Le bras de fer se durçit entre la SNCF et les familles des victimes de la catastrophe ferroviaire du Paris-Limoges du 12 juillet 2013. Tandis que la compagnie remet en cause les expertises, une association réclame un soutien financier.
Entre le 29 février et 4 mars 2016, le dossier de la catastrophe de Brétigny-sur-Orge a pris une nouvelle tournure. Du côté de la SNCF d'abord : la compagnie a adressé des observations aux juges d'instruction (consultées par l'AFP), dans lesquelles elle remet en cause le scénario des experts judiciaires. "Le scénario des experts judiciaires (...) fait apparaître un certain nombre d'incohérences et de carences dans leur raisonnement", affirme l'avocat de la SNCF, Me Emmanuel Marsigny.
Un accident "imprévisible" selon la SNCF
Dans le courrier transmis à la justice, la SNCF met d'abord en cause "la qualité" du rapport, évoquant "des raisonnements incomplets", "des erreurs" ainsi qu'"un scénario" qui "ne repose que sur des hypothèses inexactes et des explications inabouties ou contestables".Elle réfute ensuite point par point les conclusions de l'expertise, illustrant son propos avec des exemples concrets et très techniques. Aux experts, qui évoquent "une danse importante" des rails, c'est-à-dire l'affaissement des voies au passage d'un train, qui aurait contribué à abîmer l'assemblage incriminé, la SNCF répond, documents à l'appui, qu'il n'y en "avait pas".
Le déraillement du 12 juillet 2013, qui reste inexpliqué, est un événement inédit, imprévisible et exceptionnel", affirme l'entreprise dans sa lettre.
Une position jugée indigne le 3 mars 2016, par des victimes de la catastrophe.
250 € pour 200 heures
Puis, le 4 mars, Me Gérard Chemla, l'avocat de l'association "Entraide et défense des victimes de la catastrophe de Brétigny" a demandé à la justice, comme il l'avait annoncé le 30 janvier 2016, que la que la SNCF prenne en charge une partie des coûts de procédure, afin de lutter "à armes égales" dans ce dossier complexe de plusieurs milliers de pages.Il estime à 200 heures, évaluées à 250 euros, le temps nécessaire pour se plonger dans la procédure avec l'aide "d'experts techniques". "Nous apprenons les choses par la presse", a-t-il noté.
Parce que le temps qu'il faudrait consacrer à ce dossier est colossal !"
Je comprends extrêmement bien la demande", "mais il n'appartient pas malheureusement au juge des référés (...) de venir palier cette carence", a estimé Me Antonin Lévy, l'avocat de SNCF Réseau, ex-RFF, en charge de la gestion de l'infrastructure ferroviaire.
Me Benjamin Van Gaver, l'avocat de SNCF Mobilités, responsable de l'exploitation des trains, a pour sa part rappelé que "3,5 millions d'euros" avaient déjà été "versés aux victimes dans le cadre de la responsabilité civile" et que plus de 55% d'entre elles avaient "été définitivement indemnisées". "Dans ces indemnités sont prévues les frais pour les avocats, pour les médecins experts", a-t-il souligné.
La décision sera rendue le 8 avril.
Le 12 juillet 2013, le déraillement du train Paris-Limoges en gare de Brétigny-sur-Orge avait fait sept morts et des dizaines de blessés. Selon les experts judiciaires, l'accident est imputable à un déficit de maintenance sur un assemblage de la voie ferrée, qui se serait progressivement désagrégé, provoquant le déraillement.