Réunion entre le maire Nicolas Florian et Frédéric Longuépée pour évoquer les sujets sensibles du club, demande d'explication de Pierre Hurmic au président des Girondins, les deux principaux candidats au Palais Rohan, demandent des comptes.
La tension monte autour du club.
Ils se parlent régulièrement depuis quelques semaines. Mais cette fois-ci Nicolas Florian ne se contente pas de ses échanges téléphoniques cordiaux avec Frédéric Longuépée. Le maire de Bordeaux et candidat à l'élection 2020 a souhaité organiser prcohainement une réunion pour évoquer selon un membre de son équipe "tous les sujets sensibles" du club bordelais. Son président y sera notamment présent.
Ce n'est pas la première fois que le PDG des Girondins se rendra au Palais-Rohan.
Le 3 février dernier il était accompagné par Daniel Ehrmann, directeur management de King Street, le propriétaire du club.
Le maire veut, encore, des garanties
Début mars, sollicité par les Ultramarines comme tous les autres candidats à l'élection municipale de Bordeaux, l'ancien bras droit d'Alain Juppé leur avait répondu avoir eu notamment l'engagement de King Street d'assurer la pérennité financière du club et de s'inscrire dans la durée.
Cependant, le maire sortant avait également souhaité " qu'ils affichent maintenant clairement leur ambition notamment sur le plan sportif".
Cela ne devait pas être très clair donc.
Depuis, Nicolas Florian a toujours gardé un oeil sur l'une des vitrines de la ville.
Il n'a ainsi pas vraiment apprécié, c'est un euphémisme, d'avoir découvert dans la presse que les Girondins souhaitaient réduire la capacité du Stade Matmut Atlantique de sept mille places (NDLR : voir encadré).
Autant de sujets qui seront évoqués prochainement au Palais-Rohan. Mais il sera aussi question de la situation du club et de son avenir.
Le tacle appuyé de Pierre Hurmic
L'autre principal candidat à la mairie, arrivé deuxième au premier tour le 15 mars, est à son tour entré en jeu. Pierre Hurmic, qui se dit inquiet, a pris sa plume.Il a adressé une lettre étayée à Frédéric Longuépée pour lui faire part de ses "interrogations sur la perspective à moyen et à long terme de notre club, associé au nom et donc à l'image de la ville". L'exploitation du stade, le présent et le futur des Girondins, le candidat écologiste évoque plusieurs sujets en rappelant que "les collectivités territoriales, partenaires historiques du club ne peuvent que se montrer soucieuse et attentive à son devenir ne serait-ce qu'en raison des conventions nous liant pour la location du stade, du centre d'entraînement du Haillan, ainsi qu'au potentiel déficit d'image".
Sur son compte twitter, Pierre Hurmic a publié la réponse du président bordelais, qui comportait la copie de la lettre adressée à Nicolas Flroian sur les mêmes sujets.
Une réponse que l'élu écologiste municipal a taclé sévèrement en la qualifiant de "creuse et dépourvue d'intérêt".
Une mauvaise nouvelle de plus
La défiance, a minima, des têtes d'affiches de la politique locale tombe mal pour les décideurs du club.Déjà en conflit avec les Ultramarines, en proie à de gros problèmes financiers, dans le collimateur de la FIFA pour le transfert qui pose question d'un jeune joueur Togolais Thibault Klidjé en février, Bordeaux ne peut pas se permettre d'ouvrir un nouveau front politique cette fois. Le canal de discussion entre la mairie et le club reste ouvert et les Girondins ont tout intérêt à calmer le jeu.
Car dans l'histoire, les périodes de tension ont été rares et les passerelles nombreuses entre les collectivités locales et le club.
Une image ternie, les politiques n'aiment pas
Pour les politiques, l'image est importante, voire sacrée surtout quand c'est celle d'un emblème de la ville. Actuellement, celle des Girondins est ternie. Et cela ne peut pas être que de la faute des Ultramarines, de la presse, des anciens joueurs du club ou de la météo...Bordeaux sort d'une saison complètement ratée: douzième en Ligue 1, élimination en coupe de France dès les seizièmes de finale par Pau, en huitièmes de la coupe de la ligue à Brest.
Economiquement, avec un déficit de 55 à 60 ME, aggravé par la crise du Covid mais pas seulement, le malade ne se porte pas mieux. Et il inquiète tous les connaisseurs du club.
