Guerre de l'eau. "Ça n'a aucun sens de faire ça" : la collectivité veut supprimer les étangs, les agriculteurs montent au créneau

Obstacles à la circulation de l'eau dans les ruisseaux et rivières, les étangs sont dans le collimateur de l’établissement public territorial du bassin de la Vienne, qui incite à les supprimer. De leur côté, les agriculteurs, pêcheurs et chasseurs réunis dans l’association Cohésion rurale s'y opposent. Ils y voient des réservoirs providentiels en cas de sécheresse.

Pourquoi vouloir supprimer un étang ? Pour l’établissement public territorial du bassin de la Vienne, la réponse est simple.  La destruction de ces plans d'eau a de multiples avantages :  "rétablir la continuité écologique du cours d'eau et le retour d'espèces aquatiques menacées, limiter la dégradation de la qualité de l'eau liée à l'étang et à ses vidanges, retrouver un lit naturel et une rivière vivante, restaurer la morphologie du cours d'eau". L'institution aide techniquement et financièrement les propriétaires d’étangs qui souhaitent les supprimer, afin de limiter les impacts sur l’environnement.

Une démarche contestée par l’association cohésion rurale, qui regroupe la chambre d’Agriculture de la Haute-Vienne, la fédération départementale des chasseurs, le syndicat des étangs de la Haute-Vienne, l’association de la promotion du poisson local en Nouvelle-Aquitaine, le syndicat de la propriété privée rurale et Fransylva en Limousin.

"On sait qu'on va manquer d'eau"

 "Pour nous, ça n'a aucun sens. On est face à un changement climatique, on sait qu'on va manquer d'eau, qu'il va falloir stocker de l'eau. On a ce qu'il faut ici, on a des étangs. Les détruire pour construire peut-être à côté des réserves d'eau avec encore de l'argent, ça n'a aucun sens de faire ça" explique le président du syndicat des étangs et vice-président de l'association Cohésion Rurale Fréderic Garraud.

Les détruire pour construire peut-être à côté des réserves d'eau avec encore de l'argent, ça n'a aucun sens de faire ça.

Fréderic Garraud

Président du syndicat des étangs

"Tout s'est évaporé"

Pour l’établissement public territorial du bassin de la Vienne, les étangs ne sont pas une solution de stockage satisfaisante : l’eau y stagne, et s'évapore dès que les températures augmentent. "Entre mai et octobre, on est à environ 1/2 litre par seconde et par hectare d'évaporation, à raison de 10 heures par jour" détaille Stéphane Loriot, directeur de l'établissement public territorial du bassin de la Vienne.

Autre sujet de discorde : pour l'établissement public, la suppression des étangs permettrait aux cours d'eau de retrouver un meilleur débit, et la reconstitution de zones humides bénéficierait à la biodiversité.

Cohésion rurale s'appuie sur l'observation des effets des récentes sécheresses pour repousser cet argument : "On peut prendre l'exemple de 2022 où il n'a pas plu pendant quatre mois, les zones humides n'avaient plus que le nom d'humide puisque tout s'est évaporé, évapotranspiré, puisqu'une zone humide c'est de l'eau et des végétaux. Donc la zone humide, elle est très vite sèche" justifie Fréderic Garraud.

Cet été-là, les étangs aussi avaient beaucoup souffert d'évaporation, et leurs propriétaires s'en étaient inquiétés.

Le débit des cours d'eau menacé

En Haute-Vienne, les cours d’eau ont perdu 25 % de leur débit ces 30 dernières années. "Si on se projette à l'horizon 2050, on évalue des pertes d'eau allant de -40 à -50% sur les débits estivaux" avance Stéphane Loriot.

Des pertes de débit dues au réchauffement climatique, et aux interventions humaines qui modifient le cycle naturel de l'eau. La création d'étangs par exemple. Sur le bassin de la Vienne, depuis 1960 leur nombre a été multiplié par 8. Aujourd’hui on en compte près de 12 000 en Haute-Vienne et 25 000 en Limousin.

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