De plus en plus de couples sont concernés par des problèmes de fertilité. À Limoges, le CHU vient de devenir centre de don, pour recevoir et proposer des dons de sperme et d'ovocytes. C'est une avancée importante, alors que la loi de bioéthique élargit le champ des personnes concernées.
« C’est comme un don du sang », raconte décomplexé Vincent Chapon, jeune donneur de 30 ans rencontré pour les besoins du reportage. Surtout qu’il est déjà donneur de sang et donneur de plasma. Technicien dans l’agro-alimentaire, il vient de faire un don moins courant : un don de sperme. Il a été sensibilisé par une amie, homosexuelle qui a un désir d’enfant. Elle lui a parlé du manque de donneurs, pour l’assistance médicale à la procréation.
« Si moi je peux aider, en fonction des critères médicaux, bien sûr, si, je le ferai volontiers », confie le donneur. « Ça peut être embarrassant pour certaines personnes, je peux le concevoir, mais pour moi, c’est comme un don du sang ».
Nous visitons ce jour-là le laboratoire spécialisé du CHU de Limoges. Une biologiste masquée, les mains agrippées à des manettes reliées à des pipettes, est concentrée. Imperturbable. Un écran montre une image grossie de ce qu’elle regarde dans le microscope. Ici, c’est le quotidien. Mais l’image reste impressionnante. Nous assistons à une fécondation in vitro. À l’écran, un spermatozoïde est introduit dans un ovocyte. La rencontre va aboutir à la formation d’un embryon dont on surveille de très près les premières phases de division cellulaire.
« S’il arrive à ce stade, à ce moment-là, précise le docteur Jean-Christophe Pech, médecin biologiste au CHU de Limoges, on le transfère dans l’utérus de la patiente, en espérant que 12 jours après elle soit enceinte ».
Dans une salle stérilisée, de gros bidons blancs à couvercles bleus représentent une denrée rare dans ce laboratoire. Il faut passer par un sas pour y accéder. On n’y entre pas comme ça, il faut une blouse, porter une charlotte, un masque et isoler les chaussures. Le biologiste s’empare d’une cage fumante. Dedans, des milliers de gamètes sont déjà conservées. Mais depuis le 1er juillet 2022, le CHU de Limoges est aussi devenu centre de don.
Concrètement, pour aider les patients qui rencontrent des problèmes de fertilité, il peut recevoir et proposer des dons de spermatozoïdes, d’ovocytes ou d’embryons. C’est une avancée majeure pour l’hôpital. Mais cela répond aussi à un besoin grandissant après une nouvelle loi de bioéthique. Elle a ouvert l’assistance à la procréation aux couples de femmes et aux situations non médicales, quand on conserve ses gamètes pour un projet futur.
« La plupart du temps, c’est pas pour des raisons professionnelles. C’est plus le fait de ne pas avoir de compagnon, et d’avoir peur parce que, malheureusement, notamment chez la femme, la fertilité va vraiment diminuer à partir de 35 ans. Et les couples, maintenant, se constituent de plus en plus tard », rappelle le docteur Sophie Paulhac, responsable du laboratoire AMP au CHU de Limoges.
L’équipe du CHU lance un appel au don
Revenue à son bureau, le docteur Paulhac écume ses mails avec des candidats au don. « On vient d’avoir ce matin deux demandes d’informations », lance-t-elle à son collègue le docteur Lafontaine.
Il faut être en bonne santé, remplir des conditions d’âge, et il faut savoir que la loi permet désormais l’accès aux origines : pour les dons effectués depuis septembre, l’enfant pourra, à ses 18 ans, demander des informations sur son donneur.
« Ces informations vont être de deux natures, selon le vœu de l’enfant. Soit des informations nominatives, c’est-à-dire l’identité : nom, prénom, date et lieu de naissance du donneur. Soit des informations non-identifiantes, comme : à quoi ressemblait le donneur, qu’est-ce qu’il faisait dans la vie, quelles étaient ses motivations à faire le don », détaille le docteur Maxime Lafontaine, médecin biologiste au CHU de Limoges.
Reste à savoir si cette évolution va rebuter des donneurs. Pour Vincent Chapon, ce n’est pas un problème. Il espère un jour fonder une famille, et fait clairement la nuance avec le don.
« On est le père biologique sans être son père. Puisque pour être vraiment son père, il faut être-là, il faut accompagner l’enfant dès son plus jeune âge. Alors que moi je ne serai pas là. J’ai juste aidé à la procréation, c’est tout ».
Vincent C., donneur de sperme
L’enjeu est important : à cause notamment des perturbateurs endocriniens, la qualité du sperme est en baisse constante.
Pour donner son sperme, il suffit de contacter l’agence de biomédecine ou le CHU de Limoges.