Gironde : après les incendies, ces propriétaires forestiers tentés par la rente du photovoltaïque

De nombreux propriétaires forestiers ont été approchés par des sociétés cherchant à installer des fermes photovoltaïques sur les parcelles brûlées. La location pourrait leur rapporter gros. Alors qu'ils n'ont pas les moyens de replanter.

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Anne et Line sont voisines à Landiras. Toutes deux propriétaires de parcelles de forêt en grande partie dévastées par les flammes.

Elles nous y emmènent. La forêt est clairsemée. Quelques pins encore sur pied subsistent. Mais pas pour longtemps.

Les scolytes sont déjà là. Ils ont commencé à attaquer les troncs affaiblis par le feu.

Le coût trop élevé de la replantation

"On va finir de couper les arbres, puis il faudra dessoucher et replanter dans deux ans au minimum", explique Line Baraduc, propriétaire de 35 hectares de terre.

"Mais je n'aurais pas les moyens pour ça" ajoute t-elle, "les revenus de la vente des arbres brûlés ne suffiront pas".

Pour tout replanter ça me reviendrait à environ 20 000 euros. Je ne prendrai pas sur ma retraite pour investir cette somme

Line Baraduc - propriétaire forestier à Landiras

source : France 3 Aquitaine

Tout laisser en friche ou se laisser tenter par la location de ses terres ? "Si je suis sollicitée je verrai, ce serait peut-être une solution". Line ne veut pas laisser des ruines à ses enfants.

La tentation du photovoltaïque

Anne Amélie a, elle, déjà été approchée par des investisseurs. Intéressés par une partie de ses 125 hectares de terrain pour y installer une ferme photovoltaïque.

"Ils m'ont dit qu'il fallait une parcelle minimum de 10 hectares, j'en ai une qui fait 14 et qui n'est pas en bordure de route donc ça n'abîmerait pas le paysage" précise la sexagénaire.

Ils ne plantent pas des plots mais des piquets et au bout de 20 ou 40 ans suivant le contrat, soit on les garde, soit on les enlève.

Anne Amélie - propriétaire forestier à Landiras

source : France 3 Aquitaine

Elle non plus affirme ne pas avoir les moyens de replanter. 

"C'était pas mon objectif au départ mais je n'ai pas le choix. Parce que planter c'est une chose mais il y a l'entretien derrière, c'est lourd. Par exemple pour une parcelle de 54 hectares ça m'a coûté environ 60 000 euros au total.

Si je replante je ne pourrais l'amortir que dans 15 ans

Anne Amélie - propriétaire forestier

France 3 Aquitaine

"Je ne peux pas replanter 110 hectares, ce n'est pas possible". 

Une rente conséquente

Le photovoltaïque lui permettrait d'obtenir une rente annuelle conséquente. Entre 1000 et 3000 euros l'hectare en moyenne par an. Plutôt tentant.

Stéphane Latour, à la tête de Fibois, la filière Forêt Bois Papier de Nouvelle-Aquitaine, reconnaît qu'il y a en ce moment "une certaine pression pour défricher".

Mais ce ne sont pas les propriétaires qui décident.

Il faut obligatoirement une autorisation préfectorale pour changer la destination du terrain et éventuellement installer des panneaux photovoltaïques.

Stéphane Latour - directeur Fibois, interprofession filière bois Nouvelle-Aquitaine

source : France 3 Aquitaine

Les arbitrages s'annoncent compliqués mais pour Stéphane Latour, le plus important est de maintenir la surface forestière, "coûte que coûte, pour la biodiversité et pour l'économie de l'ensemble de la filière".

La forêt fixe le carbone et participe à la lutte contre l'effet de serre. C'est déjà une filière très vertueuse. La remplacer par une autre filière énergétique pour combattre le réchauffement climatique, je ne suis pas certain que ce soit un plus.

Stéphane Latour - directeur Fibois, interprofession filière bois Nouvelle-Aquitaine

source : France 3 Aquitaine

Temporiser

Le maire de Landiras veut, lui, rester vigilant et temporise.

Sa commune a été au cœur d'un des plus gros incendies de ces dernières années avec près de 20 000 hectares de pins dévastés.

Il sait que ses administrés n'auront pas les moyens de replanter si les pouvoirs publics ne les aident pas.

"Et puis, qui dit qu'ils ne seront pas de nouveau victimes d'une tempête ou d'un autre feu ? Ils ne sont pas sûrs du retour sur investissement". 

Le photovoltaïque ? "Pourquoi pas", dit-il, "je ne suis pas contre, il faut bien des énergies renouvelables. Mais pas n'importe comment, n'importe où"

Pas 3 hectares d'un côté, 10 de l'autre. Eventuellement une ferme photovoltaïque de x hectares, mais c'est tout

Jean-Marc Pelletant - maire de Landiras

source : France 3 Aquitaine

Jean-Marc Pelletant compte sur l'Etat et la Région pour mettre en place des schémas directeurs et indiquer les emplacements possibles. "On contactera alors les propriétaires concernés" assure t-il.

Mais l'élu veut avant tout préserver cette forêt des Landes de Gascogne. "C'est une des plus belles d'Europe.

On a vu comment le sud-est de la France a été défiguré par les constructions avec maintenant des feux et des inondations à répétition On ne va pas refaire la même chose dans le sud-ouest, on veille au grain

Jean-Marc Pelletant - maire de Landiras

source : France 3 aquitaine

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