Quand on est parent, on s’inquiète souvent de la fameuse crise d’adolescence ! Une crise qui cache parfois un mal-être profond. Il toucherait davantage les filles que les garçons, c’est ce que révèle une récente étude. Pour quelles raisons et surtout, que peut-on faire ?
C'est une première, il n’y avait jamais eu de statistiques sur cette inégalité de genre en termes de santé mentale. L’étude Ifop a été effectuée sur un échantillon de 1303 jeunes de 11 ans à 24 ans, du 1ᵉʳ octobre au 9 octobre 2024, et elle vient combler un manque. 76 % des jeunes femmes indiquent être stressées, contre 61% des hommes. La tendance à s’auto-déprécier s’avère aussi très genrée, si l’on en juge par la proportion de filles ayant "une opinion négative d’elles-mêmes" (38% contre 26 % des garçons) ou celles qui ont "très peur de l’échec" (73%, contre 54%).
Inégalité de genre face à la santé mentale
Anne-Claire de Pracomtal, psychologue, co-créatrice de la plate-forme de soutien "i AM STRONG", a commandé cette étude Ifop pour cibler les difficultés des jeunes filles : "Ces chiffres confortent notre constat au quotidien. On accompagne plus de filles que de garçons. Cette différence genrée en termes de santé mentale est multifactorielle. Il y a des transformations physiques qui sont plus importantes à la puberté chez les filles que chez les garçons. Il y a aussi le problème de l'éducation, comme la manière dont on s'adresse à elles, comment on les autorise ou non à avoir de l'ambition, comment on leur donne confiance en elles ou pas."
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Le critère de beauté sur un piédestal
On a parlé du stress, de la dépréciation, il y a une autre attitude très genrée, celle qui consiste à mettre la beauté sur un piédestal ! La proportion de jeunes ayant déjà pensé à se suicider est trois fois plus forte chez les jeunes filles ne se sentant pas belles que chez celles se disant belles. Comme leur apparence est importante à leurs yeux plus que le reste, on n’est pas étonné de cette statistique : 67 % des filles disent qu’elles font très attention au regard et au jugement des autres contre 53%.
" L'image de soi, l'image du corps chez les jeunes filles, a toujours été un sujet de vraie vulnérabilité qui peut donner lieu à des troubles", explique Anne-Claire de Pracomtal, psychologue. Les filles ne se sentant pas belles sont les plus vulnérables, mais les injonctions contradictoires impactent aussi les autres jeunes filles, comme l'explique Christian Mille, pédopsychiatre : "Par rapport à la beauté, cela va dans les deux sens. Les filles se sentent en difficulté, car elles ne se trouvent pas assez belles et si elles sont trop belles, elles suscitent trop de désir chez l'autre, ce qui peut aussi les desservir."
L'image de soi, l'image du corps chez les jeunes filles, a toujours été un sujet de vraie vulnérabilité qui peut donner lieu à des troubles.
Anne-Claire de Pracomtalpsychologue, co-créatrice de la plate-forme i AM STRONG
Les filles pensent plus au suicide que les garçons
L’étude révèle un engrenage ! Si les premiers symptômes ne sont pas identifiés rapidement, leur état psychologique se dégrade rapidement. Une jeune femme sur cinq (19%) en est déjà venue à prendre des antidépresseurs et les pensées suicidaires sont deux fois plus présentes chez les filles que les garçons. Quand on est parent, l'idée est de faire attention à un changement dans l'attitude de sa fille.
Christian Mille, pédopsychiatre, insiste sur les symptômes à ne pas prendre à la légère, en les confondant avec les fluctuations classiques de l'adolescence : " La dépression chez l'adolescent va se traduire en irritabilité, en sautes d'humeur, une façon de n'être jamais content, d'avoir un regard toujours négatif sur soi et beaucoup d'agressivité échangée. C'est important d'intervenir vite par rapport à cela en se rendant à la maison des adolescents ou en prenant rendez-vous au service de médecine de l'adolescent au CHU."
Notre but est de détecter les croyances limitantes que les jeunes filles peuvent se mettre pour qu'elles les remettent en question et qu'elles prennent conscience que ce n'est pas la réalité.
Erika Seydouxcoach certifiée, co-créatrice de la plate-forme "i AM STRONG"
Il existe aussi la plate-forme "i AM STRONG", co-créée par Erika Seydoux, coach certifiée. Grâce à des tests en ligne et une permanence téléphonique, l'adolescente trouve une écoute active et une réponse ciblée à ses obsessions. Ces dernières peuvent concerner son corps, son estime d'elle, ses capacités scolaires, la peur du jugement de l'autre. On peut gérer le stress grâce à des thérapies cognito-comportementales : " Notre but est de détecter les croyances limitantes que les jeunes filles peuvent se mettre pour qu'elles les remettent en question et qu'elles prennent conscience que ce n'est pas la réalité."
Vous pouvez retrouver le replay de l'émission Hauts Féminin sur la santé mentale des adolescentes présentée par Christelle Juteau-Lermechin.