Jeudi 12 octobre 2023. Quatrième jour du procès d’un homme de 62 ans devant les Assises de la Haute-Vienne. Il comparait pour tentative d’assassinat sur son ex-amante qui reste aujourd'hui lourdement handicapée. La veille, sa victime a livré un témoignage poignant. Ce jeudi,après la déposition de l'expert psychiatre, de nouveaux témoignages ont confirmé la violence de l'accusé.
En ce quatrième jour du procès aux Assises de la Haute-Vienne d'Eric Talavéra, poursuivi pour tentative d'assassinat en récidive, les jurés tentent de mieux comprendre la personnalité de l'accusé.
Ce matin, la médecin psychiatre qui a examiné l'accusé l'année qui a suivi le drame dépose fait connaitre ses conclusions à la Cour. Ceux-ci entendent que cet homme de 62 ans est autocentré, qu'il surestime ses capacités, qu'il peut avoir des propos mégalomaniaques. Puis quelques témoins, convoqués par la partie civile comme par l'accusé, se succèdent. Ils sont peu loquaces. Leurs déclarations spontanées sont courtes, la présidente doit passer aux questions. Le côté "beau parleur" revient souvent. I
Comme à son habitude, il nous a embrouillés, il sait toujours retourner les situations à son avantage.
confie la sœur de l'accusé - Assises de la Haute-Vienne
Décrit aussi comme jovial, serviable, cumulant les relations amoureuses, pouvant se montrer même romantique et poète. On entend qu'il aime les enfants mais ne s'est pas vraiment occupé des trois qu'il a eus avec deux femmes. Qu'il a lui-même, dans son enfance, subi les crises de violence de son propre père, reçu des coups de ceinturon sans trop savoir pourquoi... "parce qu'il avait des bêtises ?" demande la Présidente. "Non... il rentrait parfois énervé de son travail, il se vengeait sur le petit" confie la mère de l'accusé.
Le caractère sanguin, impulsif, ne se remettant pas en question, revient aussi souvent.
Un véritable décalage avec la gravité des faits
Ce qui transparaît aussi en ce quatrième jour, c'est qu'Eric Talavera est comme acteur de son propre procès. L'étrange sentiment de ne plus vouloir en entendre davantage sur lui se ressent, comme si toute cette attention sur lui ne semblait pas lui déplaire.
Mais il y a un malaise, un véritable décalage avec le drame et le témoignage de sa victime, la veille. La troisième journée de procès a en effet été marquée par la prise de parole poignante de la victime, Marie-Hélène Michaud venue crier à la barre qu'elle avait tout perdu. "Il m'a tout enlevé, toute ma vie. Mais qu'est-ce que j'ai fait de mal ? Parce que je partais en vacances ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal, je voudrais qu'il le dise, qu'est-ce que j'ai fait de mal ?" répétait-elle.
De cette soirée, la victime ne garde que de vagues souvenirs, des flashs. "Je vois ce grillage et je ne voulais qu'une chose, courir, courir vite".
Récit d'une violence ordinaire
Ce jeudi après-midi, les jurés ont plongé dans la violence ordinaire des relations conjugales successives d'Eric Talavéra. Des femmes qui restent traumatisées en dépit des années ou brisées.
D'abord, sa première compagne, mère de son fils aujourd'hui âgé de 33 ans. Au début, elle ne souhaitait pas s'exprimer, mais sur insistance de la Présidente, elle finit par craquer.
"Ce Monsieur est devenu violent à partir de mes six mois de grossesse. Il ne supportait pas que je prête attention à mon ventre, que je puisse avoir des moments de fatigue. Quand je me levais le matin, mon inquiétude était de savoir comment j'allais finir la journée, il me mettait régulièrement une arme sur la tempe. Je vais te tuer, je vais te tuer. Un jour, il a visé et tiré, j'ai tourné la tête, la balle est partie dans le mur".
Les témoignages, d'un côté comme de l'autre, ont confirmé la version que nous maintenons depuis le départ. C'est un homme qui est chroniquement violent et qui peut aimer jusqu'à tuer. Il n'y a plus évidemment l'ombre d'un doute sur les versions de ce qu'il s'est passé ce soir-là et qu'il a réellement exécuté cette femme de façon volontaire, avec une préméditation et intention qui n'est plus à prouver à mon sens
confie ce jeudi, Me Jean Valière-Vialeix, avocat de la famille de la victime.
Car deux thèses vont s'affronter : celle des parties civiles qui soutiennent, comme le Parquet général, la tentative de meurtre avec préméditation. La victime enlevée de nuit, frappée à plusieurs reprises, acculée à fuir pieds nus avant d'être rattrapée et exécutée d'une balle dans la tête. Eric Talavéra va d'ailleurs la croire morte lorsqu'il la laisse sur ce chemin de terre sans issue. Ou, selon l'Avocat de la défense, le drame est survenu à l'issue d'un jeu sordides de coups de feu pour faire peur parce que la victime s'est "levée comme un ressort", se trouvant alors sur la trajectoire de la balle du tir que Eric Talvéra détournait volontairement de la tête de sa victime au dernier moment, en décalant son tir sur le côté. Ce serait alors des violences volontaires ayant provoqué une infirmité, avec des circonstances aggravantes, mais sans intention de donner la mort.
"Si j'avais voulu la tuer, elle serait morte", disait, ce mercredi, l'accusé à la barre. Là est tout l'objet de ce procès. Demain, entre plaidoiries des parties civiles, réquisitoire et plaidoirie de la défense, ces thèses vont s'affronter.
Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le long casier judiciaire de cet homme de 62 ans fait état de multiples condamnations, qui cumulent 47 années d'emprisonnement ferme, dont deux par des cours d'assises pour braquage et meurtre, jamais pour violences conjugales en dépit d'un passage au tribunal correctionnel pour ce motif.A ce jour, il a passé plus de 30 ans en prison.