Alors que les auto-écoles ont repris leur activité à plein régime, elles se heurtent à un manque de places d'examen au permis de conduire (Il en manquerait 6000 pour le permis B, 1.000 pour la moto en Gironde) et dénoncent des dysfonctionnements de l'Etat.
C'est un coup de klaxon adressé à la Préfète de la Gironde et au Président de la République. Deux lettres distinctes envoyées vendredi dernier pour les alerter sur une situation qu'ils estiment inacceptable. L'Union nationale intersyndicale des enseignants de la conduite, l'Union nationale des Indépendants de la conduite et le centre de Formation moto 33 sollicitent une intervention en urgence de l'Etat.
Confinés le 16 avril, ils ont rouvert leurs écoles le 11 mai. Ils ont mis en place un protocole et ont accueilli les élèves qui auraient du passer le permis en mars et avril, et les nouveaux.
Olivier Thimothée n'a pas l'explication mais les chiffres qu'il avance parlent d'eux-mêmes : 140 places pour son école en juillet l'an dernier, 70 cette année.On s’est mis en ordre de marche. Nos salariés ont abandonné une semaine de congés cet été mais, en face, on se retrouve avec un service public dont on suppose qu'il a mis ses salariés en congés comme d’habitude l'été et qui en a sûrement d'autres en arrêt parce que déclarés personnes vulnérables à la Covid.
Le permis moto n'est pas mieux loti. Et pourtant, considéré comme "un permis de loisir", il est devenu, "un permis de première nécessité" "par manque de fluidité des villes et l’accroissement des embouteillages", précise la lettre au Président de la République.
Yann Masse, du centre de Formation moto 33 estime qu'il a une place pour 6 élèves. Lui a dépassé le stade la colère :
On est des entreprises privées au service de l’Etat. On se débrouille comme des pauvres diables face à une administration impuissante.
Depuis novembre 2015, le code a été privatisé. Les effets ont été immédiats, reconnaît Yann Masse, les délais pour passer le code fortement raccourcis. Mais parallèlement, le nombre d'examinateurs, employés par l'Etat, a chuté. Il serait à moins de la moitié du minimum vital.
Les plannings des auto-écoles sont pleins en juillet-août mais Yann Masse ne pourra proposer de place à l'examen avant septembre ou octobre pour les premiers formés. Et mieux vaut ne pas le rater. Sinon c'est jusqu'en novembre qu'il faudra patienter.Quelle entreprise peut fonctionner avec un sous-effectif de 50% ? Mais comme c’est l’Etat, ça ne pose pas de problème.
Des élèves "pris en otages", obligés de prendre des leçons supplémentaires et donc de payer plus cher leur précieux sésame. Une contradiction avec la volonté affichée d'Emmanuel Macron de baisser le prix du permis. Et ce sont auprès des moniteurs qu'ils expriment parfois leur impatience voir leur colère.
Dans leur courrier au Président de la République, l'UNIDEC, l'UNIC et CFM 33 relèvent une autre aberration.La semaine dernière, il a fallu s’y mettre à trois pour faire comprendre à un élève que ça ne servait à rien de taper sur le comptoir.
"Étant un passeport pour l’emploi, nous sommes aujourd’hui dans l’impossibilité de faciliter l’insertion sociale. Nos candidats en formation professionnelle sont prêts à passer leur examen, les entreprises sont prêtes à les recruter et nous n’y parvenons toujours pas à cause de ce manque de places d’examen"
Et de souligner que chauffeur routier fait partie de la liste des métiers en tension de Pôle emploi.
L’Etat paye les formations, des entreprises sont prêtes à les embaucher mais l'administration ne donne pas la possibilité de passer le permis.
Olivier Timothée ne croit pas qu'il faille recruter des examinateurs. Ils seraient une vingtaine en Gironde. Il faudrait, selon lui, qu'ils soient prioritairement affectés aux examens et non pas à contrôler les auto-écoles qui demandent un label ou aux centres de récupération de points, par exemple.
L'UNIDEC, l'UNIC et le CFM 33 sont d'autant plus inquiets que le nombre de places à l'examen allouées est calqué sur l'année précédente. Pour sortir de cet imbroglio kafkaïen, Olivier Timothée propose de recourir aux forces de l'ordre qui pourraient ponctuellement faire passer l'examen et pourquoi pas à moyen terme de le privatiser. "Avec un cahier des charges précis, des entreprises indépendantes seraient tout en fait en mesure de le faire"
A ce jour, leurs deux courriers sont sans réponse. L'UNIDEC, l'UNIC et le CFM 33 espèrent rencontrer la Préfète de Gironde et obtenir des places supplémentaires cet été.
Voyez le reportage de Marie-Pierre d'Abrigeon et Ludovic Cagnato :