Le rectorat de Bordeaux a décidé de fermer une partie de la formation en baccalauréat professionnel AEPA, portant sur l'animation enfance et personnes âgées. Une section ouverte il y a quatre ans dans un secteur qui, d'après les professeurs, a pourtant des débouchés pour les élèves.
Ce jeudi 12 décembre, au Lycée Victor Louis de Talence en Gironde, les professeurs qui interviennent auprès de cette section professionnelle dédiée à l'enfance et au grand âge, ont décidé de faire grève. Le collectif de 27 professeurs souhaite parler d'une même voix. Ils se disent "soudés dans leur démarche", qu'ils soient ou non professeurs d'un enseignement professionnel.
Rassemblement avec pancartes et banderoles
Ce jour-là, "dès 7 h 30 du matin et toute la matinée, nous distribuerons des tracts devant le lycée et à 14 heures, nous nous rassemblerons avec banderoles et pancartes devant le rectorat", ont-ils assuré. Il s'agit pour eux d'expliquer leur incompréhension face à la décision du rectorat de Bordeaux de réduire de moitié les effectifs d'une classe formant au Bac professionnel AEPA. Dès la rentrée 2025, les places accessibles à la formation passeraient de 30 à seulement 15.
Un coup porté à une formation accessible après la troisième, qui débouche sur un bac professionnel, afin de former des jeunes au métier d'animateurs auprès de ces deux populations.
L'annonce a été faite auprès des professeurs au mois de septembre, pour une mise en œuvre à la rentrée 2025. "On a été très surpris parce qu'on ne s'y attendait pas du tout. Surtout sur une filière qui marche aussi bien !" Cette décision manque de recul selon les enseignants, qui rappellent que la section a été "créée il y a quatre ans, mobilisant alors moyens humains et financiers publics pour cela", "parce qu'il y avait de la demande dans ce secteur". Les jeunes sont également en recherche de ces formations pour accéder à ces emplois, affirment-ils. On remplit. On a trente places : on a trente élèves !"
Manque de concertation ?
Lors d'une rencontre au rectorat le 4 décembre dernier, l'entretien a débuté sur le rappel des quatre étapes préalables à une révision de la carte scolaire. "On a appris qu'on était déjà à l'étape numéro 4", et que donc les professeurs, comme la direction, n'avaient pas été intégrés au processus de concertation des phases deux et trois, rapportent les enseignants.
L’équipe se bat pour une école unie, proposant des formations pour tous les publics, de manière gratuite et non vers une voie professionnelle payante.
Le collectif de professeursLycée Victor Louis de Talence
"L’année dernière, 15 places ont été ouvertes dans un lycée privé de Bordeaux et cette année, on ferme chez nous, un établissement public !", déplore le collectif mobilisé face à ces suppressions de places dans leur établissement. "L’offre du secteur privé est renforcée, elle est majoritaire ! (61 places dans le public contre 73 dans le privé, ndlr). Les familles devront se tourner vers l’enseignement privé ou d’autres formations".
Malgré nos demandes et rencontres nous n’obtenons aucun élément logique justifiant la décision et aucune prise en compte des erreurs manifestes dans la prise de décision.
Le collectif des professeursLycée Victor Louis
Des emplois à la clé
Les enseignants s'interrogent sur l'argumentation du rectorat. Ce dernier dit se référer à un logiciel interne (ORION) qui indiquerait que "la formation présente des résultats limités en termes d’insertion professionnelle et de poursuites d’études". Mais les professeurs l'assurent, la formation ne figure pas encore dans ce système. "La filière étant jeune dans l’établissement, aucun chiffre n’existe", martèlent-ils.
Selon ces professeurs, cette décision ne peut être considérée comme sanctionnant un niveau ni un manque de débouchés. Sur les deux promotions de bacheliers, le taux de réussite était de 72 % en 2023 et 77 % en 2024. "On a contacté nos trente jeunes de l'année dernière, ceux qui ont obtenu le Bac : 54 % sont en poursuite d’études et 43 % qui travaillent", en CDD ou en CDI.
Le collectif veut aussi mettre en avant les atouts de cette section disposant un d'un internat alors qu'un tiers des élèves viennent du Sud-Gironde. Sa situation dans l'agglomération bordelaise offrirait également à ses élèves de nombreuses possibilités de stages dans les communes limitrophes.
Le résultat d'un travail effectué "en concertation" selon le rectorat
Diminuer l'effectif de moitié aurait des conséquences sur l'emploi, notamment celui d'une professeure en enseignement professionnel. "L’unique enseignante touchée bénéficie d’un accompagnement personnalisé dans le cadre d’une reconversion professionnelle, tempère le rectorat lors du compte rendu, estimant que cette modification ne représenterait qu'une diminution de seulement 1,6 % des effectifs globaux".
Le collectif répond qu'aucun "professeur ne souhaite pour le moment de reconversion et l’impact sera bien sûr plus important, de nombreux professeurs seront en sous service ou non renouvelés" . D'après leurs calculs, ce serait plutôt "14 % des effectifs qui seront impactés pour la structure, pourtant bien indépendante, de l’enseignement professionnel Victor Louis".
Contacté par France 3 Aquitaine, le rectorat répond que l'élaboration de la carte des formations professionnelles est le résultat d'un "long travail d'analyse et de concertation avec les établissements, inspecteurs, organisations syndicales et les branches professionnelles".
L'instruction en cours s'inscrit dans un processus réfléchi et concerté de l'offre de formation sur le territoire visant à mieux adapter l'offre de formation aux besoins.
Rectorat de Bordeaux
Les 25 professeurs qui ont prévu de faire grève ce jeudi 12 décembre attendent toujours des explications sur cette perte d'effectifs dommageable, selon eux, pour les élèves mais aussi sur des métiers en évolution auprès des jeunes enfants et personnes âgées.