"Des gestes totalement inappropriés" : accusé de viols par ses patientes, un ancien radiologue jugé en appel à Angoulême

Ancien radiologue à Langon en Gironde, Bassam El-Absi comparaîtra libre, ce vendredi 29 novembre, devant la cour d'assises de la Charente. Accusé de viols et d'agressions sexuelles par huit femmes dont la fille de sa compagne, il avait été condamné en première instance à 17 ans de prison.

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Condamné à 17 ans de réclusion en première instance, Bassam El-Absi, n'aura effectué que 6 mois et 28 jours en prison. À 71 ans, il comparaîtra libre, ce vendredi 29 novembre, devant la cour d'assises de la Charente. Cet ancien radiologue, installé à Langon en Gironde, devra répondre des accusations de viols et d'agressions sexuelles. Des faits qui auraient été commis entre 2012 et 2019 sur sept patientes et une salariée, mais aussi sur la fille de sa compagne, mineure à l'époque. Avec ce nouveau procès en appel, la présomption d'innocence s'applique également.

Sept femmes se sont portées partie civile, l'accusant d'agressions sexuelles durant la consultation médicale du radiologue. "Et de viols !", insistait Me Sylvie Reulet, l'avocate d'une partie civile, le 20 février 2023, lors du premier procès. "C’est-à-dire l'introduction de doigt soit dans le vagin, soit dans l'anus"... Des "gestes totalement inappropriés, absolument pas nécessaires dans le cadre des examens qu'il avait à effectuer !"

Des gestes "mal interprétés" ?

De son côté, Bassam El Absi nie catégoriquement les faits qui lui sont reprochés. Il dément avoir profité de sa position pour commettre des attouchements sur ses patientes.

La défense préfère s'appuyer sur l'expérience du praticien. "Il a fait les gestes qui lui ont été demandés. Je rappelle qu'il en a fait plus d'un million, avec 300 000 échos endo-vaginales", avait précisé Pierre Sirgue, l'avocat de Bassam El Absi lors de son procès en première instance. "Seules sept patientes ont, soit mal interprété, soit volontairement voulu l'accuser pour d'autres raisons..."

À la barre en première instance, le radiologue retraité était apparu parfois désinvolte. Il se présentait seul contre toutes, invoquant un complot des plaignantes.

"Je sais que ce n'est pas normal, c'est tout"

Peggy Ambeau est l’une des huit victimes présumées du docteur Bassam El Absi, ancien radiologue à Langon en Gironde, accusé de viols et d’agressions sexuelles. À l’occasion du premier procès, elle espérait être enfin écoutée, dix ans après les faits, alors que l'ancien médecin nie toujours les faits qui lui sont reprochés.

Elle avait notamment déploré l'attitude de l'accusé à la barre. " Ses propos, sa tenue, c'est insultant", s'était-elle émue en ce début d'année 2024.

Il se met sur son téléphone quand on parle. Ca dépasse l'entendement. C'est un pervers déguisé en médecin.

Peggy Ambeau

Partie civile

Pour elle, ce jour-là, il était très important de témoigner et de ne pas être prise pour une menteuse. Elle accuse l'ancien médecin de viol, lors d’une consultation médicale en 2013.

"J’y vais à la base pour tout ce qu’il y a de plus commun, parce que j’ai une douleur abdominale ", avait-t-elle témoigné auprès des équipes de France 3 Aquitaine. Après avoir réalisé une échographie pelvienne traditionnelle, le médecin "finit par une échographie endo-vaginale qui n’avait pas lieu d’être. Il dépasse l’entendement en ayant des gestes sexuels, en introduisant l’un de ses doigts et il déborde" , développe-t-elle. Immédiatement, elle comprend que ces actes dépassent le cadre d'une consultation médicale : "je suis avec ma petite de deux ans à l’époque, avec moi dans le cabinet, et ma fille de quinze ans qui était dans la salle d’attente", se souvient la plaignante.

Je suis terrorisée, je me demande ce que je dois faire.

Peggy Ambeau

Plaignante

Après la consultation, elle décide donc d’aller voir son médecin traitant :" Je lui demande une confirmation de l’examen et de me dire si tout était normal. Il me dit, bien évidemment que non et qu’il ne faut absolument pas en rester là ". C'est ce dernier qui l’incite à se rendre au plus vite à la gendarmerie pour porter plainte.

"Jusque-là, je ne sais toujours pas ce qui s’est passé. Je sais que ce n’est pas normal, c’est tout ", explique Peggy Ambeau. Ce n’est qu’une fois le mot "viol" utilisé par les gendarmes qu'elle réalise pleinement l’ampleur de ce dont elle vient d’être victime selon elle : " et là, je comprends mon état d’esprit et ce que j’ai vécu. Et là, je sais que c’est grave."

 "Un pervers déguisé en médecin"

Au-delà de l'agression sexuelle présumée, elle dénonce également la posture du praticien, celui qui sait, face à ses patientes) qui écoutent ou doivent accepter des gestes qui seraient médicalement nécessaires.
Peggy Ambeau expliquait également, en février 2023 "ne plus avoir confiance en la médecine". Dix ans après, elle décrit une crainte, pour elle comme pour ses filles "qui ne vont plus chez le médecin seules".

 

Un  traumatisme qui "ne la quitte plus", même dans sa vie affective :  j’ai perdu confiance en l’homme en général.  

L'ordre des médecins pointé du doigt

Dans cette affaire, l'accusé, Bassam El Absi, fait l'objet de 17 plaintes. Mais pour des raisons de prescription, seules huit femmes sont parties civiles dans ce procès.

Certaines l'avaient dénoncé, dès 2002, au Conseil de l'ordre des médecins. L'ordre ne l'a radié qu'en 2009, lors de son départ à la retraite,  dix-sept ans après la première plainte. C'est aussi ce qu'ont déploré avec force les plaignantes : de ne pas avoir, tout ce temps, privilégié la parole comme la sécurité des patientes. 

Lors du premier procès, une manifestation avait été organisée à l’appel du Planning familial, de la Santé un Droit pour tous et de l’Assemblée générale Féministe. Sur la grille du palais de justice de Bordeaux le 20 février 2023, une banderole avait été suspendue. On pouvait y lire : "Affaire El Absi : Ordre des médecins complice".

"Ils ont été interpellés de nombreuses fois depuis 2002. L’Ordre des médecins l’a laissé dans l’impunité puis ils ont décidé de se remuer une fois qu’il y a eu des plaintes et que la justice s’en est emparé", pointe Bernard Coadou, président de La Santé un Droit pour tous et ancien médecin. 

J'appelle ça de l'omerta confraternelle !

Bernard Coadou,

Ancien médecin et président de l'association La Santé un Droit pour tous

Il aura fallu que deux patientes portent plainte à la gendarmerie contre le radiologue, en 2016, pour que le conseil de l’Ordre des médecins commence à réagir. Après l’ouverture d’une information judiciaire, deux ans plus tard, le conseil de l’Ordre des médecins de Gironde saisit la chambre disciplinaire de l’Ordre de Nouvelle-Aquitaine. "Si l’Ordre des médecins avait agi dès 2002, on aurait pu protéger d’autres femmes qui ont été victimes par la suite", déplorait Annie Carraretto, en février 2023.

Procès en appel

Depuis le premier procès qui fut assez médiatisé, six nouvelles plaintes non prescrites pourraient s'ajouter au dossier contre l'ancien radiologue, d'après Sud-Ouest. Le verdict est attendu pour le 6 décembre prochain.

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