion nécessaire
François Aymé, à la tête du cinéma Jean Eustache à Pessac et président de l'association française des cinémas d'art et essai, estime qu'il faut maintenant mener une vraie réflexion pour éviter une fermeture qui pourrait durer tout l'hiver.
"Jean Castex a expliqué que plus il fait froid, plus le risque de contamination est grand et là on rentre dans un hiver qui va durer trois mois. Il faut étudier une réelle possibilité d'ouverture sans ordre et contre ordre en permanence".
Ce féru d'art et de cinéma accuse le coup et s'interroge sur le traitement de la culture en France. "Il y a un vrai sentiment d'inéquité. Jean Castex dit qu'il faut limiter les flux, mais les flux ils existent aussi dans les galeries marchandes et dans les transports. Dans les salles de spectacle et de cinéma, les gens ont un masque et ne déambulent pas. Il y a une forme d'incohérence".
Il remarque que Bruno Le Maire a réussit à obtenir pas mal de concessions pour les commerces avec le back friday notamment, en revanche le gouvernement ne fait aucun geste pour les arts.
Malgré tout, "on va essayer d'être le plus constructif possible" assure t-il. C'est une question de survie.