De l’urine pour fabriquer de l’engrais : un produit plus local et plus écologique

L’entreprise Toopi Organics se sert de l’urine comme un milieu de culture où faire pousser des bactéries vendues ensuite vingt fois moins cher que les engrais actuellement sur le marché. Un concept reproductible partout dans le monde.

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Un buisness florissant reliant la ville à la campagne

" C’est très simple " , annonce Michaël Roes, « nous, on veut aller sur le marché des commodités, c’est-à-dire les gros volumes pas chers ". " Donc, on produit des produits qui sont très efficaces et peu chers ".


A savoir des bactéries s’étant développées dans de l’urine. L’ambition du chef d’entreprise transparait. Les objectifs de Toopi sont aussi rapides qu’étendus géographiquement. D’ici cinq ans, on devrait savoir si ce concept qui parait être tout sauf une niche est viable. L’entreprise n’a été créée qu’il y a trois ans. Et si le pari est gagné, Toopi comptera en 2027 non plus 20, mais 400 salariés.  

Collégiens, rugbymen, automobilistes… tout le monde peut participer !

En France, on pourrait potentiellement collecter 30 milliards de litres d’urine par an. Impossible pour la petite entreprise de collecter cette urine à Paris, chez des particuliers, dans des immeubles Haussmanniens.
En revanche, récupérer le fruit de la pause pipi des écoliers ou automobilistes des environs, ça c’est possible et plus écologique car local. L’urine des collégiens de La Réole est ainsi collectée, tout comme celle du club de rugby local ou d’une aire de repos sur l’autoroute.

Le système de récupération est aussi simple qu’invisible pour celui qui soulage sa vessie. " Il n’y a pas d’eau donc ce sont des urinoirs secs ", explique Benjamin Morisset. " On ajoute simplement un stabilisant en fond de cuve et l’urine est récupérée par un réseau de canalisation parallèle. Ensuite, un réseau de collecte est mis en place ".

Donc, non seulement on économise de l’eau puisqu’on ne tire pas la chasse d’eau mais en plus on donne une deuxième vie à l’urine. A titre d’exemple, une aire de repos sur l’autoroute permet d’en récolter 50 000 litres par an.  

L’urine : un excellent milieu de culture pour les bactéries

" Les concurrents qu’on a sur le marché du microbien, ils utilisent des milieux de cultures industriels très standards qui valent beaucoup plus cher ", explique Michaël Roes.
"Ils ont des unités de production qui sont centralisés. C’est-à-dire qu’ils produisent des gros volumes et il faut ensuite tout un réseau de logistique pour aller l’amener jusqu’à l’agriculteur ".
Et cela a un coût. Toopi Organics fait baisser les prix en collectant l’urine et redistribuant l’engrais dans un périmètre de 150 kilomètres maximum.  Compétitive, l’urine l’est aussi car elle ne coûte rien alors qu’elle est un milieu de culture excellent pour les bactéries servant d’engrais.

Dans le laboratoire situé à Loupiac de la Réole, dans le sud de la Gironde, Hany Abdo prélève un petit échantillon d’urine au-dessus d’une flamme pour le chauffer. «On met les bactéries dedans. Elles aiment ce milieu, du coup, elles peuvent se développer et se concentrer. Et suite à cela, on a un produit qui est concentré en bactéries et qui présente un intérêt pour les plantes et pour les agriculteurs ».

Juste à côté, un salarié fait du comptage de bactéries. « Cela pousse bien », sourit-il, compteuse à la main. Tout sera inscrit dans un registre pour savoir comment prolifèrent les bactéries et à quel rythme. « Pour tout vous dire, je viens de débuter au laboratoire il y a pas si longtemps que cela », poursuit-il. « Donc, je suis encore en formation à l’heure actuelle. C’est très intéressant. Je viens de la collecte à la base et j’ai bifurqué sur le laboratoire ».

Actuellement Toopi compte 20 salariés, mais peut-être plus pour très longtemps vu les objectifs que s’est fixés l’entreprise. En l’occurrence, 400 salariés en 2027. C’est-à-dire demain.

20 nouveaux sites d’ici 5 ans

« A partir du moment où on a un produit qui est efficace et peu cher, on n’a absolument pas de mal à en vendre », gage Michel Roes. « C’est même ce qui est demandé par les agriculteurs. Ce sont des gens qui sont extrêmement pragmatiques. Ils ont besoin de produits qui fonctionnent dans leurs champs et qui ne sont pas plus chers, voire moins chers, que ce qu’ils utilisent actuellement ».

Grâce à l’urine, Toopi dit proposer un engrais à base de bactéries " vingt fois moins cher que ce qu’il y a actuellement sur le marché pour une efficacité identique ".

L’entreprise compte créer d’ici cinq ans 20 autres unités de transformation, une par métropole. Chaque unité sera placée à l’interface entre la ville où il y a des gros volumes d’urine, et la campagne où il y a besoin de fertilisants.

Cela représente plusieurs millions de litres, et plusieurs dizaines de millions de chiffre d’affaires.

Michaël Roes

France 3 Aquitaine

Voilà pour les ambitions françaises. Car au-delà de l’hexagone, l’entreprise compte bien s’implanter en Europe et dans le monde.
On a l’intention de se déployer sur plusieurs pays " confirme Michaël Roes. 

" Nous avons un modèle pertinent pour les pays industrialisés mais imaginez pour l’Afrique où il y a très peu de toilettes et pas de système d’assainissement et pas d’engrais à disposition. Un agriculteur africain achète l’engrais plus cher qu’un agriculteur européen. La plupart prennent des crédits en début de saison pour acheter de l’engrais ce qui fait que, si la récolte n’est pas bonne, il va se mettre vraiment en danger. Là, c’est redonner beaucoup de résilience au continent qu’est l’Afrique. Car notre objectif est d’utiliser massivement l’urine pour se passer des minéraux et donc de l’utilisation de pétrole, de gaz, et de ressources minières pour l’agriculture ".

Une levée de fonds est prévue en mars prochain pour que l’entreprise ait les moyens de ses objectifs.

Elle espère attirer des investisseurs institutionnels « visionnaires » dixit Michaël Roes capables de se positionner sur du long terme.

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