Journaliste français tué en Ukraine : "Frédéric faisait son métier avec conviction jusqu'au bout"

Le journaliste français Frédéric Leclerc-Imhoff a été tué dans un bombardement à Severodonetsk en Ukraine, lors d'un reportage sur un convoi humanitaire pour la chaîne BFMTV, ce 30 mai. Le reporter d'images a été formé à l'école de journalisme de Bordeaux (IJBA) où l'on se souvient de lui comme un étudiant passionné et rigoureux.

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"C'était une promotion particulièrement soudée..." Arnaud Schwartz, le directeur de l'Institut de journalisme Bordeaux Aquitaine explique que, depuis la veille, il s'est entretenu "avec beaucoup de ses professeurs de l'époque et de ses camarades proches de la promotion" 2014. Ici, on garde "le souvenir d'un étudiant aussi attachant que passionné, rigoureux et sensible".

"L'émotion est très très forte à l'IJBA et nous sommes envahis d'une tristesse terrible". Depuis le partage sur twitter de cette terrible annonce, l'école a "reçu beaucoup de témoignages d'amitié. Beaucoup d'intervenants professionnels se sont manifestés... Beaucoup de soutien et de solidarité confraternelle".

Le directeur de l'IJBA, qui n'a pas connu directement Frédéric, écrit en ce moment un texte retraçant le parcours du JRI de 32 ans qu'on disait "très réservé, discret, ce qui ne l'empêchait nullement d'être liant et d'avoir un rôle important auprès de sa promotion qui était soudée et passionnée. On m'a décrit quelqu'un très ouvert d'esprit, rigoureux, sérieux et impliqué dans ses études, déjà très "pro"..."

Il avait choisi d'être derrière la caméra, "un très beau sens de l'image", d'après ses professeurs, et "une sensibilité qui s'exprimait de cette manière".

De l'engagement

Frédéric était quelqu'un de "très engagé", "avec des engagements de citoyen", qui croyait beaucoup au journalisme, "dans le rôle du journaliste". "Et c'est sans doute pour cela que, à sa demande, il était reparti pour une deuxième mission en Ukraine".

Dans cette école, on forme des étudiants à devenir journalistes généralistes. "Les journalistes qui sont amenés à travailler en zone de conflits se forment. Et Frédéric était formé. Il avait fait des stages de préparation à l'exercice du journalisme en zone de conflit. Marc-Olivier Fogiel (le directeur de BFMTV) l'a souligné : c'était tout sauf une tête brûlée..." ajoute Arnaud Schwartz. 

Il faisait son métier avec conviction jusqu'au bout.

Arnaud Schwartz - directeur de l'IJBA

Source France 3 Aquitaine

Le directeur de l'école de journalisme pointe également le fait que "toutes les guerres sont sales, mais celle-là l'est particulièrement. Avec des civils qui sont pris pour cible et, comme les journalistes doivent être normalement considérés comme des civils en temps de guerre, les journalistes parmi les civils sont une cible encore plus désignée".

Quant aux dernières sorties des militaires russes "qui le désigneraient comme un mercenaire", on qualifie cela ici de "grotesque". "C'est évidemment n'importe quoi et on voit bien là le contre-feu de la propagande russe".

"Double crime" selon la ministre

Le parquet national antiterroriste (Pnat) a annoncé l'ouverture d'une enquête pour crime de guerre après la mort de Frédéric Leclerc-Imhoff. Le journaliste de BFMTV a été tué dans l'est de l'Ukraine alors qu'il accompagnait des civils à bord d'un bus humanitaire près de Severodonetsk.

Frédéric, le JRI, et Maxime, le rédacteur, ainsi que leur fixeuse-traductrice, Oksana Leuta, accompagnaient des civils à bord d'un bus humanitaire, ce lundi 30 mai. Il a été tué d'un éclat d'obus, son collègue Maxime a été légèrement blessé et Oksana est indemne.

Le Président Emmanuel Macron et la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, ont réagi sur Twitter assurant du soutien inconditionnel de la France et condamnant un "double crime qui vise un convoi humanitaire et un journaliste".


La ministre a "exigé" "une enquête transparente dans les meilleurs délais pour faire toute la lumière sur les circonstances de ce drame". "Informer ne devrait coûter aucune vie", a pour sa part twitté la Première ministre, Elisabeth Borne.

Deuxième mission pour BFMTV

BFMTV a confirmé le décès de son journaliste reporter d'images, âgé de 32 ans, sur son antenne. Il a été touché par un "éclat d'obus alors qu'il suivait une opération humanitaire", a-t-elle précisé.
Il s'agissait de la deuxième mission en Ukraine du vidéaste, qui travaillait depuis 6 ans pour BFMTV. Le journaliste Maxime Brandstaetter, qui accompagnait le JRI sur ce reportage, a été "légèrement blessé", a précisé la chaîne.

Depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, au moins huit journalistes sont morts sur le terrain dans l'exercice de leur profession, selon un décompte de RSF (Reporters sans frontières).


"Nous condamnons fermement cet assassinat. La liste des crimes russes contre les professionnels des médias en Ukraine ne cesse de s'allonger", a déploré Oleg Nikolenko, porte-parole du ministère des Affaires étrangères ukrainien, sur Twitter. Selon ce responsable, "l'armée russe a bombardé un véhicule qui devait évacuer des civils de la zone de guerre, près de Severodonetsk". Le gouverneur de la région de Lougansk avait prévenu dans l'après-midi sur le réseau Telegram que l'opération, qui visait l'évacuation de 10 personnes, avait été annulée en conséquence.
"Le camion blindé n'a pas été touché directement mais des éclats ont traversé le pare- brise blindé. Un éclat a touché Frédéric", a raconté Patrick Sauce, grand reporter de la chaîne d'info.
 "Maxime était situé à l'arrière, il a été blessé à la jambe. Oksana Leuta, la fixeuse-traductrice ukrainienne va bien", a ajouté le journaliste. 

Les trois membres de l'équipe "ont échangé comme tous les matins (pour évaluer les risques, ndlr): Oksana et Frédéric ont estimé que la mission était suffisamment sécurisée pour pouvoir y aller. Maxime, lui, avait plus de questions, comme il aurait pu en avoir la veille ou le lendemain. Mais (...) c'est aussi ça une équipe de reportage, c'est des gens très soudés, ils ont décidé d'y aller", a exposé le patron de BFMTV.

"La première réaction (de sa mère, au téléphone, ndlr) a été de demander comment allaient Maxime et la fixeuse. Elle savait quel était le métier de son fils (...) avec une forme de fierté", a-t-il conclu.

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