Reconnue pour sa longévité, sa docilité et pour la richesse de son lait, la Bretonne Pie Noir a été mise de côté après la Seconde Guerre mondiale, au profit de vaches plus productives. Aujourd'hui, des éleveurs et passionnés tentent de la remettre sous les projecteurs en la présentant notamment au prochain Salon de l'agriculture à Paris.
Elle est reconnaissable à sa robe bicolore teintée de noir et de blanc, à ses cornes retroussées vers l'intérieur et à sa petite taille au garrot. Si la Bretonne Pie Noir a longtemps été appréciée par nos aïeux, notamment pour la richesse de son lait et sa docilité, elle a été mise de côté après la guerre au profit de races plus productives. Aujourd'hui considérée comme une espèce à très faible effectif, la Bretonne Pie Noir n'a pourtant pas prononcé son dernier mot : des éleveurs essaient de la remettre sur le devant de la scène.
Sans le savoir, Lovely est presque devenue une star dans ce paysage acquis à la cause limousine, sa principale rivale. "Elle a marqué le retour des Bretonnes Pie Noir dans la région, se réjouit Arnaud Boucher, l'un des seuls éleveurs de cette race rustique dans la région, installé à Folles. C'est la première que je suis allé chercher, c'est en quelque sorte devenu la chouchoute du troupeau", poursuit l'heureux propriétaire d'une quinzaine de femelles Pie Noir.
4 000 Pie Noir en France
À seulement neuf ans, Lovely a déjà participé à quatre Salons de l'agriculture, à Paris, où elle a été emmenée pour représenter sa race. Une tradition pour son propriétaire, qui ne manquera pas de l'emmener de nouveau porte de Versailles pour le prochain salon, qui se tient du 22 février au 2 mars 2024. "Aujourd'hui, on veut la faire voir, la montrer aux éleveurs et au grand public pour dire qu'elle existe encore", assure Arnaud Boucher.
Cette volonté de défendre les Bretonnes Pie Noir, qui ne sont plus que 4 000 en France, l'éleveur l'a eue depuis petit. "Ma grand-mère avait une ferme remplie de Limousines, se souvient Arnaud Boucher. Mais au fond des étables, il y avait une ou deux Bretonnes, que l'on appelait des Bret' ou des frissonnes."
Des années après avoir intégré le monde agricole, l'éleveur a lancé des recherches sur internet pour retrouver cette race qui a longtemps marqué son esprit.
L'ancienne première race laitière
"Pendant des années, la Bretonne Pie Noir a été oubliée, voire abandonnée, raconte Arnaud Boucher. Pourtant, avant la guerre, il y en avait partout dans les fermes françaises. C'était la première race productrice de lait, elle permettait aux familles d'avoir du beurre et du fromage."
Selon l'éleveur, à leur pic de population avant la Seconde Guerre mondiale, elles étaient presque 900 000 sur tout le territoire.
La Bretonne Pie Noir a failli disparaître.
Arnaud BoucherEleveur en Haute-Vienne
Mais au sortir de la guerre, les politiques et éleveurs ont privilégié d'autres races. "Il fallait nourrir la population donc opter pour des races plus productives comme la Limousine ou la Prim’Holstein, raconte Arnaud Boucher. Une décision qui a un coup pour la Bretonne Pie Noir : sa population diminue tellement que l'on dénombre seulement 300 individus au tournant des années 1980. En réponse, un plan de sauvegarde a été mis en place en 1976 pour tenter de sauver l'espèce.
La Bretonne Pie Noir, objet pédagogique
"Aujourd'hui, il y a une dynamique autour de la Bretonne Pie Noir, assure Arnaud Boucher. Les éleveurs travaillent pour relancer un concours national autour de cette race durant le salon parisien de l'agriculture en 2026." Selon l'éleveur, il ne faut pas oublier les concours locaux et régionaux qui permettent aussi de valoriser la race et éventuellement "permettre à des jeunes de vouloir s'installer avec cette race dans des fermes à taille humaine."
À côté de son métier d'éleveur, Arnaud Boucher est également enseignant dans un établissement agricole en Charente, la maison familiale rurale de la Péruse. "Je donne cours à 19 élèves et avec une dizaine d'entre eux, nous irons au salon de l'agriculture à Paris en 2025 pour présenter le Saint Graal de l'agriculture française, la Bretonne Pie Noir, s'impatiente l'éleveur. Les étudiants auront la responsabilité de la race pendant ces dix jours : ils devront faire des présentations au micro, nourrir les bêtes et les panser."
Directeur et élèves conquis du projet
"Ce projet est une innovation pédagogique pour mon établissement, se réjouit Dominique Antoine, le directeur de la maison agricole. Ce déplacement permet aussi aux élèves de s'ouvrir à d'autres productions, remarque-t-il, et de rendre leur apprentissage aussi dynamique comme de découvrir le luxe qu'est le Salon de l'agriculture à Paris."
"Je trouve que c'est une bonne idée de présenter cette race au Salon à Paris, salue Clotilde Sauvage, élève en classe de terminale professionnelle Conduite et gestion de l'entreprise agricole (CGEA). Ça permet de montrer aux visiteurs que la Limousine n'est pas la seule race bovine, poursuit l'étudiante. En plus, la pie Noir est rustique, docile et proche de nous. La montrer au Salon de l'agriculture est une expérience que je ne vivrai sûrement qu'une fois dans ma vie."