Le chef triplement étoilé était considéré comme l'un des plus talentueux du XXe siècle. Sa disparition, ce lundi 19 août, a suscité beaucoup d'émotion dans la région Nouvelle-Aquitaine, et plus généralement dans le milieu de la gastronomie française.
L'émotion est vive. Pour beaucoup, le parcours de Michel Guérard laisse une trace indélébile sur la culture culinaire française. Le chef, triplement étoilé au guide Michelin depuis 1977, est mort à l'âge de 91 ans, dans la nuit du dimanche 18 au lundi 19 août, à son domicile. Sa disparition, "celle d'un monument de la gastronomie", suscite des réactions chez des chefs renommés, particulièrement dans la région Nouvelle-Aquitaine où il était installé.
"Une partie de nous"
Jérôme Schilling a fait sa connaissance il y a sept ans. "Quand je suis arrivé dans la région, il est venu me voir au bout de deux mois d'ouverture de mon restaurant", se souvient-il. Le chef, à la tête de l'établissement Lalique au Château Lafaurie-Peyraguey, près de Sauternes, n'oublie pas ce trac incontrôlable ressenti lors de leur rencontre. Puis, une libération. "Il m'a fait plein d'éloges, me disait que j'avais une belle cuisine, c'était très réconfortant." À chacune de ses deux étoiles, Jérôme Schilling reçoit les félicitations de celui qu'il admire."C'est quelqu'un de très bienveillant, plein d'humilité, il donnait beaucoup de lui", insiste-t-il.
C'est comme si on perdait quelqu'un qui nous a donné envie de faire de la cuisine, c'est très étrange.
Jérôme SchillingChef du restaurant Lalique au Château Lafaurie-Peyraguey, près de Sauternes
Son décès, "c'est un peu comme si on perdait une partie de nous", lâche-t-il. Michel Guérard était considéré comme un précurseur et un avant-gardiste dans la cuisine. "Ce soir, avec les équipes, on fera une minute de silence pour ramener une flamme à tout ce qu'il a apporté. Il faudra respecter toujours ce qu'il a fait et essayer de faire au moins aussi bien. C'est un pilier de la cuisine, ça fait partie de nos bases", ajoute Jérôme Schilling.
Le "dernier de sa génération"
À l'image de Paul Bocuse ou d'Alain Chapel, Michel Guérard a inspiré toute une génération. "Quand on est cuisinier, on prend toujours exemple sur ceux qui ont toujours été là et qui ont fait leur preuve", glisse Jérôme Schilling.
À Bordeaux, Alexandre Baumard salue "un papa de la gastronomie". "En 2016, Monsieur Guérard était venu me voir pour me féliciter et me dire que l'étoile allait arriver vite, c'est des mots qui m'ont touché, qui m'ont marqué", se remémore le chef du restaurant gastronomique Amicis, dans le quartier des Grands Hommes. "C'est grâce à eux que la gastronomie française est aussi puissante", note-t-il.
Il fait partie des personnes qui ont marqué la gastronomie française, la formation et la transmission. Ce sont des maisons mères. Ça fait une grosse perte.
Alexandre BaumardChef du restaurant gastronomique Amicis à Bordeaux
Les réactions sont aussi politiques. Pierre Hurmic, maire de Bordeaux, garde en mémoire "de sa visite à la mairie de Bordeaux le souvenir d’un artiste simple et joyeux, créatif et exigeant".
Le chef triplement étoilé Michel Guérard nous a quittés. Promoteur d’une cuisine légère et gourmande, saine et locale, il a formé une génération de grands chefs.
— Pierre HURMIC (@PierreHurmic) August 19, 2024
Je garderai de sa visite à la mairie de Bordeaux le souvenir d’un artiste simple et joyeux, créatif et exigeant.
© AFP pic.twitter.com/J2iDjjXULQ
Dans les Landes, Geneviève Darieussecq, députée et ancienne maire de Mont-de-Marsan, loue "un homme simple, malicieux, raffiné, passionné". "Michel Guérard était un créateur d’émotions et un chef de génie. Il aura été un magnifique ambassadeur des Landes", écrit-elle.
Quelques années avant sa mort, Michel Guérard se confiait ainsi devant la caméra de France 3 Aquitaine : "Nous faisons partie, nous autres cuisiniers, de ces saltimbanques qui nous réjouissons d'être toujours sur scène." Une chose est sûre, même en quittant la scène, les mots de Michel Guérard résonneront toujours derrière les fourneaux.