La résidence services pour seniors Vivea, dans le centre-ville de Limoges (Haute-Vienne) existait depuis 20 ans. Mais son exploitant a jeté l'éponge, avec comme conséquence le relogement des personnes âgées dépendantes. En Nouvelle-Aquitaine, une autre enseigne de résidence sénior, Les Girandières, présente à Cognac, Rochefort, Limoges ou Mont-de-Marsan, est menacée par une procédure de redressement judiciaire au tribunal le 4 novembre à Paris.
C'est par un courriel du 9 août dernier que les résidents et leurs familles ont été informés de la très mauvaise nouvelle : la résidence service Vivéa cessera son activité le 31 décembre pour devenir une résidence de logements à destination de tous publics.
La direction de l'établissement l'assurait alors : il n'y aura aucune expulsion. Les personnes âgées autonomes ont donc le choix de rester dans la structure, qui sera, dès le 1ᵉʳ janvier 2025, dépourvue de tout accompagnement médical et social.
Les solutions de relogement étaient également à l'étude pour celles et ceux qui ne pourraient pas rester locataires de leur appartement : il s'agit de tous les séniors dépendants dont les prestations services étaient indispensables à leur quotidien. Seule solution pour rester : assumer le budget de prestataires qu'il leur faudrait, par ailleurs, trouver. Pour les autres résidents non autonomes, il s'agissait donc de trouver une structure adaptée (une autre résidence sénior ou un EHPAD).
Une sérieuse préoccupation pour beaucoup. Ainsi, le jour de notre reportage à la fin de l'été, une fille de résident témoignait : "C'est un problème déjà pour les personnes qui sont licenciées, ça fait presque vingt personnes, je crois. C'est un problème pour les résidents qui vont perdre leurs repères ici, c'est un problème pour les familles qui vont devoir, comme moi, trouver une solution, et qui vont être obligées de se tourner vers les EHPAD. Là, j'ai commencé à créer son dossier... Mais c'est court le 31 décembre. Donc, c'est un peu stressant."
Question de rentabilité
Cinquante-sept logements étaient occupés, fin août, sur les 80 qu'offre la résidence. Pas suffisant pour les actionnaires du groupe français Pierre Val que notre équipe de reportage avait pu joindre, à l'époque, par téléphone. Les loyers ne couvraient plus les charges depuis 2021, d'où la décision de fermeture. Les appartements ont donc été ouverts à la location dès la fin de l'été, pour tout profil de locataire, y compris étudiants.
Pour ce résident croisé à la sortie de l'établissement, le constat était sans appel :
C'était pas si mal que ça, mais on sentait bien que ça se dégradait... Déjà, les repas n'étaient pas très suivis... C'était pas trop bien de temps en temps, quoi ! Moi, j'ai pris les devants, j'ai cherché ailleurs et j'ai trouvé.
Daniel PenotRésident depuis trois ans, sur le départ fin août 2024
Et depuis notre reportage ?
Daniel Penot, a, selon nos informations, très rapidement rejoint une autre structure adaptée pour les séniors. En cette fin octobre, 90% des résidents auraient trouvé une solution de relogement. Trois personnes ont décidé de rester dans la structure en faisant appel à des services extérieurs pour aider au quotidien. Il resterait, à l'heure où nous publions ces lignes, moins de dix résidents en attente de solution.
Nous avons également appris que le groupe français Pierre Val n'était plus propriétaire de la structure depuis le 1ᵉʳ octobre. Le site a été racheté par le groupe Obéo Zenao, un groupe qui gère des logements dans plusieurs villes de France. La marque Obéo est en charge de la partie "résidences sénior" du groupe et Zenao de la commercialisation de la partie "apparts hôtels". Contactée, la direction évoque un secteur extrêmement concurrentiel sur Limoges avec huit établissements de ce type. Au 1ᵉʳ janvier, elle confirme une orientation de ces logements pour tout public.
Toujours selon nos informations, les licenciements des personnels soignants de la structure sont en cours.
Une autre résidence pour séniors de Limoges menacée
Le modèle de la résidence pour séniors est-il menacé ?
À Limoges, que va devenir la résidence services pour personnes âgées appartenant au groupe Les Girandières ? Le groupe national est en effet convoqué devant le tribunal de commerce de Paris le 4 novembre prochain. Depuis juin, la branche sénior du groupe "Réside Études Senior" est, en effet, en redressement judiciaire.
Contacté, le groupe, via son service communication à Paris, nous explique être en attente de l'audience. 72 résidences sont concernées sur le territoire français, notamment dans Les Landes, ce qui représente 1300 à 1400 salariés. Plusieurs offres de reprise ont été déposées et pourraient laisser un espoir de pérennité aux structures existantes. Celle de Limoges, créée en 2022, dispose de vingt-deux appartements occupés et de onze salariés.
Le groupe rappelle que seule la partie senior est menacée et concernée par la procédure de redressement judiciaire. Les sections "résidence étudiantes" et "appart hôtel" de la marque sont en procédure de sauvegarde. Pour expliquer les difficultés rencontrées par cette branche spécifique des personnes âgées, il évoque un problème de rentabilité "beaucoup plus longue, plus lente que sur l'activité étudiante et appart hôtel. Le marché est beaucoup plus long à être rentable".
En effet, l'engagement des familles et des personnes âgées dans ce type de structure est globalement plus long, et les résidences auraient besoin de plusieurs années pour parvenir à un taux de remplissage de 100%, ce qui ne serait pas le cas dans les structures dédiées aux étudiants.
À noter aussi le coût de ce type de logements : ces résidences sont accusées d'être plus chères qu'une maison de retraite.