Depuis plus de trois ans, ce feuilleton politico-judiciaire agite la commune de Pouillon dans les Landes. Mis en examen pour des faits d’agression sexuelle et de harcèlement en 2021, le maire Patrick Vilhem vient d'être condamné à deux ans de prison avec sursis et deux ans d'inéligibilité.
Une quarantaine de personnes s'amassent devant le tribunal de judiciaire de Dax. Ce jeudi 12 décembre, en début d'après-midi, les juges rendent le délibéré du procès du maire de Pouillon, dont l'audience s'est tenue le 7 novembre. Patrick Vilhem vient d'être condamné à deux ans de prison avec sursis et à une peine d'inéligibilité sur la même durée.
"Un soulagement"
L'élu a été mis en examen, il y a trois ans, pour agression sexuelle et harcèlement sur des agents municipaux et des personnes extérieures à la mairie. Il a interdiction de prendre contact avec six des victimes durant trois ans et sera inscrit au Fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijais). La justice l'a relaxé pour deux faits de harcèlement : l'un sexuel et l'autre moral, sur deux personnes différentes.
Le verdict est "un soulagement" pour les victimes, témoigne l'une d'entre elles, à la sortie du tribunal. Dans la petite commune Landaise de Pouillon, à une quinzaine de kilomètres de Dax, ce feuilleton polico-judiciaire a divisé les habitants. "Il faudrait avoir un peu plus de respect pour ses employés, revoir sa façon de faire", commente un habitant du village, ce jeudi après-midi. "Il aurait dû être condamné avant. Il a tué Pouillon", réagit à son tour une retraitée.
Cette histoire a fait du mal au village. Il y a beaucoup de gens qui sont les uns contre les autres. On espère voir des jours meilleurs.
Régis RameauxPrésident de l'Association de soutien des agents municipaux de Pouillon
Surnoms et proposition de "gang bang"
L'affaire a éclaté en septembre 2021. Une administrée affirme alors que le maire lui a mis les mains sur les fesses après l'avoir embrassée sur la douche. Ils s'étaient rencontrés à plusieurs reprises dans le cadre d'une recherche de local commercial dans la commune. Elle porte plainte, une enquête dans l'environnement proche du maire débute.
Aux enquêteurs, les agents municipaux détaillent des sévices quotidiens tels que des agressions sexuelles et des propos graveleux, dont une proposition "gang bang". Certains rapportent les surnoms donnés par le maire à des clientes comme "ma cochonnette" ou "mon petit bonbon rose", mais aussi le fait que l'édile "imposait de faire la bise".
Neuf des seize victimes identifiées de Patrick Vilhem se sont constituées partie civile. Cinq d'entre elles étaient présentes au procès qui s'est tenu le mois dernier au tribunal judiciaire de Dax. À l'audience, leur avocat avait décrit un maire "tout-puissant", qui aurait fait l'objet de 17 mises en examen.
Accompagné par sa famille, Patrick Vilhem s'était défendu d'avoir pensé "flirter", commis "une bêtise" avec la première victime et de "faire partie d'une (autre) génération". Il n'était pas présent au tribunal de Dax, ce jeudi, pour le rendu du jugement.
Une autre affaire en mars 2025
Patrick Vilhem aura de nouveau rendez-vous avec la justice en mars 2025. Il devra s'expliquer dans une affaire civile qui oppose la mairie aux agents municipaux. En décembre 2022, la quasi-totalité d'entre eux avait rédigé une lettre ouverte pour alerter sur leur "épuisement professionnel" faisant craindre des risques de "burn-out, voire suicide".
Ils dénonçaient "l'autoritarisme" du maire et ses "tentatives de déstabilisation". Les 41 signataires de la lettre avaient invoqué leur droit de retrait pendant un mois. Considérant qu'il s'agissait d'une grève, la mairie ne les a pas rémunérés sur cette période.
La boucle n'est pas tout à fait bouclée. Les agents attendent l'audience du tribunal administratif afin que leur droit de retrait soit reconnu. Beaucoup d'entre eux ne travaillent plus pour la commune... Ce sont les victimes qui partent.
Régis RameauxPrésident de l'Association de soutien des agents municipaux de Pouillon
Depuis plusieurs mois, le 1ᵉʳ adjoint de Pouillon a repris les rênes du Conseil municipal, le maire étant empêché de siéger lors de sa mise en examen. Les Pouillonnais avaient élu Patrick Vilhem à la tête de la commune en 2014, puis réélu en 2020 avec 50,41% des voix.