Les forêts sont des écosystèmes en première ligne face à une bonne gestion de l'eau. Les propriétaires forestiers peuvent mettre en oeuvre des pratiques très simples, pour obtenir une eau de bonne qualité, en quantité.
En ce mois de juin aux températures élevées, la question de la gestion de l'eau se pose avec acuité. Au sein des écosystèmes forestiers, des bonnes pratiques peuvent déjà être mises en oeuvre. Une nécessité pour maintenir une quantité d'eau suffisante et de bonne qualité.
Les acteurs de l'eau et des forêts se sont réunis à Nedde (Haute-Vienne). Objectif : mettre en commun leurs réflexions sur le sujet de la gestion de la ressource en eau. Les milieux aquatiques, comme les zones humides, sont aussi concernés. L'adaptation de la gestion sylvicole est donc essentielle, et demande aux propriétaires forestiers de changer leurs pratiques.
Une réunion inédite pour les acteurs de l'eau et des forêts
Certains ont déjà mis en place plusieurs pratiques afin de conserver la ressource en eau. Au lieu-dit Chez-Thivaud, près de Nedde, une exploitation sylvicole a fait le choix de la culture à couvert continu. Celle-ci s'appuie sur les processus naturels de la forêt pour garantir un rendement économique. "Le credo du propriétaire c’est de ne jamais faire de coupe rase, quand c’est possible, sauf cas extrême", explique Olivier Ziappa, animateur de la charte forestière pour le Parc naturel régional de Millevache. "Il a favorisé les travaux d’éclaircissement, donc un travail en forêt continue, et aussi le mélange en favorisant les arbres d’avenir."
Les arbres qui doivent être conservés sont ainsi marqués d'un symbole bleu. Un signal à l'attention des bûcherons qui doivent laisser l'arbre intact. "Le fait d’avoir eu moins de passages de machines, l'eau a pu s'infiltrer dans le sol. On a maîtrisé cette quantité mais aussi celle de l'eau qui reste en surface", détaille Olivier Ziappa. Sur ce site reconnu d’intérêt écologique majeur, les bois morts et les gros bois sont eux aussi conservés. Des atouts pour le maintien à long terme de la biodiversité.
Cette réflexion commune arrive à un moment clé pour les propriétaires forestiers. "La forêt est soumise au changement climatique de façon assez sévère et on arrive à une situation où les boisements arrivent à maturité économique, notamment sur la partie amont du bassin de la Vienne", explique Stéphane Loriot, directeur de l'Etablissement public territorial du bassin de la Vienne.
Une évolution nécessaire des pratiques
Conséquence : de nombreuses coupes à venir dans les prochaines années, et des risques potentiels pour la gestion de l'eau. "Le débardage, le déplacement des arbres abattus, ou le dessouchage, peuvent générer des problèmes de pollution de l’eau", énumère Stéphane Loriot. "Les chantiers peuvent déstabiliser les lits des cours d’eau. L'eau peut s’éparpiller dans les milieux et accentuer encore les déficits existants sur l’hydrologie des cours d’eau."
Une mauvaise gestion de l'eau peut affaiblir la biodiversité et altérer la qualité de l'eau. Les conséquences touchent aussi l'activité humaine : augmentation des coûts des opérations de dépollutions, une moindre possibilité d'abreuvement du bétail et réductions des activités nautiques, d'après ce guide des bonnes pratiques sylvicoles.
À cela s'ajoute une occupation importante des sols par la forêt, parfois plus de 50% sur certaines communes. Les acteurs de l'eau et des forêts doivent donc anticiper pour éviter de futurs effets négatifs. "Il est impératif d’échanger avec les acteurs forestiers pour aboutir à une gestion la plus respectueuse possible notamment des milieux aquatiques", souligne Stéphane Loriot.
Agir à court terme et à long terme
Il s'agit aussi d'élargir le périmètre du Schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) du bassin de la Vienne. Ce document s'applique dans un périmètre de 7060 km2, sur les départements de la Corrèze, la Creuse, la Haute-Vienne, la Charente et la Vienne, ainsi que de l’Indre-et-Loire. Le SAGE est un outil de planification pour une gestion équilibrée et durable de l'eau et des milieux aquatiques. Le SAGE s'impose aux pouvoirs publics dans les prises de décisions relatives aux écosystèmes aquatiques et à la gestion de la ressource en eau.
Un bon accompagnement des propriétaires forestiers est alors primordial pour garantir des bonnes pratiques dans les prochaines années. Le Centre national de la propriété forestière les accompagne dès le diagnostic, alors que la propriété forestière reste morcelée. Mais attention, "l'impact est très durable. Avant de se dire que l'on va couper tel arbre, il faut se poser la question de ce que l'on souhaite derrière, car toute opération n'est pas réversible", prévient Dominique Cacot, ingénieure pour le Centre national de la propriété forestière.
Une évolution des pratiques est déjà en cours : "Les propriétaires forestiers se forment à ces questions, il y a une adaptation du matériel et de leurs interventions", mentionne Dominique Cacot. "L'enjeu est vraiment celui de l'information : les problèmes les plus forts existent à cause d'une méconnaissance de la réglementation et des milieux naturels."
Des moyens d'action simples sont déjà à la disposition des propriétaires forestiers. Ils peuvent utiliser des kits amovibles pour franchir un cours d'eau. Lors des opérations d'éclaircissement, la machine peut aussi rouler sur les branches coupées pour éviter l'érosion du sol.