Bâti dans les années 60, le Signal vit ses dernières heures à Soulac. Le démantèlement de l’immeuble est lancé ce vendredi 3 février en présence de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et de Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’Écologie.
Les engins de démolition sont installés, prêts à démanteler le bloc de béton et ses 78 appartements décharnés ce vendredi matin 3 février. Tout un symbole qui vaut bien le déplacement des représentants du gouvernement, Christophe Béchu et Bérangère Couillard, à son chevet.
Le Signal incarne l’érosion du littoral et ses effets sur les côtes françaises. "Les experts nous disent qu'en fonction du nombre de degrés dont la planète va augmenter, on aura de 30 à 60 à 120 centimètres de montée des eaux dans notre pays. Ce sont 975 communes en France qui a un titre ou à un autre vont être concernées et aussi 50 000 logements, 750 entreprises", rappelle le ministre.
Ici, la mer grignote chaque année quatre à cinq mètres en moyenne sur cette plage. L'immeuble abandonné est rattrapé par la mer. Seul rescapé d’un programme ambitieux d’urbanisation côtière, qui ne sera pas allé au bout, après la faillite du promoteur.
On est loin de la résidence construite en 1967, face au phare de Cordouan, à 200 mètres des vagues, et dont les propriétaires des logements avaient pensé avoir trouvé leur petit coin de paradis. Les balcons sur la mer de cette résidence de quatre étages leur promettaient des vacances pas très chères.
La dune grignotée par les tempêtes
Ces derniers ont dû se résoudre à quitter les lieux, pour leur sécurité, il y a une dizaine d’années. C'était le 24 janvier 2014, sur ordre de la préfecture. Le début pour eux d’un long calvaire et d’un bras de fer judiciaire et financier. L'érosion dunaire n'étant pas prise en compte dans le Fonds Barnier pour les victimes des catastrophes naturelles. Ils refuseront le million et demi d’euros proposés par l’État et se retrouveront confrontés à un vide juridique.
C’est un amendement à la loi Barnier qui finira, 10 ans plus tard, par débloquer la situation. En décembre 2019, l’Assemblée nationale vote une enveloppe de 7 millions d’euros, soit 70 % de la valeur d’origine des appartements.
La phase qui s'ouvre maintenant, c'est la destruction physique
Frédéric Boudeau, directeur général de services de la communauté de communes Médoc AtlantiqueFrance 3 Aquitaine
C’est la communauté de communes Médoc Atlantique, désormais propriétaire du bâtiment qui lance les travaux. Quelques anciens résidents sont là pour un dernier adieu et fermer définitivement la page.
Le chantier devrait durer trois semaines. Et la verrue, comme beaucoup l’appellent, dans la petite ville de 3350 habitants, aura disparu. "La phase qui s'ouvre maintenant, c'est la destruction physique", a expliqué Frédéric Boudeau, le directeur général de services de la communauté de communes Médoc Atlantique.
Construit sur la dune littorale et rattrapé par l’océan, son démantèlement devenait urgent. La bande de sable qui le séparait de l’océan ne mesure plus qu’une dizaine de mètres. En moins de 60 ans, la multiplication des tempêtes et l'érosion dunaire ont contribué à réduire son avenir à néant. Xynthia et sa violence en 2010, lui ont porté un coup fatal. Les opérations de rechargement en sable n’y changeront rien. La ville a dû réaménager son front de mer. Elle a construit dans les années 90 l'épi Barriquand, un épi de rochers, "pour contrôler et contenir le risque érosif".
Comment éviter un autre Signal
Soulac-sur-mer ne fait pas exception. Un total de 20 % du littoral français serait soumis à l’érosion. 864 communes de bord de mer sont menacées. Un phénomène qui les oblige à déployer une stratégie de long terme. Elles peuvent, grâce à la loi climat et résilience, bénéficier d'aides financières et techniques pour anticiper les risques, mais seules 126 en ont fait la demande. La question du financement n’est toujours pas actée.
Reste qu’à partir du 6 février 2023, le signal sera démonté pièce par pièce. La façade nord-est du bâtiment sera la première à tomber.
D'ici à trois mois, la nature devrait commencer à reprendre ses droits et la biodiversité se réinstaller. À la place de l’immeuble, la communauté de communes Médoc Atlantique imagine une promenade côtière et des panneaux pédagogiques pour ne pas oublier et prévenir les générations futures.
C'est la fin d'un long feuilleton et d'un bras de fer judiciaire relaté par Hélène Chauwin sur des images d'archives de France 3 Aquitaine.