C'est une exposition un peu particulière où les visiteurs sont invités à palper les sculptures présentées. Les yeux bandés, ils appréhendent les œuvres autrement. Tous les sens sont en éveil et l'approche de la culture s'en trouve transformée.
"N'hésite pas à me décrire ce que tu ressens", dit d'une voix douce Anaïs Umba Wa l'animatrice de cet atelier. La petite fille a plongé ses mains à travers un rideau noir. Derrière celui-ci se cache une sculpture. Seules ses mains sont là pour la guider et tenter à quoi elle ressemble et en quel matériau elle est faite. Ils seront une quinzaine ce matin-là, enfants et parents, à se prêter au jeu.
"Prière de toucher" est le nom de cette exposition itinérante proposée en ce moment par la galerie des Beaux-Arts. Six sculptures ont été prêtées par différents musées du pays. Toutes ont été reproduites pour des raisons évidentes. "C'est de la résine et là par exemple, on a de la poudre de marbre qui est mélangée pour qu'on ait vraiment cette approche au plus près de la matière", explique Anaïs Umba Wa. "Sinon, pour celle qui est en bois de noyer, la reproduction est faite aussi en bois de noyer ".
"D'habitude, on touche avec les yeux"
"J'ai bien aimé toucher", sourit Hugo. "D'habitude, dans les musées, on ne peut pas toucher. On touche avec les yeux. Là, c'est bien". Hugo a le sentiment qu'il a perçu plus de formes qu'il n'en aurait perçues avec ses yeux. Antoine, son ami, est clairement content. "Moi, j'aime bien apprendre des choses", dit-il. "Et là, j'ai appris pas mal de choses".
Une exposition pensée pour les personnes malvoyantes et non voyantes
"On peut voir des dispositifs qui ont été pensés pour les personnes malvoyantes ou non voyantes", explique Anaïs Umba Wa. "Pour une fois, elles n'ont pas besoin de demander de dispositifs spéciaux quand elles arrivent à l'entrée du musée. Parce qu'il sait que cette exposition, elle a aussi été pensée pour eux avec, entre autres, un dispositif olfactif. Mais au-delà de cela, l'exposition est pensée pour tous les publics".
"Car un public qui n'a pas l'habitude d'aller dans un musée des Beaux-Arts et qui n'y connaît rien, là il repart avec une expérience sensorielle".
Anaïs Umba Wa
Toucher... Mais aussi sentir !
L'exposition s'articule autour de plusieurs modules. Pour une approche globale de la sculpture. Existe notamment un atelier autour des outils qui permettent de sculpter et des explications sur les différentes matières. Ainsi, les enfants comprennent que le bronze ne se taille pas, mais qu'il se fond. Vient une étape surprenante où ils peuvent sentir l'argile, la pierre ou le bronze. "Les enfants disent souvent que le bronze a la même odeur que leur papa", sourit l'animatrice. Au même moment, un peu plus loin, le petit Raphaël, 7 ans, caresse une sculpture et lui délivre aussi discrètement que délicatement un baiser dans la nuque.