Sur les 29 000 élèves que compte l’académie de Limoges, combien feront leur retour à l’école ce mardi 12 mai ? Difficile à savoir pour l’administration, en raison notamment d’une reprise échelonnée dans le temps.
La rentrée post- déconfinement, c’est déjà demain. Mais tous les élèves ne reprendront pas le chemin de l’école dès le 12 mai. Pour autant, l’Education nationale se défend de toute improvisation.
Jean-Marc Gautier, directeur adjoint de l’inspection académique de la Haute-Vienne en charge du premier degré, poursuit : " ... et ce, avec des enseignants préparés à les accueillir"."Il y a tellement de situations diverses qu’un chiffre n’aurait pas de sens. L’important aujourd’hui c’est que les élèves soient accueillis dans le respect des règles sanitaires"
Et c’est bien là où le bât blesse. Car si la date fatidique du 11 mai était bien connue depuis quelques semaines, lors d’un discours d’Emmanuel Macron du 13 avril, ce premier jour de déconfinement rime avec la pré-rentrée des profs. Ceux-ci n’étaient donc pas autorisés à revenir en classe avant aujourd’hui. Pour beaucoup ce matin, il a donc fallu bouger les tables et les meubles, baliser, flécher les zones de distanciation, avec le plus souvent l’aide des services municipaux.
Nicolas Fontarensky, directeur des services éducation à la ville de Limoges avoue que tous les personnels sont sur le pont :
La rentrée, ou plutôt la reprise, sera progressive, mais elle aura lieu à partir du 12 mai à Limoges, le maire, Émile-Roger Lombertie s’y est engagé. La seule réserve est à chercher dans la circulaire du ministère de l’Éducation nationale qui autorise une extension d’un jour pour la reprise, après validation des demandes des équipes pédagogiques qui souhaiteraient un délai supplémentaire pour mettre en place le protocole sanitaire, soit ce jeudi 14 mai."On est dans les starting-blocks… Toutes les écoles sont prêtes, et ont été fournies en produits d’hygiène, gels hydroalcooliques ou lingettes désinfectantes".
Et le directeur des services de poursuivre :
"Pour l’instant, nous attendons la communication de l’inspection académique pour connaître cette liste d’écoles qui ouvriraient à partir de jeudi 14 mai".
Même si le déconfinement est concomitant avec le retour de l’école en présentiel, le numéro deux de l’Éducation nationale en Haute-Vienne défend "une reprise anticipée depuis longtemps avec les directives, cadrages, et traitée au plus près dans les circonscriptions par les inspecteurs".
Jean-Marc Gautier égrène ses différents points : "Politique d’accompagnement des équipes, mise en cohérence avec la question de la capacité d’accueil des écoles et sondages auprès des familles pour la reprise des cours, identification des familles ayant droit (personnels indispensables)".
Toutes ces données ont été appréhendées en amont et discutées avec les équipes pédagogiques et les mairies, en un temps record, il faut le reconnaître.
D’ailleurs le protocole sanitaire émis par le ministère, ces fameuses 63 pages de consignes et fiches thématiques, n’est pas en soi réellement critiquable selon les syndicats :
Là n’est pas le problème pour lui : "Il aurait fallu réfléchir au protocole de déconfinement avant de poser la date du 11 mai pour la reprise de l’école. C’est une situation exceptionnelle pour tous mais c’est anormal que les protocoles arrivent seulement 8 jours avant le déconfinement !"."C’est très concret, il n’y a pas de point litigieux ", selon Pascal Lavigerie, élu Snuipp87 au CHSCT.
Pour les enseignants, et notamment les directeurs d’écoles, cette phase ressemble à une course contre-la-montre, qui peut sembler insurmontable voire mission impossible.
Fabrice Prémaux, secrétaire Snuipp87, confiait avoir vu ce matin des collègues débordés, atteints psychologiquement par l’étendue de la tâche qui leur est demandée :
La pression a été, et continue, d’être la plus forte sur les directeurs d’écoles selon cet interlocuteur : "On a reçu beaucoup d’appels de directeurs hyper stressés, sollicités 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 souvent avec des transferts d’appels de leur école à leur domicile".J’ai vu certains craquer, en pleurs, il faut tout réorganiser en un ou deux jours car on ne pouvait pas être sur site avant. L’administration n’avait fourni de documents d’autorisation de déplacement à personne.
Pour les représentants du premier syndicat du premier degré au niveau national, il aurait fallu "une réelle union nationale, un accueil solidaire des enfants des professions prioritaires, c’est-à-dire soignants et personnels de sécurité."
Pour le Snuipp et Fabrice Prémaux, ce qui fragiliserait les enseignants en cette période, c’est "la question de la responsabilité qui est très prégnante. Personne ne veut faire de faux pas. Il y a un caractère de rigidité, il ne faut surtout pas commettre de faute qui puisse être imputée à soi-même."
Le 28 avril, le Snuipp a d’ailleurs lancé une alerte sociale au niveau national pour dénoncer ces dérives. Il s’agit d’un protocole normal, prélude à l’appel à la grève. Une réponse du ministère de l’Education nationale est attendue dans les heures qui suivent.