Le dépôt de bilan, le scénario du pire
Plus que jamais, la décision du propriétaire King Street sera déterminante pour le présent et l'avenir des Girondins. Personne ne l'imagine arrêter totalement les frais maintenant après avoir injecté 100 ME pour racheter le club.Pour combler le déficit, le propriétaire américain devra pourtant sortir encore le chéquier et rassurer la DNCG lors du passage qui s'annonce tendu en juin.
La déclaration à ce sujet attribuée à Frédéric Longuépée :"je ferai un numéro de claquettes " dans un nouvel extrait des enregistrements diffusés ce jeudi matin par les Ultramarines, a dû plaire au gendarme financier du football français...
Au-delà de cette sortie présidentielle, censée à l'origine rester dans le cadre d'une réunion de travail, la DNCG pourrait sanctionner le club si la feuille de route n'est pas respectée. Jusque à présent, Bordeaux y a échappé grâce à l'engagement formel de son propriétaire. Mais le déficit était moins important.
Le scénario du pire, qui ne peut pas être exclu, c'est bien celui du dépôt de bilan.
Ce serait une catastrophe économique, sportive avec relégation obligatoire au moins à l'échelon inférieur... et en terme d'images pour Bordeaux.
En octobre 2018 lors de la vente des Girondins au ticket GACP-King Street, Alain Juppé, alors maire, avait évoqué un club "qui appartient à l'histoire de la ville".
Un an et demi plus tard, celle-ci tente de préserver son patrimoine.
Christophe Pierrel :" les discussions avec les Girondins sont suspendues temporairement"
L'un des enjeux stratégiques du développement des Girondins, c'est l'exploitation commerciale du stade Matmut Atlantique. En tant que club résident, Bordeaux n'en jouit que lors de ses propres rencontres et verse un loyer annuel de 3, 8 ME à la métropole. Le président de la société Stade Bordeaux Atlantique Christophe Pierrel, joint en début d'après-midi, est catégorique :"le contrat entre les Girondins et nous n'existe pas. Nous en avons un avec la Métropole. Les Girondins lui louent le stade et nous sommes tenus d'accueillir le club résident. Il n'y a pas de contrat direct avec le club". Cela n'empêche pas les négociations, comme celles ouvertes depuis plusieurs mois sur l'exploitation commerciale de l'enceinte :
"la période actuelle n'est pas la plus adaptée. Les Girondins n'ont pas d'activité et nous non plus. On s'est dit qu'il fallait reprendre les choses à la sortie de la crise. Les discussions sont suspendues temporairement". Sans dévoiler les coulisses des échanges, le patron de SBA confirme deux informations.
Le club entend bien ramener la capacité commerciale de l'enceinte à 35 000 places, soient 7000 de moins : "il n'est pas question de démonter des sièges. Cela ne m'a jamais été demandé. Et cela serait une usine à gaz".
De plus, le club pourrait récupérer l'intégralité de l'exploitation du stade : "une partie ou en totalité, oui ça fait partie des scénarios étudiés".
Pour l'ancien directeur de cabinet adjoint de François Hollande, les difficultés financières des Girondins ne sont pas une source d'inquiétude : "ça n'a pas d'influence. Et je ne fais pas d'ingérence dans les affaires des autres. Evidemment on aimerait bien que les Girondins brillent car ça ferait briller le stade avec eux. Mais je vais vous dire c'est tout le paradoxe du contrat actuel et de son déséquilibre que nous avons avec Bordeaux Métropole.
On aurait intérêt à ce que les Girondins ne jouent pas dans le stade. Car deux jours avant et deux jours après un match, je ne peux pas organiser d'activité commerciale dans le stade, séminaire et autres".
Aujourd'hui les Girondins sont loin des préoccupations de Christophe Pierrel.
Sans matchs et sans concert, l'activité du stade Matmut Atlantique est réduite à zéro, contrairement aux charges d'entretien entre autres. Alors le président de la société SBA a demandé à Bordeaux Métropole un allègement des recettes nettes garanties :
"on a une relation de confiance avec le maire et le président de la métropole et il n'est pas question de leur envoyer une facture du jour au lendemain. On n'impose rien, il faut une discussion mais c'est un cas de force majeure. Aujourd'hui, il n'y a pas d'activité et donc pas de chiffre d'affaires alors que les charges sont à peu près similaires à celles d'un temps normal, notamment l'entretien de la pelouse qui doit être prête à accueillir un match".
Cette année, cinq ans après l'ouverture du stade, une clause de revoyure est prévue entre SBA et les collectivités locales. La situation actuelle l'a rendu peut-être plus urgente:
"c'est une discussion de gré à gré sur le contrat. On pose la situation telle qu'elle est".