Fillettes disparues depuis sept ans : leur mère, accusée d'homicide volontaire, va-t-elle livrer des explications ?

Naïma Bel Allam est soupçonnée d'avoir tué ou commandité le meurtre de ses deux filles âgées de 11 et 13 ans, et lourdement handicapées. Les deux corps n'ont jamais été retrouvés. La mère de famille, qui habitait Nérac à l'époque de leur disparition, est poursuivie pour homicide volontaire aggravé. Son procès s'est ouvert ce lundi devant les assises du Lot-et-Garonne.

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Tout le monde espère. Le papa, la grand-mère, le personnel de l'institut spécialisé où étaient suivies les filles, les enquêteurs… Chacun attend des aveux. Ou au minimum des explications. Qu'est-il arrivé à Inès et Nawal qui devraient aujourd'hui avoir 18 et 20 ans ? 

Introuvables depuis sept ans

Le mystère remonte à décembre 2016. Les deux fillettes, alors âgées de 11 et 13 ans, sont suivies à l'institut médico-social de Tonneins, en Lot-et-Garonne, un établissement spécialisé dans la prise en charge de jeunes polyhandicapés.  
Car Inès et Nawal présentent de lourdes déficiences motrices et mentales. Leurs capacités cognitives sont limitées. Elles ne parlent pas. Elles ne peuvent pas se déplacer seules, ni se nourrir ou se laver.  

L'institut les accueille en semaine, mais ne s'en occupe pas le week-end ou pendant les vacances scolaires. Et c'est justement après les congés de Noël 2016 que les deux fillettes se volatilisent. Plus personne ne les a jamais revues depuis.

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Explications peu convaincantes

Leur mère justifie l'absence en disant que ses filles sont désormais au Maroc, d'où elle est originaire. Faux démontrera l'enquête, elles sont là-bas introuvables. Elle assure ensuite les avoir confiées à des personnes rencontrées sur l'autoroute en Espagne. Nouveau mensonge. Ses relevés téléphoniques révèleront que Naïma Bel Allam n'a jamais quitté le département.
Alors où sont ses filles ? "Elle ne veut rien dire, c'est son choix" indique son avocat Me Patrick Lamarque. "Elle n'a pas confiance dans les institutions en France, elle a voulu les placer ailleurs". 

Elle dit que ses enfants vont bien, qu'elles n'ont pas eu le covid.

Patrick Lamarque

Avocat de Naïma Bel Allam

Il pense qu'elle n'en dira pas plus au procès. 

Traces de sang

Au printemps 2017, Naïma Bel Allam est d'abord poursuivie pour délaissement de mineurs. Puis, les enquêteurs découvrent des traces de sang dans la chambre des filles. L'ADN confirmera qu'il s'agit bien de celui des fillettes. Elle est alors soupçonnée d'homicide volontaire et incarcérée, pendant quatre ans, puis relâchée sous contrôle judiciaire. Durant toutes ces années, elle ne dira rien de plus.
"Aujourd'hui, elle n'a plus rien. Ses biens ont été saisis. Elle vit dans un centre d'hébergement, elle suit des formations, elle essaie de se réinsérer", indique Me Lamarque. 

Son ex-mari et père des fillettes, qui est aussi son cousin germain, s'est porté partie civile dans cette douloureuse affaire. C'est lui qui s'est occupé d'Inès, l'aînée, à la naissance. Il a quitté le foyer alors que sa femme était enceinte du deuxième enfant, qui risquait lui aussi d'être handicapé. Elle voulait le garder, lui non.
Il voit alors ses filles lors des droits de visites pendant des années, mais fini par couper toutes relations en 2013. Les rapports sont devenus beaucoup trop conflictuels. "Il sait qu'il a été défaillant, qu'il a sa part de responsabilité" explique son avocate Me Sylvia Brussiau, "mais aujourd'hui, il ne dort plus, il veut savoir. Il attend de voir ce que Mme Bel Allam va dire pendant le procès, il aimerait croire que ses filles sont en vie".

L'avocate reconnaît que l'espoir est mince. L'accusée "ment tout le temps" dit-elle.  "Mon client ne l'a pas reconnue pendant la confrontation. Il disait une chose, elle rigolait. Et puis sa maison a été retrouvée dans un sale état alors que c'était une femme très ordonnée. Quelque chose chez elle a changé". 

Ce qu'il attend, c'est la vérité. Si elle arrive à convaincre qu'elles sont en vie, tant mieux.

Me Sylvia Brussiau

Avocate du père d'Inès et Nawal

La vérité, c'est aussi ce que demande la grand-mère des disparues et mère de l'accusée, constituée partie civile avec l'un de ses fils, le frère de Naïma. "Ils espèrent que le procès sera un déclic, qu'elle dira enfin ce qu'il s'est passé, où se trouvent les enfants, si elles sont décédées ou pas et pourquoi" indique leur avocate Me Sophie Grolleau. 

Sa seule façon de s'en sortir, c'est de parler.

Me Sophie Grolleau

Avocate de la mère et d'un frère de l'accusée

Dans l'hypothèse la plus noire et peut-être la plus probable, ces proches veulent pouvoir récupérer les corps et enterrer les filles dignement, dans le respect de la tradition musulmane.

Un dossier vide ?

"Pour moi, ce dossier est vide. Il n'y a aucun témoin, aucune preuve, aucun aveux" martèle Me Lamarque. "Les enfants de ma cliente sont vivantes, elle les a confiées à des tiers, c'est juste qu'elle ne dit pas à qui. Elle maintiendra ce qu'elle a dit" confie-t-il avec conviction.

L'avocat lot-et-garonnais sait que sa cliente risque d'être condamnée sur la base d'une intime conviction. Mais il prévient, une sanction "doit se bâtir sur des faits, pas sur une intuition, pas sur des préjugés, il y a des principes de droit". Il va s'efforcer tout au long des quatre jours de procès de convaincre le jury. "Elle doit être acquittée"

Naïma Bel Allam, 56 ans, encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu jeudi, en fin de journée.

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