Une enquête publique a été ouverte ce lundi pour permettre aux habitants d’exprimer leurs avis sur ce projet polémique. Le groupe agroalimentaire français T’Rhéa devrait, en effet, racheter une exploitation agricole sur la commune de Peyrilhac. Il prévoit de doubler la capacité actuelle du site pour atteindre les 3 100 bovins.
En plein cœur de la Haute-Vienne, à Peyrilhac, village de 1 200 habitants, une petite affiche crée la polémique. Elle présente le projet d’une ferme de 3 100 bovins à proximité de la ville. Ce centre d'engraissement prendrait place sur une exploitation déjà existante, celle d’un agriculteur détenant actuellement 1 500 bêtes.
Emmanuel Thomas, 65 ans, assure cultiver sans pesticides. Sur ses 1 500 vaches, 600 peuvent vivre en extérieur. L'agriculteur l’affirme : même en doublant la capacité du cheptel, son modèle ne changera pas. “Ne peut-il pas y avoir des petites fermes, des moyennes fermes et des plus grosses qui soient bien faites ? Plus une ferme est importante, plus elle est contrôlée”, explique-t-il à nos confrères de France 2 début mars.
Un repreneur qui fait débat
L’agriculteur compte vendre son exploitation à un groupe agroalimentaire français, T’Rhéa. Dans ce nouveau projet, l’entreprise se veut rassurante. Six cents animaux devraient continuer à rester en extérieur. “Il n’y aura pas 3 100 animaux présents sur l’exploitation simultanément. Il va avoir une rotation sur l’ensemble de la ferme”, détaille Pascal Nowak, chargé de mission développement du territoire chez T'Rhéa. “Ils vont laisser les arbres, les haies, les clôtures, c’est important pour moi qui suis attaché à ma région”, conclut Emmanuel Thomas.
T’Rhéa garde le cap et ne souhaite qu’apporter des modifications à l’exploitation actuelle grâce à la réhabilitation de hangars en étables, ou encore, la construction d’un réservoir d’eau. Pour éviter d’entasser tout le bétail au même endroit, l'entreprise a prévu de répartir la totalité des vaches sur trois communes.
Des habitants inquiets
Dans la boucherie du coin, les habitants sont dubitatifs. “Je prône une agriculture écoresponsable, 3 000 bêtes, ça me semble beaucoup”, s’exclame un client. “Sur le marché du petit producteur qui ne vend que dix bêtes, comment voulez-vous vous en sortir”, se plaint un autre habitué de la boucherie.
De son côté, la Confédération paysanne rejette en tout point ce projet. Selon ses représentants, le modèle économique présent ailleurs en Europe ne doit pas se répercuter sur le sol français. “Au-delà du problème de la quantité d’animaux, qui va maîtriser les capitaux de cette ferme ? Ce ne seront plus des paysans, mais des industriels”, clame Philippe Babaudou, porte-parole de la Confédération paysanne en Haute-Vienne.
Quel impact environnemental ?
Malgré les garanties présentées par T’Rhéa, certains éleveurs ne sont pas rassurés quant à l’impact environnemental d’une telle exploitation. Catherine Friconnet est propriétaire d’un étang de carpes non loin de l’exploitation. L’hiver dernier, avec les fortes pluies, de l’eau a ruisselé depuis la ferme juste au-dessus. “Si des matières organiques se déversent dans notre étang, la survie des poissons est en péril”, explique l’éleveuse, inquiète de la contamination par fumier.
“L’inquiétude des habitants repose principalement autour des enjeux environnementaux et des nuisances sonores”, précise Claude Compain, maire de Peyrilhac, que nous avons joint par téléphone, ce lundi 11 mars.
“Les habitants pensent que les 3 000 bovins seront au même endroit. Mais comme l’a précisé T’Rhéa, ils seront répartis sur quatre sites”, poursuit-il. Avant de préciser qu’il allait suivre de près le dossier du bien-être animal, mais également du transport des bovins sur la voirie qui pourrait perturber le trafic.
Autre sujet de discorde évoqué par les habitants dans le reportage de nos confrères, la construction d’un bassin de stockage des eaux résiduelles destiné au bétail. Sera-t-il suffisant pour nourrir quotidiennement 3 100 vaches dans une région qui connaît des épisodes de sécheresse ?
Une consultation publique ouverte
Une enquête publique a été ouverte ce lundi 11 mars et s’étendra sur un mois. Le maire de Peyrilhac nous confirme être présent aux côtés d’un commissaire enquêteur pour répondre aux questions des habitants. "L’enquête publique va servir à faire remonter tous les questionnements, a indiqué Claude Compain.
Durant cette consultation publique, tout habitant pourra se rendre à la mairie de Peyrilhac et de Nieul afin de consulter le dossier. Trois permanences auront également lieu. Un temps de parole sera donné à chaque personne souhaitant s'intéresser au projet.
Récit avec S. Lanson (France 2)