En ce 16 février 2023, les manifestants restent déterminés. En cette cinquième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, à Bordeaux, le cortège est un peu moins garni que les fois précédentes. Au moins 30 000 Girondins sont tout de même descendus dans la rue, selon les premières estimations des syndicats.
Des salariés du privé, du public et des retraités, le cortège girondin s'élance, les rangs sont denses. La première cible des manifestants dans les rues de Bordeaux reste le report de l'âge légal de départ à la retraite. "Pour tout le monde, la retraite à 64 ans, ce n'est pas possible. Si c'est pour travailler épuisé, ce n'est pas la peine.", dénonce Yoann, qui arbore les couleurs de FO.
Au bout d'un moment, on ne pourra plus se lever, je ne veux pas finir par travailler avec un déambulateur
Yoann, soignant à l'hôpital Saint-André de BordeauxWEB France 3 Aquitaine
Mylène, 34 ans, enseignante sur le bassin d'Arcachon, s'oppose pour les mêmes raisons. "Je ne me vois pas faire ce métier jusqu'au bout dans les conditions actuelles, c'est pour ça que je suis là pour protester", déclare-t-elle.
"On revient au siècle dernier, comme avant 14-18, où il y avait que le dimanche pour se reposer", s'insurge Christine. Elle ne comprend pas l'urgence de faire cette réforme, qu'elle juge injuste. "On trouve que c’est inadmissible de nous demander de faire des années supplémentaires alors qu'on pourrait avoir un autre système et préserver la répartition comme elle existe aujourd’hui". Christine est toujours aussi déterminée.
On est dans la rue et on le sera jusqu'à ce que le gouvernement retire ce projet de loi.
Christine, manifestante dans le cortège de BordeauxFrance 3 Aquitaine
Dans les rangs des manifestants, tous sont touchés, y compris les mieux lotis. À 38 ans, Stéphane, cadre dans le privé à Mérignac, près de Bordeaux, a manifesté pour la première fois de sa vie le 19 janvier dernier, à l'occasion de la première mobilisation contre la réforme. "Je gagne assez bien ma vie et je ne suis pas concerné par des fins de mois difficiles, mais je me sens concerné pour les autres et pour mes enfants. Ce sont des économies de petits comptables, il y a plus important comme sujet actuellement dans le pays", insiste Stéphane.
Des grèves qui pèsent sur le pouvoir d'achat
Mais en ce 16 février 2023, la manifestation a rassemblé un petit peu moins de monde que les quatre précédentes. Ce cinquième jour de grève, en opposition à la réforme des retraites dans un contexte économique difficile, pèse sur les salaires, selon Angel, un ouvrier présent dans le cortège. "Je suis ouvrier hautement qualifié, mais ça pèse quand même sur le pouvoir d’achat, avoue-t-il.
Il faudra tenir dans le temps !
Angel, ouvrier qualifié, manifestant à Bordeaux
Si à l'image d'Angel, beaucoup invoquent des grèves pesant sur le pouvoir d'achat, ils assurent tout de même rester déterminés. "Bien sûr que ça nous pèse sur le budget, mais il faut faire des choix. On va continuer même si on doit y laisser de l’argent. C'est pour nos enfants et petits enfants", enchaîne Christine.
La faute aussi aux vacances d'après Angel, ouvrier présent dans le cortège. "On verra le 7 mars, si les gens sont de retour. Samedi, d’autres personnes étaient présentes", relève-t-il.
Cinquième journée de colère
Pendant que l'examen du projet de loi sur la réforme des retraites est en cours à l'Assemblée nationale, l'intersyndicale ne faiblit pas. Cette manifestation est d'autant plus importante à un peu plus de 24 heures de la fin du premier examen du projet de loi par les députés. Cette fois-ci, les cortèges étaient un peu moins garnis pour effectuer une boucle au départ et à l'arrivée de la place de la Bourse. Selon les premières estimations des syndicats, au moins 30 000 personnes sont descendues dans les rues du centre-ville de Bordeaux.
L'opposition à la réforme se traduit dans la rue depuis le 19 janvier et une manifestation rassemblant 60 000 personnes selon les syndicats et 16 000 selon la police. Depuis, à l'exception du 7 février qui avait rassemblé 55 000 manifestants d'après les syndicats, et 9 500 selon la préfecture, la mobilisation ne faiblit pas. En témoigne le cortège très garni du samedi 11 février réunissant entre 80 000 et 13 500 personnes, selon les sources. Une pétition lancée par l'intersyndicale a même dépassé le million de signatures s'opposant au report légal de l'âge de la retraite.
Bras de fer parlementaire
L'examen du projet de loi à l'Assemblée nationale doit se terminer le 17 février à minuit avant que les sénateurs se penchent à leur tour sur le texte.
Cette procédure accélérée, voulue par le gouvernement en utilisant l'article 47.1, limite à 50 jours le débat parlementaire. Ajouté aux quelques milliers d'amendements déposés, ce calendrier risque de ne pas permettre aux députés de se positionner sur tous les articles du projet de loi. Et notamment l'article 7 reportant l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans et qui cristallise toutes les tensions.
Tous les manifestants présents à Bordeaux, ce 16 février 2023, espèrent que la mobilisation ne faiblisse pas avant la fin de l'examen du projet de loi, programmé le 28 mars prochain.