La mort suite à des coups de couteau d'une femme de 33 ans et de son voisin de 23 ans à Nexon, dans la nuit du 15 au 16 juin 2021, avait saisi d'effroi les habitants de la commune. Trois enfants avaient pu être sauvés à l'étage par les pompiers grâce au sang-froid de l'ainée, âgée de 13 ans. Le procès de deux accusés, dont l'ex-compagnon de la mère de famille, s'ouvre ce lundi à la Cour d'Assises de la Haute-Vienne.
Les corps de Cécilia Péroux, 33 ans, et de son jeune voisin venu la secourir, Pierrick Berthier, avaient été découverts dans les décombres de l'intérieur de la maison incendiée de la jeune femme dans la nuit du 16 juin 2021. Le drame avait saisi d'effroi les voisins de ce quartier habituellement calme, comme l'ensemble de la population de Nexon.
Les trois enfants de la jeune mère de famille avaient pu être sauvés par les pompiers alors qu'ils se trouvaient à l'étage, enfermés. L'enquête révèlera que la mère de famille a été poignardée à trois reprises, dont deux au niveau de la nuque. L'autopsie de Pierrick Berthier, 23 ans, révèlera un acharnement à son encontre avec la présence de seize coups de couteau. L'homme, qui avait emménagé dans l'un des appartements de l'immeuble voisin depuis trois mois, avait été appelé par Cécilia Péroux car elle "craignait une réaction de son ancien compagnon" dont elle s'était séparée quelques jours plus tôt.
Les enquêteurs conclueront à un départ de feu volontaire par les agresseurs, "alors qu'ils savaient les trois enfants présents à l'étage" et, selon le Procureur "fait en sorte qu'ils ne puissent pas s'échapper".
Les deux accusés de ces actes d'une grande cruauté ont été rapidement interpellés par les forces de police après les faits. L'un d'eux a été l'ex-compagnon de Cécilia Péroux pendant quelques mois, elle venait de mettre fin à la relation. La reconstitution du drame a eu lieu la nuit du 4 au 5 juillet 2022.
Après trois ans d'instruction, le procès de ces deux hommes, pour double homicide et triple tentative de meurtre, débute lundi devant la Cour d'assises de la Haute-Vienne, au palais de justice de Limoges. Des audiences prévues jusqu'au 16 octobre prochain. En état de récidive légale, les deux hommes encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
"On leur a enlevé leur vie d'enfant, jamais ils ne connaîtront l'insouciance d'une vie d'enfant"
Le traumatisme de la violence de cette nuit de juin 2021 résonne encore dans la vie des trois enfants de la jeune mère de famille, alors âgés de 4, 7 et 13 ans, comme dans celle des familles des deux victimes tuées.
A la veille de l'ouverture du procès, les avocates des trois enfants confient qu'il est important de préparer ces enfants, dont les deux plus jeunes ont aujourd'hui 7 et 10 ans, à ce procès d'assises. L'ainée de 13 ans au moment des faits a souhaité être présente à ces journées d'audience, donc à quelques mètres du box où prendront place les deux accusés. Les deux plus jeunes ne seront présents, quant à eux, qu'à une seule journée d'audience. Ils bénéficieront de toutes les attentions particulières pouvant être demandées dans ces conditions par la Cour et par les soutiens des enfants, le père de ceux-ci étant décédé quelques mois après de maladie.
La Présidente de la Cour d'assises a mis en place un dispositif d'accompagnement des enfants par le chien d'assistance de l'association d'aide aux victimes en Corrèze, l'Aravic. "Ils ont déjà fait la connaissance de Scout et c'est vrai que sa présence a eu cet effet d'apaisement et de rassurance recherché" souligne l'avocate des deux plus jeunes enfants.
Leurs avocats, les services éducatifs, les psychologues qui les suivent les préparent au mieux à cette nouvelle épreuve qu'est le procès. "On leur a expliqué la configuration d'une salle d'audience, le rôle des uns et des autres, ils ont essayé ma robe d'avocat... mais ce sont des enfants qui intériorisent tellement que c'est très difficile de savoir l'appréhension qu'ils peuvent avoir vis-à-vis de ce procès. Ce que je sais, c'est que ce qui inquiétait beaucoup le plus petit, c'était la possibilité qu'un des accusés puisse sortir du box et lui sauter dessus".
