À 91 ans Guy-Maurice Chouly, a connu le maquis du limousin, les cosmonautes soviétiques et la répression policière pendant la guerre d'Algérie. Une vie riche, reflet de l'histoire contemporaine française, qu'il raconte sans détour dans un livre. Nous l'avons rencontré chez lui à Saint-Junien (87).
Il est des hommes dont l'existence est intimement liée à l'histoire de leur pays , Guy-Maurice Chouly est de ceux là.
Né en 1930 à Sarlande à la frontière entre la Dordogne et le Limousin, il n'a qu'une dizaine d'années, quand lui et ses quatre frères voient débarquer les premiers maquisards à la ferme familiale.
"Mon père, chaque nuit, partait avec le passe-partout, la hâche, dans la nuit. Ils allaient couper des arbres, couper les poteaux téléphoniques, pour faire en sorte de bloquer autant que faire se peut, la circulation des miliciens. On voyait tout ça, on vivait tout ça," se souvient Guy-Maurice Chouly.
On n'a jamais parlé, même sous les gifles des miliciens.
La guerre finie, Guy-Maurice, dit Bichou monte à Paris pour y travailler en tant qu'ébéniste. Syndicaliste et communiste, il est élu adjoint au maire de Romainville( 93) en 1959. Un poste qui l'amènera à côtoyer quelques grands noms de l'ère soviétique.
"J'ai eu la responsabilité officielle de la part de la municipalité de Romainville, d'aller accueillir le cosmonaute soviétique Pavel Popovitch au Bourget. On avait réussi à l'accueillir pour qu'il vienne inaugurer la cité Gagarine."
Peu de temps avant il s'était engagé avec le comité de la paix alors que la France était en pleine guerre avec l'Algérie. Le 8 février 1962 il fait partie du cortège mortellement réprimé rue de Charonne à Paris. Une manifestation en faveur de l'indépendance de l'Algérie, au cours de laquelle plusieurs manifestants se sont réfugiés dans une bouche de métro, entraînant une bousculade où 9 personnes ont perdu la vie.
"J'ai été blessé à l'arcade soucrilière, au maxillaire, au poignet, qui me fait toujours mal. J'ai réussi à passer sous un bus qu'ils avaient stoppé, et j'ai traversé la rue Charonne, j'ai été accueilli sous un porche. J'entends toujours : "encore un blessé". On m'a monté au troisième étage, et deux jeunes tunisiens qui faisaient de la médecine m'ont pris en charge."
Dans les années 90 Guy Maurice prend sa retraite, 10 ans plus tard il rencontre Simone, sa nouvelle compagne, avec qui il s'installe à Saint-Junien. C'est elle qui va le pousser à écrire ses mémoires.
"Elle a tendu l'oreille, comme s'il s'agissait d'un vieux soldat. Ce qui est extraordinaire c'est que j'ai pu me remémorer beaucoup plus facilement ce que j'avais vécu. Tout ce que j'ai écrit c'est ce que j'ai vécu de A à Z."
Une volonté de retransmettre qu'il n'est pas près d'abandonner. Bichou planche déjà sur l'écriture d'autres histoires familiales.