Impossible pour l'heure de quitter l'Ukraine. Pascal Boiteux est installé dans la capitale Kiev. Il témoigne du courage des habitants et leur capacité d'adaptation à cette "sale guerre entre frères et cousins" nous dit-il. Nous l'avons contacté ce mercredi 16 mars.
C'est un papa inquiet, mais qui s'accroche et souligne le courage des habitants de ce pays sous les bombes. Le Bordelais Pascal Boiteux n'a pas d'autre choix que de rester à Kiev, la ville où il habite depuis plusieurs années. Sa femme ukrainienne et sa fille étudiante sont en France "à l'abri".
" Mon fils ayant 19 ans, il est franco-ukrainien, n'a pas le choix de quitter le pays, il est mobilisable. Donc j'ai choisi de rester avec lui, à ses côtés, je n'allais pas partir en laissant mon fils. De toute manière, il ne souhaitait pas partir alors que tous ses amis sont allés se battre. Il ne veut pas passer pour un lâche, il aime son pays. "
Il donne régulièrement des nouvelles à son frère installé près de Bordeaux. Pascal, sexagénaire, est le fils du champion olympique de natation Jean Boiteux en 1952, ensuite devenu directeur technique régional en Aquitaine. Installé à Kiev, il travaille dans l'immobilier avec des investisseurs ukrainiens. Enfin, travaillait, car depuis l'invasion russe, ses activités ont marqué le pas.
Il fait partie des rares Français encore sur place.
Si je n'avais pas eu d'enfant en âge de se battre, j'aurais quitté l'Ukraine aussi.
Pascal Boiteux - Bordelais installé à Kiev -France 3 Aquitaine
L'entraide
Son fils de 19 ans est à la faculté de management de la capitale ukrainienne, mais bien sûr tout est à l'arrêt. Donc le père et le fils aident comme ils peuvent. Transportent des paquets, filent des coups de main. "Je l'ai convaincu de ne pas prendre les armes parce que j'ai peur." dit le père de famille. Mais pour combien de temps ? La pression dans le pays est forte et les hommes peuvent s'inscrire pour participer à repousser les militaires russes.
"On aide les gens comme on peut sans pour l'instant participer aux combats. Il m'a demandé d'aller s'inscrire, j'essaie de le convaincre mais c'est de plus en plus dur. "
Pascal et son fils sont portés aussi par l'attitude des Ukrainiens. La ville de Kiev et ses habitants s'adaptent, d'après son témoignage. Les Russes sont à 15 ou 20 kilomètres de là, mais ne progressent pas. Le président russe, Vladimir Poutine, imaginait une invasion rapide mais ce n'est pas le cas. " L'accès à Kiev pour la moitié, par le Sud, est disponible. Les camions circulent, les armes arrivent, la nourriture arrive. Il y a des magasins qui vont rouvrir, ceux qui vendent des matériaux pour la construction. Ils sont en train d'essayer de faire redémarrer le pays pour que les gens puissent travailler, aient des revenus."
La vie autrement en tous cas, avec des barrages tous les 500 mètres, où des hommes fouillent les véhicules. Mais une fois de plus, ce qui marque Pascal, c'est l'incroyable capacité d'adaptation des habitants.
"Ce qui est très surprenant, c'est qu'on entend les coups de feu mais les gens circulent normalement. La première semaine, les gens restaient chez eux, maintenant ils circulent."
Une sale guerre
Pascal Boiteux poursuit sa vie dans cette ville troublée par la guerre, cette guerre entre frères, au milieu de ses amis qui habitent la capitale. "J'ai des amis russes et biélorusses. C'est une catastrophe pour eux, ils ont honte. Il y a énormément de Russes en Ukraine. Ma femme a un frère en Russie, un père à moitié russe, à moitié ukrainien. C'est une guerre horrible. C'est une des raisons qui fait qu'il y a énormément de Russes qui viennent et qui ne sont pas motivés." C'est ce que croit savoir Pascal Boiteux qui évoque les militaires russes.
C'est une drôle de guerre, c'est faire se battre des frères et des cousins entre eux. C'est horrible.
Pascal Boiteux - Bordelais installé à Kiev en UkraineFrance 3 Aquitaine
Lors de notre entretien, il insiste sur un message à destination des pays européens. Il est persuadé que la Russie de Vladimir Poutine arrêtera la guerre, contrainte et forcée à une condition. Pas en raison d'une intervention armée de l'OTAN, " trop risquée" juge-t-il. Non. Pour lui, la poursuite ou non est liée au nerf de la guerre justement, l'argent. Celui que reçoit la Russie en vendant, surtout à l'Allemagne, son gaz et son pétrole.
Il faut arrêter de donner à Poutine ces 6 milliards de dollars par jour, pour qu'il arrête d'avoir de l'argent pour envoyer des bombes et des roquettes sur les enfants ukrainiens.
Pascal Boiteux - Bordelais habitant de KievFrance 3 Aquitaine
Le Bordelais a, pour l'heure, tout ce qu'il faut pour tenir, continuer autant que possible à vivre sur place, encouragé aussi par la volonté et la mobilisation des Ukrainiens. Pour autant, difficile de savoir de quoi sera fait demain.