Quelques semaines après la fermeture de la ligne Bordeaux-Orly, les salariés d'Air France se sont rassemblés allées de Tourny pour dénoncer cette décision. Beaucoup craignent pour leur emploi, alors que la société a également pour projet de fermer ses agences physiques.
Ils étaient plusieurs dizaines, ce jeudi, rassemblés devant l'Agence Air France, allées de Tourny, en plein cœur de Bordeaux. Le rendez-vous aux salariés d'Air France a été donné par trois syndicats : la CGT, la CFDT et CFE-CGC. L'objet de leur mobilisation, c'est la fermeture de la ligne Bordeaux-Orly, actée début juillet.
Une décision prise par Air France, en contrepartie d'une aide sous forme de prêt, de 7 milliards d'euros, concédée par l'Etat. La compagnie s'est, en échange, engagée à supprimer les lignes aériennes intérieures, lorsque la durée des trajets en train est inférieure à deux heures trente.
Conséquence pour les salariés : une grosse inquiétude sur l'emploi. "Il y a 114 postes supprimés au niveau de l'aéroport et une cinquantaine au niveau de l'agence et des traitements commerciaux dans la région Aquitaine", assure Sandrine Borde Duclos, secrétaire du CSE d'Air France pour l'exploitation des courts-courriers.
La direction nous propose un plan social économique, avec un plan de départs volontaires sur l'ensemble de la compagnie. Ce plan doit supprimer 885 postes sur le court-courrier.
Si l'objectif n'est pas atteint, on nous propose ensuite des mobilités sur Paris essentiellement. Et, si les gens ne peuvent pas se déplacer sur Paris, la seule chose qu'on leur offre, c'est une sortie vers Pôle Emploi.
Et c'est bien cette perspective de licenciement économique qui inquiète. "On nous parle de mobilité mais beaucoup de salariés sont installés à Bordeaux, avec leur famille et leur conjoint(e). Ils ne vont pas pouvoir se déplacer", abonde Marc Besnault, délégué syndical de la Nouvelle-Aquitaine pour la CFDT.
La compagnie a déjà connu six plans de départs volontaires. Un septième plan, pardonnez-moi le mot, mais c'est idiot ! Tous ceux qui ont voulu partir de la société l'ont déjà fait.
Craintes pour le tissu économique
La ligne était empruntée par quelques 560 000 passagers chaque année. Une enquête a été menée en début de mois par la CCI de la Gironde auprès de 36 entreprises de l'Opération d'intérêt métropolitain (OIM) Bordeaux-Mérignac.Les deux-tiers ont déclaré avoir été impactés par cette fermeture. Plus de la moitié ont déclaré anticiper une baisse de chiffres d'affaire, quand 21% d'entre elles anticipent des licenciements.
"Reprendre la voiture pour Paris"
Marc Besnault déplore une "absence de réflexion" sur le projet. Et rappelle les difficultés d'accès à la gare Saint-Jean. "Les besoins des entreprises de la région ne seront pas satisfaits. Et sur le plan écologique, ça ne tient pas. J'entends déjà des chefs d'entreprises dire qu'ils vont reprendre la voiture pour aller à Paris. Quand il ne s'agit pas d'avions privés"."Bien sûr que le choc pour la compagnie, qui n'a généré quasiment aucun chiffre d'affaire pendant plusieurs mois est important. C'est très compliqué pour les salariés de l'escale", reconnaît le syndicaliste.
Le sentiment qu'on a, c'est que la direction utilise la crise sanitaire comme une opportunité de restructuration. Sans aucune considération ni concertation. La crise de la Covid a très bon dos.
Fermeture des agences Air France
Car au-delà de la suppression de ligne, une autre décision nationale est montrée du doigt : la fermeture annoncée de toutes les agences Air France, possiblement d'ici la fin de l'année 2020. A Bordeaux, une dizaines de salariés travaillent dans l'agence située allée de Tourny. Une pétition pour demander à la direction de renoncer à ce projet a été mise en ligne par la CFDT."On nous dit que le réseau de vente en agence n'est pas rentable, déplore Marc Besnault. Mais nous y faisons du service dans cette agence. Les gens viennent chez nous aussi pour ça, parce qu'ils ont en face d'eux un interlocuteur compétent qui peut les aider. Et c'est à rajouter au chiffre d'affaires global."
Les salariés ne veulent pas que leur compagnie devienne virtuelle. On nous parle sans cesse du monde de demain. Mais ce monde de demain, ce serait bien qu'il y ait encore des humains dedans !
Trois élus écrivent au ministre des Transports
Le député LREM de la Gironde Eric Poulliat plaide pour une "transformation progressive de la liaison" Bordeaux-Orly. L'élu a adressé une lettre à Jean Baptiste Djebbari, ministre en charge des Transports , co-signée avec Christophe Duprat, le maire de Saint-Aubin de Médoc et Jérôme Pescina, le maire de Martignas-sur-Jalles.
Ils y font part de leur préoccupation quant aux conséquences de cette fermeture de ligne sur les "grands acteurs industriels" de la région et le bassin d'emploi. "Nous souhaiterions que ce projet de suppression de la ligne Bordeaux-Orly puisse être réexaminé en prenant en compte l’ensemble des intérêts économiques et sociaux qui sont en jeu", écrivent-ils.