Des ateliers de danse ont été organisés au centre pénitentiaire de Gradignan près de Bordeaux. Un temps de loisir pour les détenues, à l'initiative de la Bâtonnière du barreau de Bordeaux et animé par la première danseuse de l'Opéra.
Ce 26 juin c'est la première pour les danseuses de la prison de Gradignan, en Gironde, qui ont préparé ensemble ce spectacle. En guise de costumes de scène, elles arborent des tee-shirts où elles ont brodé un mot qui les représente : "combat", "amour", "sérénité". Des mots qu'elles déclinent ensuite en langue des signes, des gestes chorégraphiques.
Rencontre avec l'extérieur
C'est un moment empreint d'émotion, de fierté, de reconnaissance aussi après quelques semaines d'échanges autour de la danse. Depuis le mois de février, ces femmes françaises, roumaines ou espagnoles partagent cet atelier, qui semble avoir fait mouche auprès de ces détenues qui vivent parfois leur détention au jour le jour.
Elles ont trouvé dans ce cadre-là du soutien auprès des autres participantes comme de l'intervenante. C'est important "parce que tu connais l'autre aussi", explique une détenue, dans un sourire avec une pointe d'accent espagnol. "On a pu rêver, voyager" explique cette autre pensionnaire.
C'est surtout une rencontre avec l'extérieur qui fait du bien. Et, en l'occurrence, cet apport artistique qui les sort de leur quotidien reclus, c'est Vanessa Feuillate qui leur prodigue. La première danseuse de l'Opéra de Bordeaux a animé pendant quatre mois cet atelier de danse avec un regard bienveillant. Un véritable échange puisqu'elle dit elle-même avoir "été portée" par elles, dans sa démarche.
Je ne m'attendais pas à ça. Je ne pensais pas qu'elles seraient aussi réceptives !
Vanessa Feuillate, première danseuse de l'Opéra de BordeauxFrance 3 Aquitaine
La danseuse est enthousiaste, aussi parce qu'elle a su ce qu'elles pouvaient vivre de négatif par ailleurs, dans leur vie, dans le quotidien de leur détention, à cause des conflits, de la violence... "Malgré tout, elles étaient toujours là. Elles sont venues à chaque séance !"
Regardez le reportage d'Elise Galand et Sébastien Delalot.
Se reconstruire après une condamnation
Pour les encadrants et surveillantes, l'expérience a été bénéfique. Cela a permis, aussi, d'oublier la "routine qui s'installe en prison", notamment parce que dans ce quartier des femmes, il y a beaucoup de peines longues et qu'il n'est pas facile de se projeter, rappelle Carine Arnaud, officier responsable du quartier des femmes au centre pénitentiaire Bordeaux-Gradignan. "Ce n'est pas évident de se reconstruire après une condamnation, de se dire il y aura un après. Mais l'après, il faut le travailler dès maintenant".
Danse, foot et éloquence
Cet atelier de danse fait partie d'un programme d’actions multi-activités à l'initiative de la bâtonnière du barreau de Bordeaux, Christine Maze, en partenariat avec l'Opéra de Bordeaux. Il a été monté afin d'envisager la réinsertion des détenu(e)s autrement. Car les conditions de détention et le manque d'interactions sociales ne favorisent pas les démarches de réinsertion.
En avril, un match de foot opposant des détenus à des avocats de l’association sportive du barreau de Bordeaux était organisé, ainsi qu'un concours d'éloquence. Et puis ce spectacle, construit lors de ce stage de danse. Des ateliers qui pourront peut-être donner d'autres idées dans les années à venir.
En attendant, pour les volontaires, ce fut l'occasion d'engager leur corps et leur esprit et de se projeter, qui sait?, hors les murs de la prison. Des moments privilégiés pour tenter de reprendre confiance en eux, le temps d'un atelier, et d'envisager peut-être leur vie, demain et dehors...