Au collège de Geaune, dans Les Landes, les professeurs de physique-chimie ou d'histoire-géographie se retrouvent à donner des cours... de français. Aucun enseignant n'a été trouvé pour enseigner cette matière et plus de 80 élèves encaissent du retard depuis la rentrée. Les syndicats dénoncent des défaillances dans l'attribution des postes.
Joe n'en revient toujours pas. Depuis la rentrée, cet élève en classe de 4ᵉ est privé de cours de français. Le collège Pierre de Castelnau à Geaune dans Les Landes, où il est scolarisé, ne trouve pas de professeur pour assurer l'enseignement. "Hier, quand j'ai fini de manger au self, je me suis retrouvé avec une heure d'étude. Ensuite, je suis allé en cours d'histoire, et j'ai de nouveau eu une heure d'étude. Il faut s'accrocher", explique avec dépit le collégien, en montrant son emploi du temps rempli de trous.
Près de 80 élèves de 6ᵉ, 5ᵉ et 4ᵉ sont concernés au sein de l'établissement qui compte plus de 250 inscrits. Ils devraient avoir cinq heures de français par semaine. "Quand les professeurs d'histoire-géo ou de physique-chimie ont du temps libre, ils nous prennent en charge pour nous faire du français", raconte Jules, qui a fait sa première rentrée au collège cette année.
"C'est aux parents de rattraper le temps perdu"
Cette organisation dure depuis six semaines et la colère monte chez les parents."C'est quand même l'avenir de nos enfants. Il y a l'examen l'année prochaine pour le brevet du collège", s'exaspère un parent d'élève. "C'est à nous, les parents, de gérer la situation à la maison si on souhaite essayer de rattraper un petit peu le temps perdu", renchérit une autre.
Le collège de Geaune est loin d'être le seul dans ce cas de figure sur l'académie de Bordeaux. Ces heures manquées s'expliquent soit par des postes sur lesquels aucun enseignant n'a encore été affecté, soit par des absences de professeurs, ponctuelles, qui ne sont pas remplacées. Au de-là de 14 jours d'absence, c'est au rectorat d'assurer un recrutement. "Nous avons des enseignants qui assurent le remplacement. Néanmoins, l'académie est vaste. Nous avons des départements géographiquement très étendus", indique Philippe Vulliet, secrétaire général adjoint au rectorat de Bordeaux.
Nous avons plus de mal à trouver de la ressource pour aller effectuer un remplacement dans un collège ou lycée en ruralité pour quelques heures.
Rectorat de l'Académie de Bordeaux
Il existe pourtant une solution : les professeurs titulaires sur zone de remplacement (TZR), des enseignants recrutés à Bac +5. Le problème est qu'ils seraient rarement sollicités, au détriment des contractuels, selon les syndicats. "Cette situation pousse les titulaires à faire des missions à court terme. C'est notre devoir, donc on y va. Mais c'est parfois très loin : 1 h 30, 3 h de route par jour pour aller sur l'établissement. On a l'impression d'être la dernière roue du carrosse", déplore Aude Michelot, professeure d'EPS.
Un recours de plus en plus fréquent aux contractuels
Sa situation illustre les défaillances d'affectation dénoncées par les syndicats dans toutes les matières scolaires. Depuis qu'elle a eu son concours, il y a 12 ans, Aude Michelot n'a obtenu que des postes en remplacement. "C'est un peu humiliant. Parfois, on fait la pré-rentrée et finalement le contractuel qui n'a pas eu le concours siège à notre place, alors qu'on s'est investi dans l'établissement et que l'on a toujours bien fait les choses", regrette-t-elle.
On se retrouve avec des titulaires qui ont vu leurs conditions d'emploi et d'affectation, déjà pas faciles, se dégrader à cause de cette décision de ne plus les affecter sur des postes fixes.
Maitane CocagnePorte-parole du syndicat SNES-FSU Aquitaine
"D'un autre côté, on a des contractuels sur qui le gouvernement avait misé, mais qu'il n'arrive pas à recruter", poursuit la porte-parole.
Le rectorat assure que 97 % des postes sont pourvus. Sur l'académie, une quarantaine de classes manqueraient encore d'enseignants pour que tous les élèves puissent suivre l'ensemble des enseignements inscrits sur leur emploi du temps.