Météo France annonce une nuit particulièrement froide entre mardi et mercredi, avec des températures négatives. En Gironde et en Lot-et-Garonne, les agriculteurs se préparent à affronter le gel, quitte à veiller toute la nuit.
Dans le Libournais, une parcelle de plusieurs hectares de merlot et de cabernet franc couvre le plateau de Néac, en proie au vent. "C'est une parcelle qualitative, mais aussi la plus exposée au vent. Les températures peuvent chuter brusquement : en une heure, on peut perdre 3 ou 4°C," souligne Julien Noël, directeur des vignobles Moncets & Chambrain. Cette parcelle bio a partiellement gelé quatre fois en sept ans, entraînant jusqu'à 80 % de pertes de récolte en 2017 et 2021.
Ici, les équipes du vignoble se préparent à une nouvelle nuit de gel de 4 au 5 avril, "la dernière de l'année 2023" espère-t-on. "Il est annoncé des températures légèrement négatives cette nuit, jusqu'à -2°C sur le secteur de Lalande-de-Pomerol, ce qui peut être problématique sur nos débourrements sur les parcelles de merlot," confie le directeur.
Des éoliennes et des bougies
Le plan anti-gel a été lancé. "Tout le staff permanent des vignobles est prévu sur site à partir de 2-3 heures du matin et on va lutter jusqu'au lever du jour pour cette nuit," souligne Julien Noël. Dès 2 heures du matin, trois éoliennes vont même être mises en route pour chauffer la parcelle, appuyées par des bougies alignées le long des vignes.
Ce sont des éoliennes de 12 mètres de haut qui vont brasser de l'air sur une superficie de 5 à 6 hectares à 360° autour d'elles. Le moteur de l'éolienne, alimenté par du GNR, va dégager de la chaleur et faire tourner les pales de l'éolienne, qui vont ensuite projeter ces calories tout autour du site.
Julien Noëldirecteur des vignobles Moncets & Chambrain
Laisser faire la nature
Dans le Lot-et-Garonne, Jean-Philippe Bayol fait la ronde dans son verger de pruniers, auréolé de magnifiques fleurs blanches en ce début avril. L'agriculteur s'inquiète de perdre, à cause du gel, une partie de sa production partie sur un très bon pied cette année. "La floraison est très rapide, ce qui est bon signe pour une bonne récolte au mois d'août. (...) Cette nuit, c'est passé, mais demain matin ça va être le plus critique. C'est quitte au double : il ne faut pas que le froid arrive tôt dans la nuit," juge-t-il.
Encore hanté par la production "catastrophique" de 2021, cet agriculteur a décidé de ne pas toucher à ses sols pour limiter le gel tant que possible. "On ne coupe pas l'herbe pour éviter une puissance de gel, on n'a rien désherbé. On n'a pas de moyen d'aspersion ou de ventilation pour chauffer. Les tours antigel, c'est un investissement, il faut le prévoir sur cinq ou six ans." À défaut, il a décidé de laisser faire la nature.
Le fruitier reste plutôt positif quant à cette nuit d'avril, mais avoue qu'il dormira sur ses deux oreilles une fois les saints de glace passés.