Châtaigniers, chênes pédonculés... les emblèmes de la forêt limousine sont victimes des changements climatiques. Canicules répétées et sécheresse les affaiblissent depuis quelques années. Ils pourraient totalement disparaître de notre territoire d'ici à cinquante ans.
Le chêne pédonculé est un symbole des trois départements de l'ex-Limousin. Cette espèce est implantée ici naturellement depuis 11.000 ans, soit depuis la fin de dernière période glaciaire. Mais cet arbre emblématique est en train de donner des signes de faiblesse. Et l'un des symptômes est sa plus faible résistance aux insectes.
Plus vulnérables aux insectes
C'est ce que constate Guilhem Vaganay, technicien du CRPF (Centre régional de la propriété forestière), chargé d'un réseau de surveillance des arbres : "Cette année, on constate une très forte pullulation de chenilles, qui vont manger les feuilles. Elles font plein de petits trous. Elles font plein de petits trous, il ne reste plus que les nervures principales, et toute l'activité photosynthétique liée au vert de la feuille a disparu".
En vallée de la Briance, sur plusieurs spécimens des mêmes variétés de chênes, on remarque des attaques de capricornes. Mais ces insectes mangeurs de bois arrivent toujours après d’autres attaques, notamment celles de champignons, comme l'explique Christian Riboulet, expert forestier : "Probablement, la première attaque a été une colonisation au niveau des racines par l'armillaire, qu'on appelle le pourridié, qui en vingt-trente ans, continue à dégrader les racines maîtresses, si bien qu'on n'a plus d'axe support".
Cette vulnérabilité aux insectes est favorisée par les canicules et les sécheresses à répétition. C'est ce qu'explique Guy Costa, professeur de physiologie végétale à la Faculté des Sciences de Limoges. Il travaille sur la durabilité du bois : "Un arbre qui est fragilisé parce que ses conditions hydriques sont moins favorables va être beaucoup plus sensible à tout un tas d'autres éléments de l'environnement, dont les insectes".
L'arbre a besoin d'eau pour vivre
À cause du stress hydrique, les chênes se "déplument". Et dans le paysage, au fil des années, c’est de plus en plus visible.
"Quand les conditions sont défavorables, l'arbre va perdre ses feuilles. En perdant ses feuilles, il arrête de transpirer, de faire migrer de l'eau dans son système vasculaire. Et il y a des conséquences : il arrête de produire de la biomasse", explique Guy Costa.
Car l'arbre a besoin d'eau pour vivre, de beaucoup d'eau. "Il lui faut entre 200 et 700 litres d'eau par jour", précise Christian Riboulet, "Le manque d'eau va créer un déséquilibre métabolique et il va être obligé d'abandonner sa tête, ses parties hautes qui lui coûtent cher en énergie, pour se développer s'il le peut dans sa partie basse. Et puis, il y a le stress irréversible : là, on est sûr que l'arbre mourra dans les trois-quatre ans à venir."
Selon l’expert forestier, à cause des étés trop chauds, les chênes pédonculés du Limousin auront tous disparu dans un demi siècle. Ils seront probablement remplacés par d’autres espèces.
L'autre espèce emblématique du Limousin - le châtaignier - est aussi menacée. Son dépérissement, qui a d'abord touché la Dordogne, commence à atteindre la Haute-Vienne.