On ne peut pas être autre chose que bouleversés. Leur vie a complètement volé en éclats. Ces enfants n'auront jamais la vie d'un enfant, ça leur a été enlevé de connaître cette possibilité, l'insouciance, la vie de famille, pour eux c'est terminé
Nathalie PréguimbeauAvocate des deux plus jeunes enfants
"Je suis fière de la défendre déjà parce qu'elle est assez exceptionnelle"
Josyane Andrieux-Filliol, l'avocate de l'aînée de la fratrie, confie être émue par la personnalité de la jeune femme, âgée au moment des faits de 13 ans. "Je suis fière de la défendre déjà, parce qu'elle est assez exceptionnelle, dans sa manière d'être, dans sa volonté de tout suivre, dans ce qu'elle a vécu et surtout dans ce qu'elle a fait".
Les pompiers l'avaient eux-mêmes constaté lors de leur intervention. À 13 ans, cette nuit du 16 juin, elle est réveillée par des cris qu'aucun enfant ne devrait entendre et confrontée, du haut du palier, à des images qu'aucun enfant ne devrait voir.
Une violence qui, loin de la pétrifier, va au contraire lui faire prendre conscience que de ses réactions dépendra la survie de ses deux jeunes frère et sœur, du chien de la maison et d'elle-même.
"Elle a eu une présence d'esprit hors norme, elle a réveillé son frère, l'a amené avec elle avec sa soeur, elle a eu la présence d'esprit de chercher les poignées qui avaient été enlevées, elle a mis des tissus mouillés quand elle a senti l'incendie, elle a ouvert le lavabo pour qu'il déborde et arrive à éteindre les fumées et le feu dans la pièce, elle a mouillé le museau du chien, elle a accroché son petit frère à la rampe pour pas qu'il tombe...
Une série d'actes en un temps record, incroyables pour une enfant si jeune, qui a une grande maturité et qui pour moi est quelqu'un hors-norme
Josyane Andrieux-FilliolAvocate de l'aînée des trois enfants
"Quand on a vécu de telles horreurs, ne pas être dans un coin totalement inhibée, affolée, apeurée, elle a pensé à eux, elle a pensé au chien, c'est quelque chose d'invraisemblable".
"Pour lui, un homme qui frappe une femme, c'était quelque chose d'insupportable"
Autre ressenti, celui des parents du jeune voisin, Pierrick Berthier, et de sa sœur qui, trois ans après les faits, atteint aujourd'hui l'âge de son frère qui lui a été enlevé.
Rencontrés à la fin d'un rendez-vous chez leur avocat, ils confient que rien ne leur a été épargné depuis cette nuit funeste. Ils racontent avoir compris le drame en découvrant l'article de la presse écrite relatant, aux premières heures de la matinée, l'incendie de la nuit. "Cette nuit-là, j'ai été réveillée par un grand sursaut que je n'ai pas compris sur le coup" confesse Hélène Berthier. "C'est ma fille qui a pris connaissance de l'article qui relatait l'incendie de la nuit et c'est en voyant la photo de la maison incendiée et la rue qu'elle m'a appelée... j'ai téléphoné aussitôt à mon fils, j'avais juste besoin d'être rassurée que tout allait bien de son côté, mais ça ne répondait pas, alors j'y suis allée".
Pierrick Berthier avait emménagé trois mois plus tôt dans l'un des appartements voisins de la maison de Cécilia Berthier. À l'occasion des allers-venues de ce voisinage, Cécilia Péroux lui avait confié les craintes qu'elle ressentait à l'égard de son ex-compagnon qu'elle décrivait violent.
Pierrick était quelqu'un de généreux, de bienveillant, c'est comme ça qu'on l'a éduqué, il aimait aider les gens, ça ne nous a pas étonnés quand on a appris ça, qu'il avait voulu lui venir en aide
Hélène BerthierMère de la seconde victime
Pour son père, Pierrick Berthier n'aimait pas l'injustice. Et pour lui, "un homme qui frappe une femme, c'était quelque chose d'insupportable".