Municipales 2020 à Bordeaux : Pierre Hurmic et ses priorités pour une ville en vert 

L’écologiste Pierre Hurmic a mis fin à 73 ans de domination de la droite à Bordeaux. La ville passe au vert. A quoi faut-il s’attendre ? Plus de place pour les piétons et les vélos, un urbanisme compatible avec l'écologie, et plus de policiers municipaux auprès de la population. 

" Je serai le maire de toutes les Bordelaises et de tous les Bordelais, et étant d'un tempérament déterminé, j'appliquerai ce programme, qui est de doter Bordeaux enfin de la transition écologique, mais en le faisant aussi avec le souci de justice sociale. Pas d'écologie sans justice sociale ".  
 
Depuis 25 ans, ce basque d’origine rongeait son frein dans l'opposition municipale. Dans quelques jours, Pierre Hurmic va donc s’installer dans le fauteuil de Nicolas Florian (LR). Une page se tourne dans la ville de près de 250 000 habitants, à la réputation bourgeoise, qui élisait ses maires de droite au premier tour depuis 73 ans.
L’écologiste de 65 ans, allié à la gauche, qui a éliminé l'héritier d'Alain Juppé veut imprimer sa marque et sa méthode dès le début. Lui qui reconnaît avoir parfois souffert des mandats agités dit vouloir pacifier les relations entre la majorité municipale et son opposition.  
 

Première mesure

Sa première mesure sera une mesure de gouvernance. Il va confier la présidence de la commission des finances à un élu d’opposition dans un souci "de transparence et d’ouverture." 
Au lendemain de la victoire, Nicolas Mannant, son directeur de campagne rappelle les priorités à venir, comme la mise en place très rapidement d’un audit financier « pour faire un état des lieux précis et connaître les marges de manœuvre possible » 

La fin des grands chantiers et un urbanisme compatible avec les impératifs écologiques et climatiques

Bordeaux, à deux heures de Paris grâce à la Ligne à grande vitesse, a subi depuis deux décennies une intense rénovation qui a mis en valeur ses bâtiments du XVIIIe siècle et attiré les touristes. 
Mais cet essor s'est accompagné d'une envolée des prix de l'immobilier, d'une urbanisation à marche forcée dans les banlieues où les plus pauvres ont été repoussés, et d'importants problèmes de transport. Sans compter une montée de la délinquance. La campagne de Pierre Hurmic a aussi reproché à l'équipe précédente d'avoir conçu une ville très minérale qui a battu l'été dernier son record de chaleur (41,2 degrés).

Le futur maire a promis de déclarer au plus vite l’urgence climatique. Un axe majeur au sein de son programme. L’homme qui se définit comme un « vert pragmatique » veut tendre vers le zéro artificialisation des sols. Ainsi, la ville ne doit plus poursuivre son développement sur ses derniers espaces de nature. 
Les programmes immobiliers en cours vont être gelés et les permis de construire non délivrés réexaminés. Pierre Hurmic veut revoir au cas par cas, les 30 000 logements des programmes de ce que Alain Juppé appelait l’arc du développement durable Brazza, Bastide-Niel, Euratlantique.
Les Plans Locaux d'Urbanisme seront révisés. Il promet une politique d'encadrement des loyers, n’exclut pas une politique de réduction ou de réquisition des logements vides (environ 10 000 logements vacants dont la moitié environ sont mobilisables).

Une sécurité sociale alimentaire

La socialiste Emmanuelle Ajon, conseillère municipale à Bordeaux qui a été la cheville ouvrière de l’union avec les écologistes contre l'avis même de certains de ses confrères au sein de son parti se réjouit de cette alliance:

"Cette victoire à la maire de Bordeaux va permettre de travailler enfin en collaboration avec le département notamment sur le social, faciliter les démarches pour les bénéficiaires du RSA ou des personnes touchées par le handicap. Car la municipalité de droite de Bordeaux a tout fait pour éviter de collaborer avec le département de gauche pendant des décennies ».

Celle qui est aussi vice-présidente du département de la Gironde défend le dispositif d' une forme de sécurité sociale alimentaire avec "des chèques permettant aux Bordelaises et Bordelais d'accéder à une alimentation bio et abordable".

À la voiture de s’adapter à la ville

" On ne sera pas forcément garé devant chez soi, peut-être faudra-t-il marcher un peu pour gagner son domicile " La voiture ne sera pas bannie mais sa place repensée. La majorité de l’espace public sera dédiée aux piétons, aux cyclistes, à la végétation. 

Et Nicolas Mannant de rappeler que la voiture consomme aujourd'hui plus de 70% de l'espace tout en représentant seulement 29 % des déplacements à Bordeaux.

En clair, la voiture aura moins de place pour stationner et circuler. La nouvelle équipe dirigeante entend le faire dans la concertation avec la population : " Cela se fera quartier par quartier avec les habitants. Tout ceci ne peut se faire d’un coup de baguette magique, les voitures devront se loger quelque part. Cela signifie d’utiliser des parkings qui existent déjà et d'en construire peut-être de nouveaux. "   

Au moins 50% des nouveaux aménagements urbains seront consacrés aux modes alternatifs et décarbonés. Pierre Hurmic veut propulser la pratique du vélo et n’exclut pas de supprimer une voie à la circulation automobile, et de mettre en place des vélo-rues ou des zones de circulation dédiée.  Les priorités incluent un plan piéton et une piste cyclable continue et sécurisée sur toute la longueur des boulevards.
 
 

Davantage de policiers municipaux 

Pierre Hurmic, qui considère que l’abandon de la police de proximité par Nicolas Sarkozy en 2002 a été une erreur, veut recruter des policiers municipaux. 

Ils ne seront pas armés, devront patrouiller plus nombreux, à vélo et dans toute la ville.

"La fin " de la cogestion de la métropole

Pour Pierre Hurmic, l’intérêt métropolitain doit être supérieur à la somme des intérêts municipaux.

" Ce que les revendications des gilets jaunes ont manifesté particulièrement à Bordeaux, c’est le déséquilibre qui fait que la métropole a capté toutes les richesses d’emplois, les services publics au détriment des territoires ruraux et semi ruraux." rappelle le chef d'orchestre de la campagne.

Son arrivée à la mairie signerait la fin de la cogestion de la métropole, héritée du système de Jacques Chaban-Delmas avec le socialiste Michel Sainte Marie et perpétuée par Alain Juppé.
Ce qui est décrit aujourd'ui comme un séisme politique à Bordeaux remet aussi en cause la suprématie de la droite à la métropole qui bascule à gauche. Le groupe majoritaire Communauté d’avenir (centre et droite), qui détenait 63 sièges, n’en aura plus que 38.

Cela n'a pas échappé au président socialiste de Gironde Jean-Luc Gleyze, qui salue ce « changement historique (qui) redessine les équilibres politiques au sein de la métropole. Carbon-Blanc, Saint Médard en Jalles, Artigues près Bordeaux, viennent renforcer les forces de la gauche des communes remportées au premier et second tour telles que Eysines, Lormont, Mérignac... »

L'ensemble des forces de gauche sera majoritaire avec 34 sièges pour le Parti socialiste et 28 sièges pour les Verts. 
Reste une question essentielle : qui pour présider cettte collectivité de 750 000 habitants ? Pierre Hurmic n' a pas dit non. Mais il n 'est pas certain que ses alliés à gauche soient tous d'accord. Des tractations vont se jouer en coulisse.

À n'en pas douter, le troisième tour de ces élections a déja débuté.

 
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