Le groupe industriel Legrand, spécialiste du matériel électrique et numérique dont le siège est à Limoges, envisage de délocaliser une partie de sa production, notamment l'activité de Valprod. Contactée, l'entreprise s'explique sur cette décision alors que les syndicats font part de leur inquiétude. Depuis, de nombreux élus locaux réagissent. Le point.
La direction de Legrand a présenté son plan d'adaptation industriel aux organisations syndicales en Comité économique et social le mardi 19 novembre 2024. Selon le groupe, les délocalisations prévues concernent quatre sites, dans l'Aisne, en Normandie et en Haute-Vienne, celui de Valprod, qui produit des boîtes d'encastrement électriques, une activité à faible valeur ajoutée, transférée en Hongrie en 2026.
Selon la direction, Legrand souhaite "conserver ses positions de fabricant français de premier plan et sa compétitivité, en renforçant l’efficacité de son dispositif industriel en France. Cet objectif implique d’optimiser les surfaces utilisées et de créer davantage de synergies entre les sites concernés". Le groupe industriel dit avoir tenu compte du contexte du marché du bâtiment en France, dont le volume d'activité est en baisse significative depuis plusieurs années, sans perspective de relance à moyen terme.
Le géant Legrand, spécialiste du matériel électrique et numérique, compte aujourd’hui dans le monde 37 800 salariés, 5000 en France, 2000 en Nouvelle-Aquitaine. Dans les années 90, ils étaient 4 000 dans la région, soit une perte de 2000 emplois en trente-quatre ans dans la région. La direction affirme que "la délocalisation n’est pas au cœur de sa stratégie". Pourtant, elle explique que près de la moitié de la production française est exportée et qu’en général, le groupe fabrique à proximité de ses zones de commercialisation pour optimiser ses coûts de transport.
Quel devenir pour les salariés limougeauds ?
Une cinquantaine de salariés de Valprod sur le site de La Valoine, dans la zone sud de Limoges, sont directement concernés par la nouvelle stratégie industrielle du groupe Legrand.
Mais, selon la direction, il n’y aura pas de plan de licenciement parmi les cinquante-quatre salariés. Ceux qui ne partiront pas en retraite seraient reclassés à moins de trois kilomètres de leur site, où l’on produit des boîtes d’encastrement.
La direction de l'entreprise promet : "toutes les situations individuelles seront étudiées avec attention et chaque salarié se verra proposer une solution adaptée dans le cadre de la mise en œuvre de ces plans qui seront déployés jusqu’en 2028", privilégiant le maintien des emplois au sein du groupe.
Mais la CGT dénonce des marges de 20%, voulues par une direction de financiers. Pour elle, Limoges va en pâtir. "Il y aura une continuité de perte d’effectif sur le sol français et sur le sol limougeaud. Cela va obligatoirement entacher le bassin de Limoges puisque ce sont des machines de production qui quittent la France", réagit Olivier Ten, Délégué syndical central CGT Legrand.
Selon le groupe, 3% de son capital est détenu par les salariés. Le reste, soit 97%, constitue un capital flottant, c’est-à-dire qu’une partie de ses actions sont susceptibles d’être échangées sur le marché financier.
Les réactions à l'annonce des syndicats et du maire de Limoges dans ce reportage de Cécile Descubes :
Réactions nombreuses des élus locaux
L'annonce de cette adaptation de la stratégie de Legrand a été reçue avec beaucoup d'inquiétude chez les élus locaux. Pour Jean-claude Leblois président (PS) du département de Haute-Vienne, "c'est une mauvaise nouvelle dans une actualité qui n'en manque pas". La délocalisation d'une partie de la production de ce géant du CAC 40 s'opère dans un climat social de crise avec de nombreux plans de licenciements annoncés en France.
Je demande que la direction de Legrand nous reçoive pour nous expliquer les motivations justifiant un tel transfert qui ne paraît pas tant que cela étayé économiquement.
Jean-Claude LebloisPrésident (PS) du département de Haute-Vienne
Pour le maire (LR) de Limoges, Emile-Roger Lombertie, ce transfert d'activité est "a priori indolore" mais il veut rester attentif aux conséquences de la crise qui sévit dans le bâtiment.
De son côté, Guillaume Guérin, président (LR) de Limoges Métropole souligne : "les efforts entrepris par l’entreprise Legrand, pour gagner en compétitivité ainsi que pour proposer les solutions les plus adaptées aux salariés impactés, témoignent de son engagement en faveur du maintien de l’emploi sur le territoire".
De manière plus générale, la direction du groupe industriel souligne que la "France est un pays important pour l'entreprise Legrand. Près de la moitié de la production faite dans les usines françaises du Groupe est exportée. Avec 15% du chiffre d’affaires du Groupe au niveau mondial, la France est le 2ᵉ pays du Groupe ".
Un nouveau CSE central aura lieu le 10 décembre, pour répondre aux salariés qui ont réclamé des chiffres. Ils pourraient négocier une expertise pour déterminer si cette délocalisation est vraiment rentable.