On n’y pense pas spontanément quand on évoque la crise écologique, mais le domaine de la santé est très polluant et nécessite lui aussi des adaptations. À la polyclinique de Limoges, des soignants se mobilisent pour faire évoluer les habitudes.
Lors d’une opération chirurgicale, pour une anesthésie générale, le médecin qui endort le patient utilise un laryngoscope pour placer sa sonde d'intubation. La lame de cet outil, à usage unique, est habituellement jetée à la poubelle. Mais à la polyclinique de Limoges, un nouveau circuit de valorisation a été mis en place : cet élément en inox partira chez un ferrailleur pour être recyclé.
Gaz polluants
Ce n'est pas la seule évolution en cours dans les blocs opératoires de la clinique. Le docteur Sébastien Ponsonnard, médecin anesthésiste, a aussi modifié son usage des gaz halogénées : ils permettent de maintenir les patients endormis, et ils sont extrêmement polluants.
En privilégiant toujours l’intérêt du patient, le médecin choisit les moins pires et utilise de nouveaux équipements : "C’est l’ordinateur qui calcule le temps d’administration et le débit de gaz frais, et ça nous permet d’avoir une consommation de gaz halogénés qui est effondrée. A la fin de l’anesthésie du patient, on a consommé moins d’halogénés, et surtout, on en a rejeté beaucoup moins dans l’atmosphère."
Le chantier des "DASRI"
Il reste une grande marge de progression, notamment autour des "DASRI", ces poubelles jaunes réservées aux déchets à risques infectieux. Il faut les transporter dans des centres éloignés pour les brûler à haute température. C'est polluant, et pourtant le tri laisse à désirer.
Illustration devant une poubelle DASRI avec Sébastien Ponsonnard, qui réalise un rapide inventaire de son contenu après une opération : "De l’emballage, déchet ménager. De l’emballage, déchet ménager. Un badigeon qui est propre, déchet ménager. Ça, c’est encore pire, c’est de l’aluminium, c’est recyclable..."
Nouvelles recommandations
La SFAR, société savante des anesthésistes-réanimateurs, vient de publier des recommandations visant à réduire l’impact de la discipline sur l'environnement.
Pour Sébastien Ponsonnard, c'est l'affaire de tous, jusqu’aux patients qui peuvent éviter de tomber malade avec une bonne hygiène de vie. Selon lui, l’enjeu global est majeur : "Un hôpital moyen, son coût carbone à l’année, c’est à peu près 1700 fois le tour de la terre en voiture. Je pense que ceux qui ont un rôle à jouer prépondérant, c’est ceux qui polluent le plus. La santé, ça pollue énormément."
P'tits doudous
Tout cela pour tenter de préserver l'avenir des enfants. Mais ces initiatives leur apportent un bénéfice dès aujourd'hui. En effet, l'argent récolté grâce au recyclage des lames de laryngoscope ou des câbles des bistouris électriques est destiné à une association appelée Les P'tits Doudous. Elle propose en contrepartie de cette collecte des équipements pour rendre les hospitalisations des enfants plus ludiques et moins impressionnantes, comme des tablettes numériques équipées de logiciels dédiés.
De quoi mobiliser tous les soignants et changer leurs façons de penser. Aurélie Scomparin, médecin ORL et présidente des p’tits doudous à Limoges, est elle-même passée par là : "L’écologie, ce n’était pas trop mon truc, je voulais surtout avoir des subventions pour améliorer le parcours des enfants à la clinique. Par ce biais-là et en me renseignant sur l’association, je me suis dit, bien sûr, il faut faire de l’écologie, ça va de soi !"
Désormais, les jeunes patients vont même se faire opérer en voiture électrique. La prochaine étape est peut-être d'y aller à vélo…