157 ouvriers de GM&S la Souterraine se sont retrouvé sur le carreau après la reprise de l'usine. Plusieurs ont entamé une reconversion. Celle de Stéphane n'est pas la moins surprenante. Il est devenu aide-soignant.
C'est un grand gaillard tout de blanc vêtu. Une bonhomie et une gentillesse naturelles se dégagent de lui. Stéphane est un tout jeune aide-soignant de 49 ans. Il arpente les couloirs de l'unité de soin du CHU de Limoges. Au programme, dans chaque chambre, la toilette des patients, les lits à faire et surtout une écoute, quelques mots gentils à dispenser.
"Le bon moment, c'est quand vous avez un sourire, un merci, et ça c'est tous les jours. C'est pas parce qu'une personne est aphasique, ne peut pas parler, qu'il ne peut pas y avoir d'échange. Ça passe au travers du regard, des gestes aussi. C'est plus de 90% du non verbal. On est les yeux et les oreilles du médecin. C'est nous qui passons le plus de temps auprès du patient".
Les mains trapues de Stéphane n'ont pas toujours été immaculées. Avant 2017, il était technicien outilleur à GM&S. Des couloirs de l'usine, à ceux du CHU de Limoges : un grand écart et un changement de vie radical. Stéphane fait partie des 157 ouvriers licenciés en 2017. Syndicaliste CGT, c'est une des figures du combat mené par les ouvriers pour sauvegarder l'usine et leurs emplois. Un combat qui lui a permis de se révéler et de trouver les ressources pour changer d'orientation.
Ce métier d'aide soignant, il l'a découvert grâce à son cercle familial et a décidé de tenter l'aventure.
"C'était un défi pour moi. J'ai juste eu le temps de faire cette formation avant l'arrêt de mes droits au chômage. C'est peut-être une vocation que je ne soupçonnais pas. J'ai toujours aimé le contact humain. L'expérience GM&S me sert pour le travail d'équipe et surtout la solidarité dont on a fait preuve en 2017. C'est une expérience humaine inoubliable qui me sert encore aujourd'hui".
10 mois de formations et de stages pour apprendre à s'occuper des autres ont été nécessaires à cette reconversion. Si le métier a changé, la casquette syndicale est restée. Un dialogue social pour le moment plus constructif que ce à quoi il a été habitué.
"On a vu la force du CHU pendant le Covid, parce que ça a été très compliqué pour nous. Ils ont pu réaffecter du personnel d'autres services qui n'étaient pas sous tension. Il faut être constructif, dire aussi quand ça va bien".
Stéphane n'a pas complètement tourné la page GM&S. Il reste actif en tant que trésorier de l'association qui s'occupe des autres salariés licenciés.
"Il y en a qui se sont retranchés, on n'a malheureusement plus de nouvelles d'eux. C'est ça qui est le plus difficile. Après on ne peut pas aller contre ça. Chacun réagit et le vit à sa façon. Y'en a que ça a démoli complètement".
Aujourd'hui Stéphane veut poursuivre sa nouvelle carrière en essayant de partager son expérience pour améliorer la vie de ses collègues et de ses patients.