Certains conducteurs inscrits à des stages de récupération de points pendant ou après le confinement ont vu leurs sessions annulées ou reportées. Après avoir déboursé entre 160 et 200 euros, il est désormais demandé aux postulants de s’acquitter d’un supplément de 109 à 129 euros.
PermisàPoints.fr est l’un des portails d’entrée auprès de 1 400 centres agrées pour des stages de récupération de points. Créé il y a 16 ans, cette société est aujourd’hui le leader français sur le marché. Il chapeaute un réseau national qui comprend 95% des centres agréés par l’Etat. Les tarifs pratiqués avant la pandémie du Covid-19 se situaient entre 150 et 250 euros. Ils approchent ou atteignent désormais les 300 euros.
Joint par téléphone, Franck Genser, gérant de PermisàPoints.fr, impute cette hausse aux contraintes du protocole sanitaire imposé par l’Etat :
"Les gestes barrières imposent qu’il y ait 4m2 par personne au minimum dans la salle. Faute de place dans les salles trop petites, les stages, qui fonctionnaient d’ordinaire avec 20 conducteurs, sont réduits aujourd’hui de moitié. Comme la ressource disponible est deux fois moindre, il faut doubler le tarif normalement. C’est comme si, dans un avion, vous devez payer le carburant en mettant la moitié des passagers. Là, nos centres agrées sont en général de très petites structures, des auto-écoles qu’on ne peut pas obliger à travailler à perte".
Et ce dirigeant d’entreprise de soumettre une solution : "C’est d’attendre que le déconfinement soit complet. Dès que les salles pourront de nouveau accueillir 20 personnes plus les deux formateurs, vers début juillet à priori, les tarifs reviendront au niveau de ceux pratiqués avant la crise. C’est simplement l’effet mécanique de la restriction des conditions d’accueil qui fait que le coût du stage doit être partagé entre moins de personnes. Encore une fois, c’est la conséquence directe de la réglementation mise en place par l’Etat. C’est vraiment les gens qui ont une urgence de récupération de points qui subissent cette hausse. Et nous remboursons toutes les personnes qui en font la demande".
Des tarifs libres
Cette politique commerciale est tout à fait légale. Dans ce domaine, les tarifs sont libres. Contacté, l’automobile Club du Limousin s’offusque de telles pratiques par la voix de son président Christian Ducher :
Je le dis régulièrement, l’automobiliste est une vache à lait avec les taxes sur les carburants, sur tout ce qui lui est imposé. C’est beaucoup, 300 euros. Le but, c’est de permettre aux personnes de sauvegarder leur permis de conduire et ce n’est pas d’en faire une affaire financière.
Depuis 25 ans, l’automobile Club 87 organise lui-même des stages de ce type une fois par mois. Et son président d’expliquer : "On a des charges bien évidemment, les personnes qui interviennent ne le font pas bénévolement. Nous avons une charge supplémentaire avec la location d’une salle adaptée (minimum 88 m2 pour 20 stagiaires et deux intervenants). Aujourd’hui, nous restons à 190 euros, tarif inchangé depuis plusieurs années. Il pourrait passer à 200 euros pour compenser cette charge supplémentaire, mais pas plus. Quasiment doubler le prix d’un stage, c’est une forme de pression. Il y a des personnes qui sont obligées de récupérer rapidement 4 points pour conserver leur permis et donc leur travail. Se retrouver dans une situation incontournable et devoir dépenser 300 euros, je trouve que c’est choquant. Ils sont doublement impacté : le fait de donner deux jours sur son temps même si ce n’est jamais perdu et celui de payer le prix fort".
Des exceptions sur un marché juteux
Il existe cependant de rares centres agrées qui ont conservé le même tarif au sortir du confinement : 160 euros pour une prestation identique. C’est le cas d’une auto-école de Tours, en Indre et Loire : Kangouroute, une entreprise régie sous forme de Scop (société coopérative détenue majoritairement par ses salariés) créé en 1986. Olivier Dubray, l’un de ses gérants, explique sa position :
"Nous avons souvent été contactés par ce site (permisàpoints.fr) pour servir un peu de rabatteur si je puis dire. On inscrit les gens chez eux moyennant une petite commission. Notre politique tarifaire est différente, c’est une question d’éthique. Pendant deux mois, tout stage était impossible. Personnellement, ça me semblait malhonnête de profiter de la situation et de doubler les tarifs pour rentrer de l’argent dans les caisses. Après, ces sites qui le font, je ne les blâme pas. Nous, on a fait un choix différent. On a la chance d’avoir à disposition une salle de 100 m2. Elle est agréée et permet de respecter le protocole sanitaire".
Et Olivier Dubray d’apporter son regard sur l’évolution de ce marché des stages de récupération de points : "Aujourd’hui, la demande explose après ces deux mois d’inactivité, il y a des pratiques commerciales qu’on ne peut pas questionner. C’est la loi de l’offre et de la demande. Dans certaines villes, mesures sanitaires obligatoires, le but, c’est de proposer le plus de dates possibles pour rattraper le retard pris, puis d’annuler et reporter pour les regrouper. Effet inverse, quand les stages peinent à remplir, certains bradent, il faut que ce soit rentable, la tarification est libre".
Le permis à point
Le système du permis à point est entré en vigueur en France le 1er juillet 1992. Une infraction au code de la route peut faire perdre entre un et six points et un conducteur ne peut pas perdre plus de huit points même en cas d’infractions cumulées.Les stages permis à points ont vu le jour en même temps que le permis à points. À l’origine le stage de récupération de points de permis était destiné aux professionnels de la route. Aujourd’hui, il s’adresse à tous les détenteurs d’un permis qui ont besoin de reconstituer leur capital point afin d’éviter la perte du permis. Pour le contrevenant, effectuer un stage de sensibilisation permet de récupérer quatre points après deux jours de formation, une fois par an. Le stage se déroule dans une auto-école ou un centre agréé.