Grève et manifestations dans l'Education Nationale, en Aquitaine, les enseignants contestent le projet de Luc Chatel.
Manifestation au lycée Paul Bert de Bayonne
Ce lycée professionnel va perdre 120 élèves et 10 postes d'enseignants suite à la nouvelle carte des formations mise en place par le rectorat. Un tiers des enseignants est en grève depuis le début de semaine. Reportage d'Emmanuel Clerc et Sandrine Estrade
Le Ministre de l'Education Nationale envisage de modifier le mode d'évaluation des enseignants dans l'exercice de leur matière. Jusqu'à ce jour, c'est l'inspecteur qui évalue, demain ce pourrait être le chef d'établissement. Les professeurs du secondaire et du primaire n'en veulent pas, ils ont des arguments.
Le premier argument est que le chef d'établissement ne peut pas évaluer des enseignements dans des matières qu'il ne maîtrise pas lui-même. Le principal d'un collège a bien sûr enseigné avant de prendre des fonctions dans la hiérarchie, mais, s'interrogent les professeurs : comment peut-il juger d'un cours de géographie, si lui-même était prof d'arts plastiques ?
Deuxième problématique soulevée par les syndicats d'enseignants, le jugement d'un chef d'établissement peut être vicié, rien ne permet de dire que tous les principaux et proviseurs ont les capacités d'évaluer de façon impartiale leurs subalternes.
Mais la visite de l'inspecteur est souvent programmée, alors les professeurs prennent le temps de préparer leur évluation qui se déroule par une observation de l'enseignant en condition de cours, et d'un entretien avec l'inspecteur. Les inspecteurs ne sont pas dupes de cette préparation, l'expérience leur permet de sentir s'il y a mise en scène.
Les syndicats reprochent aussi au projet, l'usage de termes qui n'ont rien à faire dans le monde de l'Education, qui sont plutôt réservés au jargon économique, le texte parle de chef d'entreprise, d'objectif. Le chef d'établissement est, dans la procédure actuelle, sollicité pour participer à l'évaluation des professeurs, il émet des avis qui comptent pour 40 % dans l'évaluation pratiquée par l'inspecteur.
Les évaluations sont trop peu fréquentes, un enseignant sera évalué tous les cinq ans, par le jeu du nombre d'enseignants et du nombre d'inspecteurs, la fréquence est de cet ordre actuellement. Le Ministère propose avec cette réforme une évaluation plus fréquente, donc une possibilité de progresser dans la carrière plus rapidement que par le simple principe de l'ancienneté.
D'autres pays européens ont déjà adopté le principe de l'évaluation par le chef d'établissement, mais ce n'est pas un critère qui satisfait les syndicats, la France peut conserver son particularisme sans que cela n'affecte la qualité des enseignements. Le Ministre de l'Education Nationale inscrit cette réforme de l'évaluation dans le projet de transformation de l'enseignement par la création du "socle commun" du CP à la 3ème.
Jeudi matin, dans les écoles primaires, les enseignants étaient 11,2% à faire grève selon le ministère, et plus de 21% selon le SNUipp-FSU, principal syndicat de la profession.
Dans les collèges et lycées, le ministère a dénombré 16,4% de grévistes, et le
Snes-FSU (principal syndicat) 47%.