Les militants de l’association Chabatz d’Entrar se relaient pour qu’ils ne dorment pas dans la rue.
Il est 19 heures. Comme chaque soir depuis l’expulsion des squatteurs de la 4 bis rue de la Révolution à Limoges, les militants du collectif Chabatz d’Entrar sont réunis. Ils s’organisent pour héberger une quarantaine de personnes qui se retrouvent à la rue.
La plupart de ces réfugiés ont reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et/ou une interdiction de retour (IRTF). Ils ont 30 jours pour partir, sans quoi les autorités pourront les assigner à résidence ou les placer en centre de rétention à Bordeaux ou Toulouse. Ils effectuent en ce moment des démarches pour obtenir l’aide juridictionnelle qui leur permettra de payer un avocat pour contester les OQTF et IRTF.
Maître Blandine Marty, avocate au barreau de Limoges, se dit très déçue par cette situation. Seuls 20 adultes et 16 enfants ont été régularisés parmi les 100 réfugiés du squat.
On pensait qu’il y aurait plus de régularisations. La préfecture n’a proposé que très peu de solutions de relogement pour les gens qui n’ont pas été régularisés durablement. Il y a eu un chantage fait sur l’aide au retour. On demandait la régularisation de tous les habitants du squat.
La préfecture de la Haute-Vienne n’a pas souhaité répondre à nos questions, nous renvoyant sur ce communiqué de presse publié le 9 juillet 2021.
Solidarité
Une douzaine de militants de Chabatz d’Entrar se relaient donc depuis l’expulsion pour que les 40 réfugiés sans solution de relogement ne dorment pas dans la rue.
Nolwenn a 21 ans. Elle est sans emploi. Il y a quelques jours, elle n’a pas hésité à accueillir 5 personnes qu’elle ne connaissait pas à son domicile. Elle leur a même donné un double des clés de sa maison. Son ami est venu dormir chez elle, ce qui l’a beaucoup sécurisée : « Ca me tenait à cœur. Je trouve que l’expulsion du squat est indécente et inadmissible. Tout s’est fait dans l’urgence. C’est le minimum que l’on puisse faire. »
Juridiquement, Nolwenn ne risque rien tant qu’elle loge des migrants à titre humanitaire, sans leur demander de contrepartie. "Le principe de fraternité" a été entériné par la justice française après la jurisprudence Cédric Herrou.
Selon Maître Blandine Marty, l’Etat n’est pas dans l’obligation de fournir un logement aux personnes ayant reçu une OQTF, sauf circonstances exceptionnelles. Ces gens n’ont donc théoriquement à leur disposition que les accueils de jours et les associations pour leur fournir de quoi manger.
Angèle coordonne chaque soir les hébergements chez les militants de Chabatz d’Entrar. Elle n’y va pas par 4 chemins : « Notre gouvernement est hypocrite sur la gestion des migrants. On laisse parfois pourrir les situations pendant 10 ans avec des gens qui travaillent et paient des impôts en France tout en attendant leur régularisation ».