Pour la première fois, une étude a permis d'établir un relevé des micro organismes présents sur le littoral néo-aquitain. Parmi eux, se trouvent des bactéries résistantes aux médicaments. Cette cartographie devrait permettre d'assurer un suivi sur le long terme et réduire les risque sanitaires
Quels sont les micro-organismes présents sur nos côtes ? Entre 2017 et 2020, des scientifiques se sont penchés sur la cartographie de la flore marine du littoral atlantique, de la Rochelle à Bayonne. Près de quatre ans de travail, avec un objectif : établir une cartographie des micro-organismes présents dans les eaux côtières de la façade néo-aquitaine, et faire un état des lieux de ceux qui résistent aux antibiotiques.
Un lien entre la santé humaine, animale, et l'environnement
Le résultat de cette étude, nommée Aqui-Litt et dirigée par le docteur Fatima M'Zali, a été présenté ce lundi, lors d'une restitution à l'Hôtel de Région. À cette occasion, le professeur Franck Chauvin, président du Haut conseil de la Santé publique a rappelé les principes du concept de "One Health" , selon lequel la santé de l'environnement, du monde animal et de l'humain entrent perpétuellement en interaction. "Agir pour l'environnement, c'est agir pour la santé humaine", a-t-il insisté, avant de rappeler que 1,2 millions de décès sont attribuables chaque année à l'antibio-résistance.
"Une première, avec son lot de découvertes"
Au total, 450 prélèvements ont été effectués sur le littoral atlantique, avec l'aide de plongeurs et de pêcheurs, auxquels s'ajoutent 120 prélèvements d'animaux d'élevage, 120 échantillons sur des patients de médecine de ville et les comptes-rendus de relevés hospitaliers.
"Cette évaluation du littoral néo aquitain a permis de faire une photo des bactéries, des virus et des champignons présents entre 2017 et 2020, explique le professeur Charles Cazanave, chef du service des maladies infectieuses au CHU de Bordeaux et engagé sur le projet Nova-Litt, l'étude qui prendra la suite d'Aqui-Litt. Il n'existe pas pour l'instant de comparaison sur un littoral équivalent. C'est une première, avec son lot de découvertes, avec des agents qu'on ne s'attendait pas à trouver ".
2 630 organismes et 300 espèces ont été identifiées. Parmi les surprises révélées par Aqui-Litt, se trouve notamment la résistance aux antibiotiques. "Plus on était proche des côtes, plus on trouvait des bactéries résistantes. Plus on s'en éloigne, moins on en trouve", note le professeur Cazanave, alors que la question du lien avec l'activité humaine, notamment l'évacuation des eaux usées, et celle de la régulation de la consommation des antibiotiques, se pose.
Certaines de ces bactéries sont d'origine humaine, avec l'eau du littoral qui est polluée par de la flore fécale. Mais on a aussi trouvé des bactéries de l'environnement du littoral, qui peuvent, de façon émergente, être des agents infectieux en médecine humaine ou animale. Ça marche dans les deux sens.
Professeur Charles CazanaveFrance 3 Aquitaine
Lanceur d'alerte
Autre enseignement de l'étude : certains agents pathogènes de l'eau, s'adaptent avec le réchauffement climatique. "Ils deviennent plus présents et peuvent passer plus facilement à l'homme", poursuit le Professeur Cazanave.
L'étude Nova-Litt, prévue entre 2022 2025, devrait permettre d'approfondir ces éléments et de les mettre en application. "Dans un deuxième temps, on verra l'évolution, et on pourra faire la corrélation entre les données du littoral, celle de la médecine humaine ; les données vétérinaires, et celles des eaux des rivières", poursuit Charles Cazanave.
Nova-Litt va nous permettre de voir s'il y a des choses qui émergent dans le littoral et qui pourraient être inquiétantes pour la santé humaine ou animale.
Pr Charles CazanaveFrance 3 Aquitaine
Les études Aqui-Litt et Nova-Litt sont cofinancées par l'Union européenne, la région Nouvelle Aquitaine et le groupe Ceva Sante animale. Elles pourraient, à terme, servir de modèle pour d'autres littoraux, également confrontés au réchauffement climatique.