La pêche à la lamproie, traditionnelle du sud-ouest, pourrait bien vivre ses dernières heures pour les pêcheurs amateurs qui n'ont plus le droit d'utiliser de filets dérivants. Une décision prise pour protéger l'espèce, mais qui, estiment-ils, met leur activité en péril.
Pour Régis Larrue, la saison de la pêche à la lamproie est terminée avant même d'avoir commencé. Au printemps, le pêcheur de lamproie va devoir remiser son filet dérivant, désormais interdit aux amateurs. Une décision prise fin octobre par le Comité de gestion des poissons migrateurs, qui souhaite ainsi préserver la ressource. Les professionnels, eux, ne sont pas concernés.
Des restrictions pour les pêcheurs amateurs
Régis Larrue a fait les comptes, soigneusement consignés sur son carnet de prélèvement. "L'an dernier, en mars et avril, je suis sorti 14 fois avec mes filets dérivants. J'ai attrapé 106 lamproies", dénombre-t-il. Des poissons réservés à la consommation personnelle, interdits à la revente. "Sur la Garonne, nous sommes douze amateurs et quatre ou cinq professionnels à pratiquer au filet dérivant. Sous prétexte principe de précaution, on nous interdit, uniquement à nous les amateurs. Cette année, il y a eu 70 000 lamproies d'attrapées, dont seulement 10 % l'ont été par nous, les pêcheurs amateurs", se désole-t-il.
Pour autant, les professionnels ne sont pas épargnés par les nouvelles restrictions, et notamment l'interdiction de la pêche entre le bec d'Ambès et la mer. Quant à la pêche sur la partie fluviale de la Garonne et la Dordogne, elle a vu sa saison raccourcir et passer de quatre à deux mois. Les pêcheurs le savent : la lamproie est menacée. "Tout le monde s'accorde à dire que sa population est diminution, au moins dans la partie qui se reproduit, donc il faut agir, avance Jean Martin, responsable technique de la fédération de pêche de Gironde. L'idée, c'est de réduire d'à peu près 45 % les prélèvement effectués par les pêcheries".
La menace du silure
Gilles Adam est expert en poissons migrateurs auprès de la DREAL en Nouvelle-Aquitaine. Il rappelle qu'une autre menace plane sur le poisson prisé des Bordelais : le silure. Ce gros poisson d'eau douce est particulièrement friand des lamproies. Et ses dégâts sont mesurables.
Les études récentes nous montrent qu'il y a une très forte prédation par les silures sur les lamproies marines, sans doute plus forte que le prélèvement par la pêche.
Gilles Adam, expert en poissons migrateurs auprès de la DREAL en Nouvelle-Aquitaine.France 3 Aquitaine
Le plan du Comité de gestion des poissons migrateurs prévoit donc également d'introduire des lamproies, en amont. "L'idée est de maintenir une partie de la pêche, pour pouvoir récupérer des lamproies et les transporter vers des sites sur lesquels il n'y a pas de prédation par les silures. Elles seront préservées et pourront se reproduire". Ailleurs, d'autres décisions plus radicales sont prises. Ainsi dans le sud de l'Aquitaine, la pêche à la lamproie devrait être prochainement totalement interdite, toujours, dans le but de préserver l'espèce.